Souveraineté

Débats houleux en vue sur les alliances

Pauline Marois nie que son parti soit en voie d'extinction

Souveraineté et générations


Québec — Bien qu'elle «partage certains des constats» de Bernard Drainville, Pauline Marois nie que son parti soit en voie d'extinction et rejette tout scénario d'une alliance avec d'autres partis souverainistes. C'est ce que Marie Barrette, porte-parole de la chef péquiste, a fait savoir hier. «Mme Marois ne partage pas le point de vue de Bernard sur les alliances et elle ne craint pas la disparition du PQ», nous a-t-elle écrit, soulignant que la chef péquiste refusait de commenter directement les propos du député de Marie-Victorin.
Dans une entrevue au Devoir en forme de cri du coeur dont le compte rendu a été publié samedi, M. Drainville a soutenu que s'il continue de s'enliser et que l'hémorragie n'est pas stoppée, «le PQ pourrait disparaître». Le député avait proposé il y a quelques semaines une rencontre avec la table éditoriale du Devoir pour discuter des réformes démocratiques qu'il estime nécessaires pour regagner la confiance de la population, lesquelles seront discutées lors d'un Conseil national crucial à la fin du mois à Montréal. Celui-ci sera précédé d'un caucus des élus du PQ à Joliette les 24 et 25. La direction du PQ n'avait pas été informée que M. Drainville rencontrait Le Devoir vendredi.
M. Drainville a soutenu qu'une des solutions à la «situation périlleuse» actuelle est de conclure une «alliance avec Québec solidaire et avec les autres partis souverainistes et progressistes». Certains de ses collègues députés, joints hier, ont rejeté cette possibilité. «C'est un piège naïf. Si Québec solidaire avait été sincère, il n'aurait pas annoncé l'investiture de [la co-porte-parole] Françoise David dans Gouin contre Nicolas Girard», a fait remarquer Yves-François Blanchet (Drummond). Ce dernier estime que son collègue de Marie-Victorin fait d'«intéressants constats», mais qu'il pèche par excès de pessimisme, «surtout à la lumière du sondage de la fin de semaine». Le coup de sonde QMI-Léger Marketing indique que la Coalition avenir Québec aurait perdu quatre points dans les intentions de vote depuis un mois, passant de 37 à 33 %. Dans l'électorat francophone, le PQ talonne la CAQ avec 31 % des intentions de vote. Cela démontre, selon M. Blanchet, que le «pessimisme n'est pas de mise», car «la magie de la nouveauté s'effrite pour la CAQ».
Redevenir un «parapluie»
D'autres se sont réjouis des propos de M. Drainville sur les alliances. Stéphane Bergeron (Verchères), qui avait publié un long texte, cet été, en faveur de cette solution, a dit voir d'un «oeil très positif» l'adhésion de Bernard Drainville à cette thèse. «Je ne suis plus seul», a-t-il commenté, signalant que désormais, un «petit groupe» de députés favorisait la thèse des alliances. «Le mouvement continue de grandir», a-t-il noté. L'automne dernier, Sylvain Pagé (Labelle) a aussi fait des déclarations favorables aux alliances.
Le sujet ne pourra être évité lors du Conseil national des 27, 28 et 29 janvier, puisque des «propositions venant de circonscriptions» réclamant de telles alliances seront déposées, a révélé M. Bergeron, sans préciser de quelles associations elles viendraient. À ses yeux, des ententes devraient aussi être proposées à Option nationale, au Parti indépendantiste et au Parti Vert. Il rappelle que lors de la campagne électorale dans le comté de Bonaventure, le candidat vert Jean Cloutier s'était un temps rallié au PQ (pour ensuite faire volte-face après avoir été critiqué par son chef). Néanmoins, M. Bergeron y voit un signe que la «culture politique évolue», même si la nature du régime politique d'inspiration britannique qui est le nôtre a horreur des coalitions. Il croit que le PQ peut redevenir le «parapluie» pour les forces progressistes et souverainistes. «Il faut qu'on arrête de s'entre-cannibaliser», illustre-t-il. Mais à son sens, le «temps commence à manquer». Le PQ doit bouger, et rapidement, puisqu'une élection générale pourrait être déclenchée dans l'année.
Jointe à l'étranger hier, la député indépendante de Crémazie, Lisette Lapointe, dit avoir tenté en vain de sensibiliser Pauline Marois à la nécessité des alliances, «en 2007». À ses yeux, du reste, c'est Pauline Marois qui met le PQ à risque: «Elle reproche à ceux qui changent de parti de tout sacrifier à leur ambition. Mais elle, en s'accrochant ainsi, elle fait précisément passer ses ambitions avant le bien du Parti québécois», lance-t-elle.
«Investitures multipartites»?
Ancien membre du caucus péquiste et maintenant chef du nouveau parti souverainiste Option nationale, Jean-Martin Aussant croit aussi que le PQ «récolte actuellement ce qu'il a semé». Il souligne que dans la constitution même de son parti, qui sera adoptée lors de son congrès de fondation le 25 février, il est prévu qu'Option nationale appuiera tout parti qui fera «clairement» la promotion de la souveraineté du Québec. Dans une telle éventualité, il proposerait des «investitures multipartites» souverainistes dans chacun des comtés. Un tel mécanisme, inédit au Québec, s'apparenterait à des primaires, «un peu comme ce que les socialistes ont fait en France», note M. Aussant.
La députée de Rosemont, Louise Beaudoin, s'est dite d'accord sur bien des points avec Bernard Drainville samedi, déplorant la «dérive» de son ancien parti. Mme Beaudoin souligne que s'il existait au Québec une catégorie de «membre apparenté» comme en France, elle demanderait à être «apparentée péquiste». Ce serait pour celle qui a démissionné le 6 juin du caucus péquiste un retour au bercail qui lui permettrait en même temps de «conserver sa liberté de parole». «Malheureusement, ça n'existe pas chez nous!»
Par ailleurs, selon des sources, le député de Labelle, Sylvain Pagé, est «profondément déçu» du peu d'écho que ses nombreuses propositions ont trouvé auprès de la direction du parti. Le 7 septembre, M. Pagé publiait son Manifeste pour une nouvelle culture politique qui contenait des dizaines de propositions de changement au régime politique québécois pour le dépouiller des affres de la partisanerie. Une infime partie de celles-ci sera discutée lors du conseil national. Il n'a pu être joint hier.


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