Terminus provincial ou envol vers le pays du Québec

Un choix s’impose

Le happening indépendantiste du 20 octobre pourrait être leur entrée sur la scène politique.

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Vers la République québécoise

(Texte publié dans Le Devoir du 30 mai 2007)
Claude Bariteau, Stéphane Harrisson, Jacques Lamothe,
Pierre Pilon, Jean-Pierre Roy, Marcel Lefebvre, membres du CA du Rassemblement pour l’indépendance du Québec (RIQ).
L’actuel mouvement indépendantiste, qui a plus de quarante ans, a été marqué par deux décisions importantes. La première est la création du Parti Québécois (PQ) en 1968 par les membres du Mouvement souveraineté association (MSA) et ceux du Ralliement national, parti auquel se sont greffés des membres du Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN).
La deuxième est le virage péquiste de 1974 en faveur d’une démarche étapiste consistant à présenter un programme provincial réformiste suivi d’un référendum en fin de mandat portant sur la souveraineté du Québec. Avec ce virage, l’élection à majorité simple dite référendaire, inscrite aux programmes du RIN et du PQ jusqu’en 1974, est mise de côté.
Ce virage réalisé, les souverainistes qui s’activent dans la foulée de Lévesque prennent le contrôle. Ils neutralisent les indépendantistes en provenance du RIN, dont plusieurs se rallient pour des raisons liées aux réformes envisagées, et obligent les indépendantistes issus du RN à se ranger.
Élu en 1976, le gouvernement du PQ définit une démarche pour la tenue d’un référendum. Il néglige cependant l’essentiel, qui consiste en une entente préalable sur les règles à suivre avec les autorités canadiennes. Or, sans une telle entente, tout peuple qui veut s’affranchir par référendum est vulnérable.
À deux occasions, ce fut le cas sans que le peuple québécois se soit prononcé sur l’indépendance. En 1980, il est question de négocier une souveraineté-association, qui est un réaménagement du Canada, que le peuple québécois doit ratifier. En 1995, le mandat recherché est un partenariat avec le Canada dont l’entente sera ratifiée par les parlementaires, à défaut de laquelle ces derniers peuvent unilatéralement créer l’État indépendant du Québec.
De cela, il ressort que le mouvement indépendantiste a été endigué au sein du PQ à la faveur d’objectifs autres, une association ou un partenariat, et que ce parti a recherché l’appui des indépendantistes pour prendre le pouvoir provincial et faire des réformes.
C’est à cause de ça que les chefs de ce parti sont aux prises avec des déchirements périodiques. Ils sont sanglants lorsque le parti prend un virage provincialiste. Ce fut le cas avec le « beau risque ». Ce pourrait être le cas avec un appui à l’autonomisme de l’Action démocratique du Québec (ADQ). La plupart du temps, ils produisent surtout des ecchymoses si les indépendantistes s’affirment trop ou si les souverainistes rapetissent leurs attentes.
Entrent alors en scène les maîtres de l’application des baumes pour assurer la survie du parti. Ces derniers jours, nous avons assisté à leur traitement. Comme avant, ils ont engourdi le mal.
Depuis, Madame Marois, qui sera à la tête du PQ, est entrée en scène. Elle a dit que vouloir renier deux piliers, la souveraineté et la social-démocratie, serait, pour ce parti, perdre sa raison d’être. Elle a aussi avancé que refuser d’avance de gouverner la province serait une recette assurée pour sa marginalisation, ce qui est suicidaire. Aussi, proposa-t-elle de mettre de côté l’échéancier référendaire, idée qui, si elle est élue, sera le choix du PQ.
Ces vingt dernières années, la gouvernance provinciale du PQ ou du PLQ n’a produit que des modulations dans la « couleur » des politiques sociales et économiques à cause de la petite marge de manœuvre du Québec. Un éventuel gouvernement adéquiste fera de même. Bien sûr, pour chaque parti, cette gouvernance laisse de l’espace pour faire de « l’éducation populaire » quant à l’avenir du Québec.
