À l’origine, le discours indépendantiste propulsait les gens vers l’avenir,
vers un rêve, une conquête. L’indépendance était le moteur du véhicule qui,
au départ, regroupait des gens venant de tous les horizons et qui prenaient
plaisir à cohabiter en vue de la création d’un authentique chez soi. La
coalition de 1968 était inspirante. C’est en quittant la «maison de fous»
qu’était le Canada fédératif que le Québec deviendrait maître chez lui.
L’indépendance était la solution. Non pas une solution parmi tant d’autres.
L’indépendance était le moteur qui devait conduire les Québécois vers leur
émancipation et leur donner enfin une pleine et entière possession de tous
leurs moyens. Sans le moteur de l’indépendance, la voiture n’avançait pas,
ou, si elle avançait, elle allait se ramasser carrément dans le champ. Tous
les ténors de l’indépendance ont tenu ce discours rassembleur, unificateur,
prometteur. Ils ne le tiennent plus. Ils ont perdu la foi.
Ce type de discours est mort depuis le référendum de 1995. Les
indépendantistes – lire : les péquistes et les défunts bloquistes – ne
parlent plus de l’indépendance du Québec. Ils parlent de gouvernance
souverainiste, d’un référendum hypothétique, d’une date à déterminer, d’un
échéancier à long terme. L’indépendance du Québec n’est plus le moteur de
leur action. Elle est devenue la remorque qui, clopin-clopant, aboutée à un
vieux char usé, poqué, mal entretenu, n’inspire plus aucun voyageur.
L’indépendance est devenue le boulet qui empêche d’innover, de créer de
l’enthousiasme parmi les troupes décimées. Le vieux nationalisme de la
défunte Union nationale reprend du poil de la bête. À défaut d’un vecteur
bien ciblé, on se contente du mythe de l’éternel retour.
Dans l’auto qui traîne les rescapés de l’aventure, les uns restent cois
devant le constat de l’échec, d’autres, rêvent à mots couverts, d’un
souffle nouveau venant de l’Ouest, pour ranimer une flamme qui vacille au
gré des démissions en séries.
Les Québécois sont sonnés. Les Québécois sont tannés. Les Québécois
n’arrivent pas à se brancher. Entre la remorque de plus en plus lourde à
porter et le moteur qui a sans cesse des ratés, ils hésitent, vacillent, se
dispersent. Les opportunistes se cherchent une niche, un emploi, pour
poursuivre une carrière morcelée, désorientée, sans épine dorsale.
Visiblement, il n’y a plus d’espoir en cette voiture amochée, qui, au lieu
de concrétiser le rêve espéré ne fait qu’enfanter le rêve éclipsé. Le
Québec attend. Il n’espère même plus. Il craint. Il se résigne.
Quand un peuple accepte ainsi le sentier du défaitisme et de l’assimilation
à petit feu, c’est qu’il n’est pas «quelque chose comme un grand peuple». À
moins que naisse ou dorme en ses murs un cœur libéré qui ferait éclater les
peurs et les hésitations qui somnolent au sein de la majorité, le Québec
périra dans l’histoire. Il sera un des rares peuples, majoritairement
inscrit dans le déroulement des événements humains, qui aura accepté de
mourir sans lever le petit doigt. Le colonialisme a sans doute ses limites.
Il semble qu’en terre laurentienne, il est capable de se dépasser et de
creuser la tombe d’une nation qui ne sait plus porter son destin.
Nestor Turcotte - Matane
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
Moteur ou remorque?
Les Québécois sont sonnés. Les Québécois sont tannés. Les Québécois n’arrivent pas à se brancher.
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9 commentaires
Archives de Vigile Répondre
13 janvier 2012La gouvernance souverainiste c'est en attendant de déclencher le référendum. Possiblement mais pas forcément lors d'un premier mandat. L'idée est de prendre l'adversaire par surprise. Nouvelle stratégie. Je n'ai rien contre.
Je m'impatiente aussi, mais je fais confiance. Le PQ a deux fois offert aux québécois le choix de prendre leur destinée en main. Il y aura une troisième fois si le parti prend le pouvoir. La paranoïa qui veut que le PQ ne soit pas souverainiste ne m'atteint nullement. Trop sur Vigile sont atteints. Le PQ est souverainiste. Depuis toujours et pour toujours. L'inquiétant est de savoir s'il peut survivre au règne de Marois combiné à l'entrée en scène du renégat Legault dans le paysage politique.
Ce n'est pas le moment de quitter le navire comme les sept démissionnaires (dont trois rats).
Une mutinerie, un nouveau capitaine, et on repart vers notre pays!
Archives de Vigile Répondre
12 janvier 2012ERRATUM ERRATUM
Au lieu de: Que le peuple qui est majoritaire, au Québec, se laisse embobiner...devrait lire comme ceci: Que le peuple du Québec se laisse embobiner... Merci
André Gignac 12/1/12
Serge Jean Répondre
12 janvier 2012Bonjour monsieur Nestor Turcotte.
Merci pour le bois dans la cheminée, car l'hiver du peuple est rigoureux. Votre regard sur la désolation du paysage est tout-à-fait conforme à la réalitée visible et tangible. Le char,le vaisseau, est magané, il n'est même pas en cale sèche pour la restauration; il pourrit au port de la prostitution, de l'abnégation, du reniement pour les miettes qui tombent sous la table des contrebandiers. Mon pays, ma maison, elle passe sur les chariots du chemin de fer à tous les jours devant mes yeux d'expulsé,de fugitif dans mon propre pays, vers les marchés du boursier défoliateur de peuple.
Premier commandement du spoliateur,
1: Tu ne te serviras point de ta souveraineté naturelle pour prendre le bois de ta maison sur la terre de ton peuple.Tu dois acheter le bois estampillé de la marque du spoliateur et payer avec l'argent du spoliateur ton maître.
