Le nombre croissant de Québécois qui parlent de Montréal comme d’« une autre planète » inquiète grandement Régis Labeaume. De crainte que « ça retrousse un jour », le maire de Québec appelle à une action musclée pour protéger le français dans la métropole.
« Vous savez, dans les années 60 et 70, quand la langue française a été bafouée, il y a eu une réaction à ça. Si on n’est pas bienveillants avec notre langue, ça va retrousser un jour. Il va y avoir une réaction. Le fossé entre Montréal et le reste du Québec s’élargit de jour en jour », prévient le maire de Québec.
Il ne met pas la faute sur la mairesse de Montréal, Valérie Plante, mais sur la place plus grande de l’anglais sur la place publique. « La population devient de plus en plus métissée à Québec aussi. Mais au moins, on parle français, ici. Peut-être que pour beaucoup de monde des régions, Montréal est une autre planète. Ce n’est pas la faute de personne, mais c’est ça. »
Régis Labeaume en appelle ainsi à une grande discussion collective sur le sujet afin que « le clivage » cesse de s’accentuer et que le français reprenne ses lettres de noblesse.
C’est statistique : les francophones ne feront éventuellement plus la différence dans l’élection d’un gouvernement. On s’enligne tranquillement là-dessus. Et quand ça va arriver, je pense que ça va râler quelque part. Alors, je dis toujours, va falloir qu’on se comprenne.
Régis Labeaume, maire de Québec
En visite à Montréal cette semaine, le « doyen des maires, mais peut-être pas le plus sage » ne cache donc pas son inquiétude, quelques jours après la publication par l’Office québécois de la langue française de son Enquête sur les exigences linguistiques auprès des entreprises, des municipalités et des arrondissements de Montréal, qui a « choqué » le ministre responsable de la langue française, Simon Jolin-Barrette.
« À Québec, nous sommes très pointilleux sur le français », indique le maire Labeaume.
Tisser des liens avec les communautés culturelles
Cela dit, même s’il conçoit qu’il ne vit pas les mêmes problématiques que celles que vit Montréal ou que vivent toutes les autres « métropoles américaines », il sait qu’il doit ouvrir grandes les portes de sa ville aux communautés culturelles.
Il s’agit d’ailleurs d’un des grands dossiers sur lesquels il veut se pencher dans les prochains mois, pour tenter de tisser davantage de liens avec les membres issus des communautés culturelles. « On va commencer avec la communauté noire », précise-t-il, ajoutant qu’il a déjà ouvert le dialogue avec la communauté musulmane. Il souhaite nommer au sein de la Ville une personne qui travaillera dans ce sens : « Je discute avec une personne noire qui vit aux États-Unis et qui a une maison à Québec. »
Son but est que cette discussion se fasse dans « l’harmonie » et le « plaisir », par exemple en rendant hommage aux joueurs issus de la diversité de l’équipe de football du Rouge et Or de l’Université Laval.
« Je veux qu’on célèbre le succès de jeunes Noirs de Québec dans les domaines culturel, sportif et social. Je veux qu’on s’y prenne par le plaisir », explique M. Labeaume.
En ce qui concerne le profilage racial, le maire de Québec évite de dire s’il y en a dans sa ville.
Le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ), qui ne compte aucun policier noir, a aussi entrepris cet été des démarches pour encourager des citoyens issus des communautés culturelles à embrasser le métier de policier.
« Le chef du SPVQ, Robert Pigeon, fait tout pour former et embaucher des personnes des communautés culturelles. Les policiers font même le tour des terrains de basket pour inviter [les joueurs] à devenir policiers, dit avec enthousiasme le maire de Québec. On est rendus là, nous autres ! Et je vais mettre plus de temps moi-même pour relever ce défi. »