L’anglais, c’est la santé! Voilà le nouveau slogan publicitaire des assurances santé de Gesca. [Dans une édition récente, la campagne signée Marie-Claude Lortie dans La Presse nous en proposait une autre mouture.->6818]
Mary is a nurse. Appelons-la Mary, puisque c’est le nom que La Presse lui donne. Si elle s’appelait Marie, elle serait infirmière, mais telle qu’elle est, elle n’est que nurse. Appelons son mari John, puisque c’est avec ces deux prénoms qu’on apprend généralement les rudiments de la langue des boss d’hôpitaux désignés anglophones. L’histoire de La Presse dit seulement que John est venu travailler au Québec. De toute évidence, John parle anglais sinon ses rapports avec sa femme seraient limités; Mary est incapable de communiquer en français.
Dans les hôpitaux anglophones, on n’a aucun problème à engager des frenchies bilingues pour passer la moppe ou répondre au téléphone. Ma visite récente au Montreal General Hospital m’a démontré que partout le visiteur pouvait trouver facilement un bénévole ou un préposé parlant français. Il faut dire que Montréal compte sur un bassin impressionnant de bilingues de bas d’échelle, c’est-à-dire des francos parlant anglais non pour améliorer leur sort mais simplement pour survivre avec un petit boulot exigeant la maîtrise de la langue des boss..
Depuis quelque temps, la névrose du colonisé québécois semble de plus en plus se cristalliser autour des soins de santé. Le dossier du grand hôpital universitaire y est pour beaucoup. Pendant que les élites de la configuration politique actuelle, y compris celles du PQ, cherchent à gommer la terrible prise de conscience qui semble poindre concernant la santé — le poste budgétaire le plus important dans une « province » canadienne — le malaise est palpable chez les anglos et leurs alliés collabos chez Gesca. Il y a de fortes sommes en jeu pour le consortium d’assurance santé privée.
Québec consacre 25% des places en médecine à McGill. Or, il n’y a que 10% des médecins pratiquant au Québec ayant été formés à cette institution. Nous formons à nos frais des médecins qui iront pratiquer ailleurs et nous maintenons à grands frais une part disproportionnée de nos institutions en anglais. Peu importe ce qu’en croient les péquistes de la bonne entente dans leur bulle, les conséquences de cette situation sont désastreuses pour notre lutte politique.
Même à l’école d’optométrie de l’Université de Montréal, les affiches pour les visiteurs et les documents dont se servent les étudiants sont très souvent en anglais. Quand un citoyen d’une « minorité visible » apparaît, on lui parle en anglais. Dans la situation coloniale, on permet à la majorité de parler sa langue mais on lui interdit de l’apprendre aux immigrants qui doivent demeurer sous la direction du colonisateur. Pour « faire sûr » qu’on comprenne, comme nous disent les assimilés francocanadiens, on s’assure que l’enseignement de pointe soit d’abord fourni en anglais et traduit quand on a le temps un peu plus tard. Les étudiants y apprennent ainsi que la médecine avancée est en anglais et que le reste est pour les attardés.
Il n’y a rien comme le confort que procure la cessation des tapes sur la gueule pour apaiser le colonisé. Il comprend d’ailleurs assez rapidement qu’il lui est préférable de désigner un colonisé plus combatif que lui à la vindicte organisée par ses boss afin de s’assurer que ce n’est pas lui qui servira d’exemple.
Dans cet article, ce sont les institutions québécoises qui sont mises en cause. L’OLF, pour appliquer les règlements que l’État lui demande d’appliquer, et l’Ordre des infirmières qui respectent les règles de l’OLF. Les mêmes haut-parleurs de Gesca parlent souvent d’améliorer la qualité du français qui est « dont mal parlé » par les francophones. Dans une situation aussi grave qu’une maladie qui vous confine à l’hôpital, la qualité du français est présentée comme hors d’ordre. Que votre infirmière soit incapable de vous expliquer correctement ce qui vous arrive et ce qu’on fera de vous est sans importance. Comme le médecin de McGill ne daignera pas vous parler en français non plus, il vous restera à demander à la préposée ce qu’elle peut apprendre en furetant incognito dans votre dossier.
Maintenant que plusieurs parvenus franncoquébécois se sont mis à renier leur désir de faire l’indépendance, maintenant qu’ils sont bien sûrs que leur bulle médiatique est étanche aux trouble-fêtes, leur discours est devenu franchement délirant. Quand on ne s’y expose pas trop souvent, leur stupidité saute aux yeux.
Le piège, c’est de chercher à combattre ce discours au pied de la lettre. Ces discours nous sont destinés pour que nous y perdions notre temps. À un moment donné, nous pensons avoir gagné alors qu’on nous a laissé nous exprimer dans un contexte qui rend inopérants nos arguments. Quand on ne lit pas La Presse quotidiennement, l’incohérence de la rhétorique apparaît évidente. Quand on essaie de répliquer dans La Presse, on l’alimente; soit en se faisant ramasser sur une mauvaise tournure de notre critique, soit en révélant nos meilleurs arguments à ceux qui s’empresseront de les contrer là où ça compte, dans le quotidien des colonisés. Votre « lettre de lecteur » ne sera pas publiée pour le bénéfice de tous, mais elle sera lue par ceux qui entretiennent le discours aliénant des médias étrangers qu’on nous impose.
Nous avons souvent joué aux finfinauds avec les Anglais. La corde qu’ils nous donnaient pour nous pendre, nous avons parfois trouvé le moyen de nous en servir pour nous sortir du trou. Mais toutes ces manœuvres peuvent être retenues contre nous. Nous sommes condamnés à ne pas répéter non seulement nos erreurs, mais aussi nos bons coups. L’ennemi nous observe. Il prend des notes et teste les dernières modes de fabrication du consentement.
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À propos, vous saviez que madame Jérôme-Forget, ministre des Finances du gouvernement minoritaire libéral, avait un doctorat en psychologie industrielle de McGill? C’est d’ailleurs en se basant sur ses études en anglais qu’elle expliquait à ma tante Christiane Charrette pouvoir parler au nom des anglais dans le cabinet! Peut-être que ses modèles de manipulation datent?
Parce que, contre toute logique parlementaire, les libéraux minoritaires ont présenté un budget qui correspond à ce que les électeurs ont rejeté lors des élections du 26 mars 2007. On ne connaît pas leurs calculs, mais on devine qu’ils ont tablé sur le conservatisme et la prudence qu’ils attribuent à leur mythique « majorité silencieuse ». La grande psychologue épicière libérale a même parlé de gaspillage de 72 millions de dollars en frais d’élections « pour rien ». Pour rien, vraiment?
Dans le labo des collabos, il y a des expériences qui peuvent mal tourner pour les manipulateurs mal patentés.
Sylvain Deschênes
Le labo des collabos
Dans le labo des collabos, il y a des expériences qui peuvent mal tourner pour les manipulateurs mal patentés.
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