« Les Québécois sont tannés des donneurs de leçons. » Cette ligne de François Legault était, en mon humble avis, la meilleure ligne de communication de toute la dernière campagne électorale. Simple, imagée et allant droit au but, elle résumait bien ce que la Coalition avenir Québec entendait faire : parler sereinement de laïcité, sans s’énerver, pour en arriver au plus large consensus possible.
Un gouvernement calme, majoritaire et serein
À ce niveau, on ne peut que donner A+ à Simon Jolin-Barrette et à François Legault : dans le but de s’éviter certaines remontrances, ils ont accepté de faire un compromis sur la clause de droits acquis ainsi que sur le crucifix à l’Assemblée nationale, alors qu’ils auraient tout à fait pu s’appuyer sur la majorité populaire qui donnait raison à leur position initiale, à en croire tous les sondages.
Au Québec, c’est comme ça qu’on vit.
Dimanche, le premier ministre s’est adressé aux Québécois depuis son bureau, dans un court discours de moins de trois minutes. Avec le plus grand calme, il a réitéré sa volonté de mettre fin à une décennie de débats sur les accommodements religieux avec un projet de loi modéré, protégé par la clause nonobstant. Sans hausser le ton, comme un vrai homme d’État qui parle au Québec tout entier et non plus à sa seule base électorale, François Legault a honoré sa promesse de parler de laïcité avec sérénité, concluant son allocution d’un sobre : « Au Québec, c’est comme ça qu’on vit. »
Une opposition minoritaire, mais hystérique
À l’inverse du chef de la CAQ, les opposants au projet de loi 21 ont brillé par leur arrogance, leur mépris et leur absence totale de recul sur cet enjeu polarisant. Pour le sénateur André Pratte, la loi 21 consistait à opposer « droits fondamentaux » et « valeurs québécoises ». Considérant que ces « droits fondamentaux » que brime la loi ont été décidés en cachette dans le dos du Québec lors de la nuit des longs couteaux, peut-être auraient-ils plus de poids au Québec si le gouvernement avait été consulté avant l’imposition par Pierre Trudeau de sa Charte canadienne des droits et libertés?
François Cardinal, de son côté, a écrit dans La Presse que « la majorité n’a pas toujours raison », prétendant comme autant de démocrates à temps partiel que le verdict populaire n’est valide que lorsqu’il se conforme à son idéologie. A-t-on déjà vu M. Cardinal contester la volonté populaire lorsque les sondages montrent que l’option souverainiste est en déclin?
À l’inverse du chef de la CAQ, les opposants au projet de loi 21 ont brillé par leur arrogance, leur mépris et leur absence totale de recul sur cet enjeu polarisant.
Dans Le Droit, le très condescendant Patrick Duquette signait un texte intitulé Pour rassurer les « de souche », qui faisait passer la loi 21 comme le caprice raciste et injustifiable d’une majorité intolérante. À l’inverse, cette volonté de laïcité a des racines profondes dans l’histoire et dans l’identité du Québec moderne, que les grands défenseurs des « opprimés » choisissent volontairement d’ignorer. Du haut de sa montagne, le chroniqueur a livré une chronique-sermon irrespectueuse et indigeste.
On pouvait même voir passer sur Twitter des opposants du projet de loi caquiste qui reliaient l’appui de 70% au projet de loi de la CAQ au taux d’analphabétisme fonctionnel au Québec, prouvant qu’il n’y a pas de limite au mépris dont font preuve les défenseurs du modèle multiculturaliste lorsqu’ils s’aperçoivent que le gouvernement et la population sont en désaccord total avec eux.
La cause de la crise de confiance médiatique
Durant le débat sur la charte des valeurs, la situation était exactement pareille : 70% des intervenants médiatiques fustigeaient le projet de loi du ministre Drainville alors que 70% des électeurs étaient en accord, des proportions inversées qui mettent bien en lumière le fossé qui peut parfois séparer les élites médiatiques de l’électeur moyen. Hors de l’empire Québecor et du Devoir, on pouvait bien essayer de trouver un quelconque chroniqueur qui défendrait le projet de loi, c’était peine perdue, surtout chez Gesca et Power Corp.
Les journalistes et chroniqueurs ont beau dénoncer la « crise de confiance » à l’égard des médias, s’ils continuent d’enchaîner les leçons en répétant à leurs lecteurs qu’ils sont des crétins xénophobes, les chances sont que le fossé continuera de s’aggrandir.
Probablement que les chroniqueurs des grands journaux, qui jouent aux « donneurs de leçons » en ce moment même, ignorent qu’en insultant l’écrasante majorité des Québécois, en les traitant de racistes et d’intolérants, ils ne rallient absolument personne à leur cause. Bien au contraire, la majorité absolue qui appuie la loi 21 est très consciente que son appui est valide, légitime et tout à fait acceptable en démocratie. Ce n’est pas une comparaison de plus ou de moins avec Adolf Hitler qui fera soudainement changer tout le monde d’idée, quoi qu’en pense Luc Lavoie.
En crachant tout leur fiel sur les électeurs, les commentateurs anti-laïcité ne se rendent pas compte qu’ils repoussent le public encore plus loin des médias traditionnels. Ils ont beau dénoncer la « crise de confiance » à l’égard des médias, s’ils continuent d’enchaîner les leçons en répétant à leurs lecteurs qu’ils sont des crétins xénophobes, les chances sont que le fossé continuera de s’aggrandir. Manifestement, les multiculturalistes ne savent pas débattre de manière civilisée, l’invective à saveur moralisatrice leur vient plus facilement.
La CAQ marque des points
Pendant que ses adversaires s’échaudent, perdent leur calme et méprisent les Québécois, le gouvernement de la Coalition avenir Québec est en parfait contrôle de l’agenda. Modérés, calmes et ayant multiplié les compromis, Simon Jolin-Barrette et François Legault sortent auréolés de cet exercice, qui a prouvé leur capacité à mener un débat aussi polarisé de manière à non seulement apaiser le débat, mais à le régler de manière durable.
Si le gouvernement continue sur cette lancée, il est clair que la CAQ n’a pas fini de trôner au sommet des sondages, frôlant les 50% d’intentions de vote. Et ce sera largement la faute de ses adversaires, qui comptent dans leur propre but avec des interventions aussi moralisatrices que déconnectées. On aurait pu penser que des leçons auraient été apprises des ridicules « braises de l’intolérance » de Philippe Couillard, mais il semble bien que ce ne soit pas le cas.