On voudrait bien parler d'autre chose, mais le Québec tout entier est sous le coup d'une véritable éclipse politique depuis presque deux ans.
Les allégations de corruption, de collusion, de détournement de fonds publics et de financement illégal de partis politiques s'accumulent. Résultat: la colère monte aussi vite dans la population que le nombre de signatures sur la pétition mise en ligne sur le site de l'Assemblée nationale exigeant la démission du premier ministre.
Les langues se déliant, deux anciens candidats libéraux et un péquiste racontent même avoir déjà reçu des enveloppes bourrées d'argent comptant alors qu'ils faisaient campagne.
Quant aux "Fabulous Fourteen", ces grosses entreprises de construction occupées à se partager entre elles le gâteau des contrats publics, Le Devoir y ajoute l'influence de firmes de génie-conseil baptisées le "Club des neuf", mais précise qu'"un seul gros joueur de la construction orchestrerait le partage des contrats aux ministères des Transports et des Affaires municipales"! Et ce, pendant que le gouvernement s'apprête à dépenser 42 milliards de dollars en infrastructures.
La numérologie de la corruption serait donc celle-ci: 42, 14, 9 et 1!
Alors, on appelle l'Opération Marteau ou Madame Minou?
L'autoflagellation collective
L'effet d'usure sur la population est devenu tel qu'elle en verse même dans l'autoflagellation collective.
Selon un sondage commandé par La Presse, 75 % des Québécois croient que leur "province" est "corrompue".
On entend aussi dire que le Maclean's aurait même été en deçà de la réalité lorsqu'il a traité le Québec de "province la plus corrompue du Canada"! Et ce, même si son chroniqueur allait jusqu'à avancer faussement que le problème serait non pas politique, mais historique, sociologique, culturel, voire atavique!
Or, dans les faits, cette crise soudaine d'autoflagellation, loin d'épouser les préjugés primaires du Maclean's, semble surtout être la manifestation d'une colère sourde à laquelle le gouvernement devrait porter plus attention...
Quant à Pauline Marois, c'est plutôt un congrès majeur de son parti et un vote de confiance crucial qui l'attendent en avril prochain.
Un autre obstacle se dresse aussi sur son chemin: François Legault. L'ex-ministre péquiste continue de plancher sur un mouvement ou un groupe de réflexion dit de "centre droit" et dont un des objectifs serait de mettre de côté l'option souverainiste.
Or, cette semaine, son cofondateur attendu, Joseph Facal, un autre ex-ministre péquiste, lui faisait faux bond. Craignant la division du vote francophone - pourtant une évidence dès la genèse de cette idée -, il s'en retourne dans ses terres des HEC. Du moins, pour le moment...
Bref, plus le temps passe, plus ce "mouvement" Legault, après avoir donné de grosses sueurs froides au PQ, commence à ressembler drôlement à un délit de fuite politique...
L'arme nucléaire?
Il reste que si le PQ remporte la prochaine élection, il arrivera au pouvoir avec une arme puissante dans sa besace: l'engagement de tenir la fameuse commission d'enquête à laquelle Jean Charest se refuse.
Nul besoin de refaire la nomenclature des allégations qui se multiplient pour mesurer le niveau élevé de risque qu'une telle commission ferait courir aux libéraux. Même un ancien président du PLQ, Robert Benoît, déclare que ce parti est devenu "une machine à ramasser de l'argent".
Bien sûr, le PLQ demeure traumatisé par la commission Gomery. Créée à l'époque par Paul Martin lui-même, le fait est que le Parti libéral du Canada n'en est toujours pas remis. Alors, imaginez à quel point cela aurait été encore pire pour le PLC si Paul Martin n'avait rien fait et que Stephen Harper, une fois au pouvoir, l'avait mise sur pied à sa place!
C'est pourtant le danger auquel Jean Charest expose son parti maintenant en refusant de tenir la commission d'enquête que le PQ s'engage à la créer lui-même s'il prend le pouvoir.
De fait, pour les péquistes, c'est l'équivalent politique de l'arme nucléaire, laquelle risquerait en effet de faire beaucoup de dommages au PLQ et pour très longtemps.
Pendant ce temps, pour M. Charest et son parti, le temps court. Se dirigeant vers une réélection en voie de devenir aussi probable qu'une conversion de Maxime Bernier au socialisme, à force d'inaction, les libéraux se retrouvent maintenant devant un choix impossible.
Ou M. Charest tente, tout au moins, de gérer son propre risque en mettant sur pied cette commission réclamée par 80 % des Québécois.
Ou il continue de croire que le dommage sera moins pire s'il n'en tient pas une. (Il est fort probable qu'il continue à s'entêter de la sorte.)
Son gros problème, par contre, est que cela ne tient pas compte de l'impact dévastateur que pourrait avoir une commission créée éventuellement par un gouvernement péquiste.
Surtout qu'entre-temps, dès que la "police" sur laquelle M. Charest compte tant mettra le grappin sur un ou deux ripoux, pour les Québécois, ce ne serait qu'une raison de plus pour exiger une vraie commission d'enquête.
Pas tout à fait sorti de l'auberge, le Parti libéral...
N'empêche que bien des Québécois doivent se lever la nuit pour rêver d'un premier ministre capable de placer leurs intérêts loin au-dessus de ceux d'un simple parti politique.
Un choix impossible
Pas tout à fait sorti de l'auberge, le Parti libéral...
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