Le bonhomme harpeur

Chronique de Sylvain Deschênes




La campagne électorale qui s’achève s’est déroulée pendant le carême mais on se retrouve à la fin dans une sorte de Mardi gras à l’envers avec le bonhomme harpeur, ses gros chars et les gentilles alouettes de sa fanfare.

Bien sûr, nous avons eu, au milieu de cette période, selon la tradition observée par Pierre Perreault, la fête de la mi-carême.

« Le but de cette mascarade était de se vêtir de vieux manteaux, sacs de patates, peaux de fourrures et même grosses boites de cartons, le tout le plus ample possible, qu'on remplissait de paille ou de vieux journaux afin de tromper la vigilance des gens de la maison qui faisaient tout leur possible pour deviner qui se cachait sous ces déguisements. »

Au débat, on n’a pas eu de mal à reconnaître le sac de patates, la boîte de carton et le remplissage de paille. La tradition était sauve jusque-là.

C’est maintenant, en fin de campagne, alors que bonhomme harpeur se pointe avec sa grosse tête en papier mâché, qu’on reconnaît l’étranger à nos affaires. Résolu dans l’énormité de son ignorance, bonhomme harpeur pensait qu’on pouvait prendre à revers une tradition et la retourner comme un pancake.

Depuis le temps qu’on nous présente ce gros obtus comme un grand stratège, m’est avis qu’il ne sera pas long qu’il mangera de la casserole par la tête avant longtemps. Avec pour émissaire son espèce de punk sénateur arrogant et grossier qui tape sur les fesses de sa pute préférée pour la désigner au client, bonhomme s’est donc fait le souteneur autoritaire du premier ministre le plus servile de l’histoire moderne du Québec. Au fait, n’y avait-il pas un président de carnaval dans les filets de l’opération Scorpion?

Voici comment on a traduit en french canadian la tradition de la mi-carême sur un site du Canada. Peut-être est-ce ainsi qu’on a expliqué à bonhomme comment fonctionnait l’événement :

«[…] il était convenu qu'au bout de vingt jours les enfants seraient autorisés à rompre le carême en mangeant quelques gâteries. C'est ce qu'on appelle la Mi-Carême. Un personnage, prenant souvent les traits d'une vieille femme couverte de haillons, distribuait des friandises aux enfants sages. Il possédait une allure un peu effrayante et mystérieuse que les enfants craignaient malgré les bonbons laissés sur son passage. »

Bon, évidemment, l’histoire est confuse parce qu’on parle de distribuer aux enfants sages puis de bonbons laissés au passage. Pas grave. Ces traditions galvaudées pour les touristes finissent quand même par révéler la réalité qu’on essayait d’occulter.

John Charest, qui n’est pas non plus très versé en culture traditionnelle québécoise, s’est emparé des bonbons sans aucune crainte. Si son comportement a dans un premier temps nourri à merveille la vision d’un Québec infantile et irresponsable, les autres enfants de la confédération n’ont pas tardé à rouspéter. Seul le vrai père de la confédération canadienne est autorisé à distribuer les friandises dans le monde canadian. Même avec un air effrayant.

C’est souvent par arrogance que le gouvernement fédéral ravive le nationalisme québécois. Un peu gêné d’avoir à confronter son père politique putatif, Mario Dumont a fini par affirmer que bonhomme harpeur n’avait pas à obliger le Québec à se donner un représentant fédéraliste. Comme si lui-même ne l’était pas. On sait bien que le chef de l’ADQ surfe sur un peu n’importe quoi, mais quand il peut se maintenir sur la crête d’une vague en refusant l’étiquette fédéraliste, c’est le signe que sous le discours médiatique ambiant, la volonté d’indépendance du peuple est toujours là.

Avec ce cafouillage énorme de l’ennemi canadian en fin de campagne, on dirait que la donne résultant des élections du 26 mars 2007 pourrait prendre un sens inattendu. Après tout, la tradition du carême est destinée à mettre en valeur la fête du renouveau qui la clôt. Les stratégies de chacun risquent de changer si personne n’a la majorité de faire ce que bon lui semble sans consulter la rue.

Faut se ruer dans la rue, au printemps comme une crue

Faire éclater notre ras-le-bol, une débâcle de casseroles

Trêve de paroles, faites du bruit!

Un charivari pour chavirer ce parti, comme en Argentine, en Bolivie

D’un pôle à l’autre, c'est un constat continental :

À bas le bulldozer libéral !

Loco locass, Libérez-nous des libéraux


Sylvain Deschênes


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