Or, dans sa plateforme, Madame Marois va plus loin. Si elle entend éduquer, elle entend procéder à réaliser l’Indépendance seulement lorsque le « peuple » lui aura dit que le moment est propice, ce que les autres partis pourront aussi décoder. En d’autres termes, sous madame Marois, le PQ, qui attendra que la souveraineté lui tombe du ciel, s’adonnera à la gouvernance provinciale, dont Louis Bernard dit qu’il faille s’abstenir, et voudra imprégner les politiques provinciales d’une couleur social-démocrate retouchée.
Ce faisant, le PQ rend orphelins de parti les indépendantistes qui prônent d’abord l’indépendance. C’est une bonne nouvelle. Comme le PQ attend dorénavant du peuple le signal pour enclencher un processus menant à la souveraineté, il revient aux indépendantistes de prendre les choses en mains.
***
Voilà pourquoi le RIQ les convie à un grand happening (réunion libre et participative) qui se tiendra le 20 octobre à Montréal en vue de faire le point sur le pourquoi de l’indépendance du Québec et la manière de la faire.
À ce happening indépendantiste, rien ne sera exclu, surtout pas la création d’un parti foncièrement indépendantiste et démocrate. Un parti qui n’est ni de droite, ni de gauche, ni du centre, ni social-démocrate. Mais un parti qui fera la promotion du pays et d’un pacte pour procéder lors des prochaines élections.
Le RIQ a déjà fait connaître ses idées pour que le peuple québécois se prenne en main. La première est que l’indépendance devienne l’objectif recherché par la nation politique québécoise, dont la langue commune est le français.
La seconde affirme que cet objectif s’atteindra démocratiquement, ce qui implique le rejet des armes et l’exigence d’un soutien majoritaire pour procéder, soit plus de 50 % des votes exprimés. Il serait anti-démocratique, même en régime parlementaire britannique, de transformer une province en un État souverain sans l’aval d’une majorité de citoyens.
Pour créer démocratiquement un nouveau pays, il y a deux voies reconnues : l’élection et le référendum. Un référendum est opportun s’il y a entente sur la procédure, le pourcentage et les négociations entre les représentants du peuple qui aspire à l’indépendance et ceux de l’autorité établie, ici le Canada. Une telle entente n’existe pas et la loi C-20 sur la clarté n’a pas cette qualité.
Avec elle, [comme l’a montré Jean-François Lisée->3706], la Chambre des communes peut statuer unilatéralement sur la recevabilité de la question et le pourcentage obtenu, décréter les règles de la négociation et attendre l’autorisation du deux tiers des provinces représentant plus de 50 % de la population du Canada pour que le Québec s’en retire. Cette loi octroie donc « à la nation voisine un droit de veto sur l’avenir du Québec ».
Pour le RIQ, à cause du piège qu’est devenu un référendum et des conséquences d’un troisième échec, la voie électorale est incontournable. C’est la troisième idée.
Un parti politique peut y recourir en faisant de l’indépendance la priorité de sa plateforme électorale. Pour faire le pays, cela nécessite simplement une double majorité : plus de 50% des votes en faveur de candidats indépendantistes et l’élection de plus de 50% d’indépendantistes. À défaut de plus de 50% des votes exprimés, un parti indépendantiste ayant une majorité de députés devrait se limiter à l’exercice du pouvoir législatif.
Au Québec, il y a deux partis souverainistes, un parti autonomiste et plusieurs groupes indépendantistes. Recourir à la voie électorale nécessite un pacte entre eux. À l’initiative du RIQ, Les Porteurs du pays, un groupe d’indépendantistes, en ont défini les contours essentiels : faire de l’indépendance l’enjeu prioritaire des élections, s’entendre sur la stratégie électorale et procéder si les candidates et les candidats du pacte obtiennent la double majorité. C’est la quatrième idée.
L’argumentaire se retrouve sur [www.riqblogue.org/pacte/->www.riqblogue.org/pacte/].
Avec ces idées, les indépendantistes ont tout en mains pour passer à l’action. Le happening indépendantiste du 20 octobre pourrait être leur entrée sur la scène politique.


