UNE POLITIQUE « CANADIAN » SOURNOISE

En parallèle à notre héritage de la modernité libérale

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L'esprit colonialiste demeure, plus fort que jamais

« Le Canada du dernier siècle a résolument opté pour une conception libérale de la modernité, comme l’attestent la Loi constitutionnelle de 1982 et son gouvernement des juges. Le Canada multiculturel d’aujourd’hui a définitivement tourné le dos à l’une des traditions les plus sacrées de la culture politique britannique : la souveraineté du Parlement. Ce Canada-là, qui a pris le parti de renier son passé, malgré la renaissance de la symbolique monarchiste, n’a plus rien à voir avec celui de 1867. »
Plus rien à voir, vraiment ?
Que le Canada d’aujourd’hui ait renié le passé de cette souveraineté parlementaire dont la structure politique a couronné la Confédération canadienne en 1867, est une chose. C’en est une autre concernant sa tradition colonialiste qui, elle, est toujours présente, bien qu’elle fut aussi un produit de la culture politique britannique ! D’ailleurs la symbolique monarchiste que le gouvernement Harper se targue d’honorer de façon ostentatoire et paradoxale comme un renouvellement du nationalisme canadien, se rattache historiquement et beaucoup plus justement à cette autre dimension de la culture britannique imprégnée d’impérialisme qui a triomphé en Angleterre jusqu’à la Première guerre mondiale.
Cette culture politique s’était en effet incarnée entièrement dans l’administration de sa colonie d’Amérique du Nord située dans la Province de Québec dès 1763 concernant le sort fait au peuple canadien conquis. Seul un rapport de force provoqué par la menace qu’il se joigne aux insurgés victorieux de la Guerre d’indépendance américaine, donnera l’apparence avec le Quebec Act constitutionnel de 1791 de contrer le colonialisme inhérent à cette culture impérialiste par la création d’un Bas-Canada territorial et de son Parlement réservé à la Province de Québec majoritairement francophone.
L’apparence seulement hélas et pas davantage, car la députation majoritaire de langue française n’y aura aucun pouvoir réel dans la mesure où la Conquête elle-même l’asservissait aux autorités anglaises qui la chapeautait. C’est du reste ce qui mènera aux troubles de 1837 et à leur prétendue solution par le processus d’unification des quatre colonies présentes que fut fondamentalement la Confédération canadienne trente ans plus tard.
Cent cinquante ans s’écouleront conséquemment dans l’illusion béate entretenue par les élites fédéralistes d’un Canada uni par l’égalité politique de ses deux peuples d’origine. La réalité, plus brutale, c’est que la Province de Québec d’abord mise en minorité comme francophone dans son rapport avec trois provinces anglophones, le sera graduellement encore plus dans une structure fédérale décisionnelle qui en comptera bientôt dix par son contrôle de l’immigration. Réalité vécue que viendra couronner impérialement en 1982 – et démasquer de ce fait le discours illusoire – un rapatriement unilatéral de la constitution canadienne qui excluait la province francophone. L’acceptation unanime par les autres provinces de cet situation antidémocratique de façon aussi flagrante, fut à n’en pas douter une démonstration évidente de l’insidieuse et perfide structure évolutive du Canada dans son colonialisme traditionnel foncier.
La loi constitutionnelle rapatriée et demeurée intacte se trouvera à entériner la volonté indéfectible d’assimilation des minorités canadiennes-françaises qui s’était poursuivie effectivement sans relâche depuis la Confédération à l’échelle du pays. Même la nation québécoise, francophone à 90%, en manifestait les symptômes apparemment irréversibles de la soumission et cela jusque dans sa langue abâtardie et toujours prête à s’effacer devant celle des maîtres anglais, avant sa Révolution tranquille des années ’60.
Il faut dire que chez les peuples colonisés l’insoumission a toujours servi de justification aux exactions du pouvoir dominant. La seule volonté d’autonomie, jugée immorale et dangereuse, évoque aussitôt chez lui le spectre de la révolte et de la subversion ; elle légitime de ce fait sinon la répression immédiate, du moins une politique de ruse afin d’extirper ce vice chez les insoumis. Le remède aux velléités d’indépendance du Québec naissant sera donc, dans cette conjoncture colonialiste, le stratagème de l’ajout à la constitution rapatriée d’une charte des droits individuels mortifère pour les droits collectifs qui officiellement avaient été concédés à l’État québécois par le Confédération de 1867.
De cette idée machiavélique fondée sur la phobie du nationalisme québécois du premier ministre canadien P. E. Trudeau surgira une nouvelle doctrine de l’État. Les « gouvernements des juges » successifs de ce Canada multiculturel et de sa Cour suprême, dès lors, n’auront de cesse de bafouer les droits linguistiques québécois qui avaient été renforcés par la loi 101 de 1976. S’ensuivra, en effet, une prolifération de jugements au « cas par cas » prétendant à l’universalité des Droits de l’homme sacralisés par nos chartes, mais s’ouvrant concrètement sur un communautarisme multiculturel d’auto-exclusion sociale des minorités qui naturellement ont tendance à s’enfermer dans des ghettos.
Pourtant – et c’est ce qui importe en l’occurrence – cet empêchement réel à l’intégration des immigrants engendré par ce "gouvernement" de la Cour suprême, déjà méprisant à leur égard, l’est encore davantage pour la nation québécoise qui tente à sa manière aujourd’hui d’en faire des citoyens à part entière. Pour tout dire il est néfaste pour l’unité de sa communauté politique dans le respect de ses propres règles démocratiques du vivre-ensemble. Or c’est précisément la destruction de cette souveraineté encore si fragile qui est la raison d’être même du colonialisme toujours à l’œuvre chez les élites canadiennes.


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