Crise espagnole

Le supplice

Crise — Espagne



Après la torture grecque, voici le supplice espagnol. Pour la troisième fois en deux ans, voilà que le gouvernement de Mariano Rajoy, premier ministre et patron du Parti populaire ayant remporté les élections de novembre dernier, vient de décréter une réforme du Code du travail si dure qu'elle a convaincu plus d'un million d'Espagnols de descendre dans les rues des villes du pays. Et selon les dirigeants syndicaux, le mouvement de contestation organisé samedi est le premier d'une série qui sera rythmée, espèrent-ils, par une grève générale. Détaillons.
À la faveur des modifications écrites par le conservateur Rajoy, les licenciements économiques ont été facilités et les indemnités de chômage ont été réduites comme une peau de chagrin. Mieux, on permet aux employeurs d'abaisser le salaire comme le temps de travail de leurs employés. En cas de refus, tenez-vous bien, le travailleur sera mis à la porte et son assurance chômage passablement amputée. En clair, Rajoy a mis la table pour que la main-d'oeuvre soit corvéable à souhait. Quoi d'autre? Ici comme en Grèce et ailleurs sur le continent, l'imposition de l'austérité ne s'accompagne pas d'un plan de croissance.
À la décharge de ce gouvernement, il faut souligner que l'Espagne a le ratio de dette combinée, soit dette publique plus dette des entreprises plus dette des ménages, le plus élevé au monde derrière le Japon et le Royaume-Uni. Combien? 366 % du PIB! Elle est d'ailleurs si élevée qu'elle rend impossible un programme de «sauvetage» comme celui dont la Grèce est actuellement le sujet.
Le hic, c'est qu'en empruntant, là encore, la voie de l'austérité, le premier ministre Rajoy risque fort d'aggraver la situation. On s'attend en effet à ce que des banques régionales, étouffées par la progression de mauvais prêts sur le flanc de l'immobilier, soient condamnées à la faillite. Les plus pessimistes des économistes vont jusqu'à prévoir une réaction en chaîne. D'autant que certains de ces établissements financiers ont prêté des sommes énormes à des provinces, dont la grande majorité sont percluses de dettes.
Tout cela se passe dans un pays qui affiche le taux de chômage le plus élevé du continent (23 %). On ne le répétera jamais assez, chez les moins de 25 ans, il frôle les 50 %! Il est d'ailleurs si énorme qu'on a observé un phénomène socio-économique d'un style nouveau: davantage d'Espagnols émigrent en Amérique du Sud que l'inverse. C'est dire.
Dans cette histoire, ce qu'il y a de très triste c'est que tout un peuple paye pour les erreurs macro-économiques commises par le conservateur José Maria Aznar au début des années 2000. En misant tout, ou presque, sur le couple immobilier et finance, en adoptant un modèle conçu au Royaume-Uni, l'ex-patron du Parti populaire a posé les bases d'une boîte de Pandore économique. Le pire, c'est que l'on n'a pas fini d'en mesurer les dégâts.


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