Prisonniers afghans - Honte au gouvernement

Harper et la torture



Le gouvernement conservateur de Stephen Harper ne peut plus nier que des prisonniers talibans faits par les soldats canadiens en Afghanistan ont été soumis à la torture par la police afghane. La vérité est venue mercredi de la bouche du chef de l'armée canadienne, le général Natynczyk, qui a confirmé qu'au moins un cas de torture bien documenté existe. Ce faisant, il jetait par terre l'échafaudage de contre-vérités et de sophismes opposés par ses patrons politiques aux révélations faites il y a trois semaines par le diplomate Richard Colvin.
La torture est un acte barbare que les Canadiens ne sauraient tolérer. On peut croire que les soldats canadiens présents en Afghanistan ne l'ont jamais pratiquée. Par contre, il y a toujours eu de forts soupçons selon lesquels on n'a pas pris toutes les dispositions pour s'assurer que la police afghane ne torture pas en toute impunité des prisonniers faits par le Canada.
Ce cas dont le général Natynczyk a reconnu l'existence est particulièrement révélateur. Ainsi, les soldats canadiens avaient rédigé un rapport circonstancié sur leur intervention en 2006 pour reprendre possession d'un prisonnier battu par des policiers afghans. Ils expliquaient avoir pris des photos du prisonnier avant de le leur remettre pour justement avoir des preuves visuelles d'éventuels mauvais traitements. Ils prenaient cette précaution parce qu'ils avaient connaissance de cas où leurs prisonniers étaient passés à tabac. Autrement dit, il était de commune renommée au sein du contingent canadien que les prisonniers remis aux autorités afghanes allaient être torturés, ce qu'en d'autres mots disait par ailleurs le 18 novembre dans un témoignage devant un comité des Communes Richard Colvin.
En arrivant à Kandahar, le contingent canadien a vite décidé que ses prisonniers seraient remis aux autorités afghanes. La procédure de transfert adoptée a plusieurs fois été contestée par des groupes. Jamais on n'a pu garantir que les conventions internationales sur le traitement des prisonniers seraient respectées une fois les portes des prisons refermées. Les rapports du diplomate Colvin visaient justement à alerter le gouvernement canadien.
Le Canada n'a certainement pas été complice au sens propre de l'expression «actes de torture». Aurait-il par contre pudiquement détourné les yeux? Peuvent le laisser croire les propos des divers ministres conservateurs, notamment ceux du ministre de la Défense, Peter Mackay, qui ont tout fait pour rejeter en bloc les révélations du diplomate Colvin. Dans leur volonté de tout nier, ils sont allés jusqu'à attaquer la crédibilité personnelle de celui-ci. La charge a été si lourde qu'un bataillon de près de 100 diplomates canadiens à la retraite est intervenu publiquement à sa défense.
Le déni dans lequel le gouvernement s'est enfermé pendant des jours ne pouvait tenir. Il aura fallu que The Globe and Mail fasse état de ce cas de 2006, que le général Natynczyk sera forcé de confirmer, pour amener le gouvernement à tout au moins admettre ce cas.
Sauf cette nuance: le déni continue. Le démontre bien leur intervention réussie devant la Cour fédérale pour limiter la portée de l'enquête sur la torture entreprise par la Commission des plaintes concernant la police militaire.
Il est bien évident qu'une enquête révélerait de nombreux autres cas de tortures. On verrait alors que ce gouvernement n'a pas assumé toutes ses obligations envers ses prisonniers. Cela, il veut le taire pour ne pas être l'objet de poursuites. Un silence qui vient moralement cautionner le comportement des autorités afghanes. Par là, il accepte une part de la responsabilité des actes de torture qui ont pu survenir à l'endroit ses prisonniers. Une honte qui rejaillit sur nous tous.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->