La sortie des partis d’opposition au sujet de l’état des finances publiques du Québec, la semaine dernière, a fait réagir le ministre des Finances, Nicolas Marceau. Il est trop tôt pour juger, a commenté le ministre avant d’ajouter que la situation était loin d’être aussi désastreuse qu’ailleurs. Il a raison, M. Marceau. N’empêche que tous les indicateurs pointent vers une année, voire quelques années très difficiles.
Chaque automne, les ministres du gouvernement du Québec sont appelés à lever le pied de l’accélérateur de dépenses pour atteindre les objectifs financiers fixés par le budget. Si l’on se fie aux données partielles publiées en juin, l’année en cours ne fera pas exception. À moins, bien sûr, que le gouvernement Marois choisisse d’abandonner l’objectif d’équilibrer les livres, ce qui serait étonnant compte tenu des enjeux politiques et du fait que l’actuel gouvernement n’est pas encore parvenu à asseoir sa crédibilité en matière économique.
Avec une croissance anticipée d’à peine 1,3 % et un taux de chômage à la hausse, les recettes du gouvernement ne sont pas au rendez-vous, et ce, tant pour les derniers mois de l’exercice terminé en avril dernier que pour celui qui a cours depuis.
Cela fait dire aux deux partis d’opposition que le ministre Marceau a raté sa cible par une marge de 275 millions l’an dernier et qu’il serait en voie d’enfreindre la Loi sur l’équilibre budgétaire qui l’oblige à effacer tout déficit dès la fin du présent exercice. Et comme cette loi précise qu’il faut ajouter tout dépassement de dépenses de l’année passée au manque à gagner de l’année en cours, le gouffre à combler d’ici mars prochain pourrait atteindre un milliard selon l’opposition libérale.
Par ailleurs, la même loi force aussi le gouvernement à inscrire chaque année, à titre de dépense, l’argent déposé au Fonds des générations pour réduire la dette. Cette année, ce n’est rien de moins qu’un milliard de revenus qui ira gonfler le fonds dans le but de ramener le ratio de la dette au PIB de 55 % à 45 % d’ici 2026. Pour un gouvernement minoritaire, inutile de songer à modifier cet objectif avec l’idée d’utiliser cet argent à d’autres fins, telle l’atteinte du déficit zéro par exemple !
La prochaine mise à jour n’étant publiée qu’en novembre, les chiffres qui circulent ne sont que des extrapolations et ne tiennent pas compte d’une provision de 200 millions, mais ils laissent quand même entrevoir la nécessité d’une nouvelle ronde de compressions pour les prochains mois. La question est de savoir de quelle ampleur ?
S’il s’agit de trouver trois cents millions sur un budget de 72 milliards, l’exercice est réaliste. Mais s’il est question d’un milliard, il faudra songer à une autre approche qu’à l’habitude, puisqu’à partir d’une certaine intensité dans la réduction des dépenses, l’austérité tire l’activité économique et les recettes du gouvernement vers le bas dans un cercle des plus vicieux.
Cette autre approche exigerait certainement une augmentation des impôts et des tarifs, ou l’abolition de programmes. Car même en revoyant la Loi sur l’équilibre budgétaire pour autoriser les déficits plus longtemps, les données démographiques et les faibles prévisions de croissance laissent peu d’espoir de rétablissement à moyen terme pour le Québec.
Le jugement semble pessimiste, mais mieux vaut y réfléchir maintenant que d’attendre de frapper le mur dans trois ans.
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