2: Tu ne dois révéler à quiconque le passage secret du créateur qui monte de tes entrailles, il n'est pas bon que le peuple s'abreuve à la source car leurs yeux s'ouvriront et ils deviendront libres, au pays des diamants sur la neige le Québec.
Pauvre peuple, fatigué, contaminé, déchiré, drogué, rentre dans ton pays en raquette sur tes diamants s'il le faut, souviens-toi et reviens.
Merci à vous.
Archives de Vigile Répondre
12 janvier 2012Monsieur Turcotte
Avec le statu quo prôné par le PLQ et la gouvernance souverainiste du PQ qui est l'équivalent de l'autonomie provinciale de l'ancienne Union Nationale; je ne vois qu'une solution pour sortir de ce merdier politique et ça passe par la RÉVOLUTION, rien de moins! C'est aux jeunes, à la génération montante, de prendre la relève et de s'impliquer politiquement sinon leur avenir sera hypothéqué pour longtemps.
Sans l'indépendance, le Québec est foutu ; le temps joue contre nous avec l'assimilation et l'immigration de plus en plus envahissante. Que le peuple qui est majoritaire, au Québec, se laisse embobiner de la sorte, par mon oncle Paul et sa gang d'affairistes du PLQ, du PQ, et de la CAQ de Sirois-Legault, ça me dépasse!
RÉVOLUTION! DANS LA RUE QUÉBÉCOIS!
André Gignac 12/1/12
Archives de Vigile Répondre
12 janvier 2012Il y a longtemps que «le grand peuple» (dont je suis) creuse sa tombe. Collectivement, nous avons paniqué à l'occasion du Coup de la Brink's, nous avons capitulé lors de l'agression fédéraliste de la Crise d'octobre, nous nous sommes bouché les yeux devant les procès politiques faits par la suite aux felquistes, nous avons regardé passer le rapatriement de la constitution qui subordonnait notre Parlement encore davantage au Canada, nous nous sommes sans plus scandalisés du torpillage de Meech, nous avons accueilli la Loi sur la clarté avec indifférence, nous assistons sans réagir à la grande braderie institutionnalisée par Charest and co, nous applaudissons à l'entrée en scène du comptable Legault et de ses opportunistes. Et par deux (2) fois, depuis 30 ans, nous avons formulé un mièvre Oui à l'indépendance, insuffisant en tout cas pour coiffer la minorité canadian, en l'occurrence totalement étrangère à notre réalité de nation. A quoi devrions-nous nous attendre maintenant?
Archives de Vigile Répondre
11 janvier 2012Monsieur Turcotte
Tant que les dirigeants politiques au Québec ne se débarrasseront pas de cette mentalité perdante et de collabo avec le système fédéral en place; mentalité qui remonte à la défaite de 1759, le bazou ou la minoune dont vous parlez dans votre texte va se retrouver encore assez souvent au garage pour des réparations coûteuses. Au risque de me répéter, comment voulez-vous que le peuple embarque sur le chemin de l'indépendance si sa classe politique ne lui présente pas un discours emballant avec tous les avantages de la réaliser? Ce n'est pas un discours affairiste que le peuple québécois veut entendre mais un discours logique et positif.
Présentement, nous tournons en rond comme ce n'est pas possible au Québec parce que nos dirigeants politiques ont la trouille de sortir de ce provincialisme réducteur, étouffant qui mine le meilleur de nos élans collectifs. Le PQ veut nous ramener au temps de l'ancienne Union Nationale avec sa gouvernance souverainiste; si ce n'est pas de la régression, je me demande bien ce que c'est? C'est en avant, avec confiance, qu'il faut regarder; il faut se prendre en main et devenir un peuple mature et responsable. Si près de 200 pays ont réussi à acquérir leur indépendance dans le monde, je ne vois pas pourquoi nous ne ferions pas de même. CONFIANCE! CONFIANCE!
André Gignac 11/1/12
Pablo Lugo Herrera Répondre
11 janvier 2012Prizeau au lieu de continuer le combat a décidé de blâmer le fédéral et l'immigration. Aujourd'hui, pour être un pays, il faut que nous soyons fiers d'être québécois en contestant l'autorité d'Ottawa, acheter seulement de produits québécois et de nous séparer unilatéralement du Canada, car il n'a pas fait un referendum pour nous adhérer. Nous continuons de vivre dans une simple province, car nous sommes des esclaves qui aiment les chaines!
Archives de Vigile Répondre
11 janvier 2012Malgré le réalisme de vos propos et leur justesse, je demeure optimiste et je refuse de baisser les bras.
On s'est fait baiser pas à peu près par les péquistes, mais on est capable de tirer les conclusions qui s'imposent.
C'est ce que je fais dans un livre qui sortira à la mi-février.
Je tire sur les péquistes mais j'indique une voie pour sortir du tunnel.
Pierre Cloutier
Archives de Vigile Répondre
11 janvier 2012"Le colonialisme a sans doute ses limites. Il semble qu’en terre laurentienne, il est capable de se dépasser et de creuser la tombe d’une nation qui ne sait plus porter son destin."...
....voilà: l'échec de la colonisation française en Amérique (contrairement aux Espagnols, Portugais, Anglais).
À entendre ce matin à la radio publique les porte-paroles des Premières Nations, ces gens ont été parqués sans jamais perdre leur fierté et maintenant ils font, non seulement éclater la palissade, mais ressortir la vérité sur leur terre! Ils reviennent en souverains et ils ont l'opinion internationale de leur bord. Retour à la case Giovanni da Verrazzano. On efface et on recommence: le nouveau monde attend les "explorateurs" de pied ferme.