Crise de l’euro

Rabat-joie

Crise — Espagne


Le premier ministre espagnol, Mariano Rajoy, a fait ou plutôt a été obligé de faire ce qu’il s’était refusé de faire jusqu’à présent : imposer un plan d’austérité particulièrement sévère. En effet, les ministres des Finances de la zone euro ont troqué l’aide accordée aux banques espagnoles contre des économies supplémentaires de 80 milliards. Soit dit en passant, pour reprendre les mots d’un économiste, les dirigeants européens ont concocté tellement de plans de la sorte au cours des deux dernières années qu’on ne les compte plus.
La recette confectionnée par Rajoy est au fond une copie carbone de celles composées par ses homologues européens et par son prédécesseur, soit une combinaison de baisses des salaires, coupes dans les budgets sociaux, réductions des allocations chômage dans un pays où le nombre de sans-emploi atteint un niveau record, plus de 24 %. Bref, le geste posé par le gouvernement est à l’image du chien qui essaye de se mordre la queue.
En effet, cette énième cure de cheval va se traduire inexorablement par une chute de la demande intérieure qui, greffée notamment à un recul du tourisme, activité phare de l’économie, va oblitérer quelque peu la croissance. À cet égard, il faut souligner deux fois plutôt qu’une que le ministre espagnol des Finances vient de calculer que le manque à gagner, depuis 2007, de recettes fiscales découlant des faillites d’entreprises, du chômage et autres plaies avoisine les 90 milliards.
Ainsi donc, sous l’impulsion des marchés, Bruxelles formule un certain nombre d’exigences alors que ces mêmes marchés ne cessent d’augmenter le taux d’intérêt afférent aux bons espagnols. Encore une fois, au début de la présente semaine et avant le dévoilement du plan de Rajoy, les acteurs financiers ont imposé à l’Espagne comme d’ailleurs à l’Italie une autre hausse du loyer de l’argent. Signe d’une humeur de plus en plus morose, le lendemain…
Le lendemain, la France a bénéficié, elle, d’un taux négatif. Autrement dit, cette nouvelle qui n’est bonne qu’en apparence illustre combien la course à la sécurité est encombrée. Il révèle également une anticipation. Laquelle ? Ceux qui ont acheté des bons français parient sur une baisse continue de l’euro. Sur une poursuite de la crise de l’euro, mais non sur son éclatement.
En attendant de savoir si ces derniers avaient vu juste, bien des économistes s’inquiètent encore et toujours de cette surenchère d’austérité. À telle enseigne que, pour reprendre les mots de Jean-Marc Daniel, professeur à l’ESCP-Europe, soit les «bâilleurs de fonds, et avec eux la chancelière Angela Merkel, sont idiots, soit ils sont machiavéliques». On ne saurait mieux dire.


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