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    2 juin 2007

    Je ne m'attends pas a grand chose de Pauline Marois. Je demeure ouvert a ses suggestions, mais je n'ai pas l'impression qu'elle proposera un plan susceptible de mettre la question nationale a l'agenda ou encore de faire avancer le Quebec dans le cadre federatif.
    Je constate que Le PQ est un vehicule qui a ete detourne par des groupes d'interets dont l'independance n'est pas la priorite. En gros, on se sert de l'appui des independantistes pour mettre en oeuvre des politiques provinciales de centre-gauche. Etant plutot de centre-droit, comme plusieurs, je me desolidarise, lorsque la souverainete est releguee a l'arriere-plan. Comme independantiste de centre-droit, j'en viens a me dire qu'il est plus conforme a mes idees d'appuyer les clowns de l'ADQ que les pseudos-independantistes sociaux democrates du PQ. Cela est grave. Le Parti Quebecois ne changera pas, du moins j'en doute fort. Il est bati sur des mauvaises premisses, sur le mythe de Rene Levesque et la revolution tranquille. Il faut revenir a Bourgault et d'Allemagne, aux pendus de 1837-38. Le PQ est incapable de penser l'independance, trop occupe qu'il est a discuter perequation, "solidarite sociale" et sante.
    Pour ma part, je pense qu'il est grand temps de creer ce parti politique independantiste qui n'est ni de gauche ni de droite, et qui ferait a temps plein la promotion de l'independance. Pourquoi par le R.I.Q.? Avec un nom pareil, ses chefs ne pourraient plus faire semblant que la mission du parti est de faire la promotion du syndicalisme, de l'egalite des chances, de l'environnement, ou de je ne sais quelle autre priorite du jour! L'independance n'est-elle pas un projet suffisamment ambitieux en soi pour qu'un programme complet de parti politique traitant exclusivement de cette question soit elabore et defendu en campagne electorale?
    Faire a temps plein la promotion de l'independance, cela veut dire revenir a l'essentiel. Traiter de chaque question d'actualite sous un angle independantiste. Aborder les questions liees a la transition, l'integrite territoriale, la monnaie, le libre-echange, l'armee, les competences federales. Presenter le projet comme un defi, un projet de prise en main et de responsabilite, et non le banaliser comme le font trop souvent les pequistes, lorsqu'ils tentent de faire avaler au gens qu'ils n'y aura pas de turbulences au lendemain d'un OUI. Creer des ecoles d'ete internationales independantistes en collaboration avec d'autres mouvements independantistes a l'etranger. Creer des bourses pour que de jeunes independantistes puissent poursuivre des projets d'etudes ou de formation. Il faut batir une elite independantiste. Creer et financer des medias independantistes. Le matraquage ideologique semble fonctionner pour les federalistes. Pourquoi pas pour nous?
    Le temps sera venu a l'automne, sauf revirement inattendu de Pauline Marois, de partir a neuf. Cela suppose de commencer en bas de l'echelle, de faire elire un ou deux deputes dans des regions souverainistes, de commencer avec des moyens limites.
    Je sens qu'on se dirige vers une autre occasion manquee. Que fera Mme Marois si Mario Demont se frappe a un refus d'Ottawa? Je doute qu'elle ait l'etoffe pour saisir la balle au bond.

  • Archives de Vigile Répondre

    30 mai 2007

    Vous dites: au Québec, il y a deux partis souverainistes.
    Vous parlez sans doute de QS et du PQ.
    QS est souverainiste à gros grains. On ne sait pas grand chose de sa vision d'un Québec souverain.
    Quant au PQ, vous semblez croire que ce Parti est souverainiste alors qu'il est depuis toujours (sauf sous Parizeau) un parti «confédéraliste». Références: Landry, Bouchard, Marois, Boiclair). Le PQ a même été dirigé par un chef autonomiste (Pierre-Marc Johnson). J'ai fait, sur ce site, la démonstration claire et nette, que le Parti québécois n'est pas indépendantiste. Alors, pourquoi affirmer qu'il l'est?
    On parle de fonder un véritable parti indépendantiste. C'est quoi un «véritable»...?Est-ce à dire qu'il y a des partis indépendantistes qui ne sont pas de «véritables» partis indépendantistes? Ça ressemble aux gens qui disent qu'ils sont catholiques, mais non pratiquant...
    Enfin....il reste à ouvrir les dictionnaires si on veut cesser de cultiver le ridicule.
    Nestor Turcotte
    Matane

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mai 2007

    Ou de simplement respecter ce qui a été proposé par M. Parizeau et M. Laplante, appelé la proposition Parizeau-Laplante.
    Je ne comprends toujours pas pourquoi des indépendantistes se bornent à ne pas vouloir voir la justesse de cette proposition.
    50% lors d'une élection, et puis quoi encore...

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mai 2007

    À défaut de récolter 50% des voix, ces élus indépendantistes se consacreraient à la gouverne provinciale.
    Je ne suis pas certaine qu'il s'agit ici d'un progrès.
    Je pense qu'ils devraient démissionner, un point c'est tout.