Élections fédérales

La tentation néodémocrate

Élection fédérale du 2 mai 2011 - au Québec : une « insurrection électorale »


Le NPD serait maintenant en tête au Québec avec 36 % des intentions de vote, selon un sondage de la maison CROP, dont les résultats étaient publiés hier par La Presse. Il s'agirait d'un gain de 10 ou 12 points par rapport aux sondages des jours précédents. Le caractère subit de cette progression étonne pour le moins, mais, chose certaine, les électeurs québécois sont davantage séduits que par le passé par la formation de Jack Layton.
Les néodémocrates ont toujours rêvé d'une percée au Québec. En 1988, ils avaient cru leur tour venu. Ils venaient de remporter une victoire à une partielle dans Chambly et croyaient pouvoir prendre trois ou quatre autres sièges. Ce fut peine perdue. L'élection s'est jouée sur l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Rien ne résista à la vague conservatrice.
La conjoncture électorale leur est cette fois plus favorable. Font la différence plusieurs éléments. Il y a d'abord l'arrivée dans le décor de Thomas Mulcair qui, en 2007, remporte Outremont dans une partielle, puis est confirmé député à l'élection de 2008. Il donne au NPD le visage qui lui manquait. Puis, il y a Jack Layton qui joue la carte de l'ouverture au Québec. L'homme est débonnaire, parle français sans complexe malgré son accent du West Island, sa terre natale. Il intervient tous les jours dans cette langue aux Communes et appuie régulièrement les propositions du Bloc québécois.
La stratégie Layton-Mulcair était d'imposer l'idée que leur parti est la solution de rechange au Parti libéral et au Bloc. L'idée fait son chemin d'autant plus facilement que l'image des libéraux ne s'est pas vraiment améliorée sous Michel Ignatieff. Il incarne toujours le refus aux aspirations politiques d'autonomie ou de souveraineté des Québécois, tandis que le NPD, s'il n'a pas un passé totalement vierge à cet égard, a toujours manifesté une plus grande réceptivité.
Une certaine fatigue des électeurs du Bloc, du moins d'une partie de son électorat, favorise aussi le NPD. Cette élection est la septième de la formation souverainiste et la sixième que dirige Gilles Duceppe. Le discours voulant que voter pour le Bloc conduise à un cul-de-sac, qu'il n'exerce aucune influence réelle, commence à porter ses fruits. Tout comme il y a des militants péquistes qui désertent le Parti québécois, il y a des bloquistes tentés d'aller voir ailleurs. Le NPD est un refuge d'autant plus naturel que les deux partis sont proches parents sur le plan idéologique, exception faite de la question de l'avenir politique du Québec.
L'attrait soudain qu'exerce le NPD appelle une mise en garde. Il faut se rappeler pourquoi jusqu'ici le NPD n'avait pas réussi à prendre racine au Québec. Si elles sont progressistes, ses politiques ont toujours été excessivement centralisatrices. Le vrai pouvoir ne peut être qu'à Ottawa. A-t-il fondamentalement changé? On n'a que des réponses partielles, comme lorsque Jack Layton dit être favorable à un fédéralisme asymétrique. Ou contradictoires, comme lorsqu'il promet un jour verser au Québec la compensation de 2,2 milliards pour l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, pour le lendemain lui tourner le dos en donnant sa bénédiction à la garantie de prêt à Terre-Neuve pour le développement hydroélectrique du Bas-Churchill. Si sympathique puisse être Jack Layton, il faut savoir à quoi un flirt avec le NPD peut conduire. Pour le moment, ses réponses sont beaucoup trop courtes.


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