Denis Lessard La Presse (Québec) La pression devient intenable pour Pauline Marois. Terrorisés par les sondages qui prédisent la disparition du Parti québécois (PQ) aux prochaines élections, plusieurs députés péquistes souhaitent désormais que leur chef mal-aimée jette volontairement l'éponge et passe le relais à un successeur plus populaire.
Se disant «fatiguée», Pauline Marois a quitté le comité exécutif du PQ, vendredi soir dernier, bien avant la conclusion de la réunion. Le directeur général du parti, Sylvain Tanguay, un des hommes de confiance de la chef, a proposé que le parti injecte 200 000 $ dans une campagne de publicité destinée essentiellement à mousser la personnalité de Mme Marois dans l'opinion publique. La proposition n'a pas passé la rampe, et on l'a remise à plus tard. Mme Marois est partie avant la fin, mais il était tout de même près de minuit, a-t-on nuancé hier dans l'entourage de la chef de l'opposition.
Le malaise, déjà tangible, semble s'être cristallisé dans les dernières heures, avec le retour des députés de leurs circonscriptions. Le sondage publié samedi par La Presse montre qu'en dépit des déboires du gouvernement Charest, les libéraux restent en avance sur le PQ. Ces résultats risquent bien d'avoir scellé le sort de Pauline Marois. Selon l'enquête, seule une personne sur dix voit en elle une future première ministre. Chez les élus, plusieurs pensent maintenant que la question doit être réglée avant le conseil national du parti, début décembre. D'autres visent la fin de la session parlementaire, une semaine plus tard. Réaction prévisible, tous ceux que La Presse a joints hier ont dit qu'ils n'avaient pas de déclaration publique à faire. On insiste surtout pour dire qu'il n'y a pas de fronde, de «mouvement concerté» parmi les élus.
Au caucus, les appuis «indéfectibles» de Mme Marois se comptent désormais sur les doigts; les officiers parlementaires, d'abord, le leader Stéphane Bédard, son adjoint Bertrand St-Arnaud et la whip Nicole Léger. Les députées Agnès Maltais, Lorraine Richard, Marie Malavoy et Danielle Doyer complètent le tableau des disciples fidèles.
En caucus cet après-midi
Les députés se retrouvent en caucus cet après-midi. La semaine dernière, leurs échanges ont été plutôt musclés. On sait que Stéphane Bergeron, député de Verchères, a froissé plusieurs collègues en se rendant à une activité de Québec solidaire au moment même où les députés péquistes étaient réunis.
Bergeron a été sommé de retourner à l'Assemblée nationale. Pour justifier son étonnante absence, il a «longuement plaidé» pour un rapprochement avec les autres formations politiques, dont Québec solidaire (QS). Son collègue Nicolas Girard, député de Gouin, était furieux qu'un péquiste veuille faire la paix avec Françoise David (qui sera candidate de QS dans sa circonscription). «Christ, tu aurais pu nous prévenir!», a lancé un autre député à Bergeron. Pauline Marois est entrée dans l'arène pour calmer le jeu, et l'imposant député de Verchères lui a lancé sans appel: «Laissez-moi parler! Il y a des choses qu'il y a longtemps que je veux dire... j'en aurai pas pour longtemps.»
Mme Marois n'a plus autant d'ascendant sur les troupes. Au dernier conseil général, quand elle a rappelé aux militants qu'elle ne les avait «pas lâchés», Mme Marois a aussi lancé: «Des fois, je me demande pourquoi je fais tout ça.» Le vétéran François Gendron a lancé clairement: «Nous aussi!»
À La Presse, plusieurs élus péquistes d'expérience ont confié qu'ils espéraient que la chef annonce d'elle-même qu'elle comptait jeter l'éponge, pour éviter que l'opération ait encore une fois l'air d'un putsch à la direction du parti. «C'est une bonne personne, elle ferait probablement une bonne première ministre, mais elle ne passe pas, c'est tout», résume un député sous le couvert de l'anonymat.
«On n'est pas sourds ni aveugles. On voit bien qu'il y a quelque chose qui ne marche pas...», lance un député. «S'il y a des élections, on est morts», résume un autre. Dans les circonscriptions, la perspective d'une disparition du PQ tétanise carrément les organisateurs. Claude Pinard avait cru plausibles des élections au printemps; il a fait une série de coups de fil à ses «poteaux» dans Saint-Maurice, aucun d'eux ne s'est dit prêt à organiser sa prochaine campagne.
Même chez ses partisans de la première heure, Mme Marois n'a plus la cote. Bernard Drainville, notamment, reste bien discret, comme en réserve, mais ses collègues sont convaincus qu'il soupèse ses chances dans une éventuelle course à la direction. Parmi les démissionnaires de juin, Pierre Curzi a déjà dit qu'il comptait retourner au PQ, et même qu'il tenterait sa chance dans une course à la direction si Mme Marois partait. Louise Beaudoin avoue qu'elle ne sait pas ce qu'elle ferait dans l'éventualité d'un départ. «J'ai dit que cela prendrait un gros changement pour revenir... ce serait un gros changement», dit de son côté Lisette Lapointe, de Crémazie.
L'ancien chef bloquiste Gilles Duceppe attend son heure. Ses proches savent qu'il a digéré sa cuisante défaite de mai dernier, et qu'il souhaite revenir comme chef du Parti québécois. Après son humiliante tentative de succéder à André Boisclair en 2007, il ne veut pas avoir l'air de poignarder la chef. Officiellement, «il fait du vélo», et si les choses traînent, «il fera du ski de fond», ironise un de ses hommes de main. Ses lieutenants du Bloc ne passent pas de coups de fil aux organisateurs du PQ.
Des députés espèrent la démission de Marois
Mme Marois n’a plus autant d’ascendant sur les troupes. Au dernier conseil général, quand elle a rappelé aux militants qu’elle ne les avait « pas lâchés », Mme Marois a aussi lancé : « Des fois, je me demande pourquoi je fais tout ça. » Le vétéran François Gendron a lancé clairement : « Nous aussi ! »
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