Au cours de son seul discours officiel prononcé devant les délégués des pays participants à la 12e conférence sur les changements climatiques qui se tient à Nairobi, la ministre canadienne de l'Environnement, Rona Ambrose, a trouvé le moyen de sombrer dans la partisanerie politique. Décidément, voilà une ministre et un gouvernement qui ne veulent rien entendre, sinon la voix de leurs propres obsessions.
Après une semaine de conférence entre hauts fonctionnaires des pays participants à la conférence de Nairobi, c'était au tour des politiciens d'entrer en scène, hier, pour entreprendre les négociations sur les suites à donner au protocole de Kyoto. Parlant au nom du Canada, la ministre Rona Ambrose s'est contentée de répéter que son gouvernement adhérait aux objectifs du protocole, mais qu'il était impossible d'atteindre les cibles irréalistes de réduction de gaz à effet de serre (GES) dans les délais prescrits. Pas plus qu'à l'habitude, elle n'a précisé pourquoi cela était impossible, choisissant de blâmer les libéraux pour leur inaction passée. De la pure partisanerie étalée devant ce parterre mondial!
À aucun moment pendant sa courte allocution, Mme Ambrose n'a fait allusion au fait qu'une majorité de Canadiens sont favorables aux cibles du protocole de Kyoto et s'opposent au plan conservateur qui reporte à 2050 l'échéance d'une réduction significative des émissions de GES.
En début de journée, le Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, avait plaidé pour une intensification des efforts dans la lutte contre le réchauffement de la planète. Faisant allusion aux pays qui refusent toujours de s'engager, il a dénoncé leur «effrayante absence de volonté politique». Il pensait d'abord aux États-Unis et à l'Australie qui n'ont pas adhéré au protocole, mais aussi à certains pays en développement comme la Chine et l'Inde, dont la croissance rapide menace d'aggraver la situation. En réponse à des journalistes canadiens qui lui demandaient de commenter les positions de leur gouvernement, M. Annan a diplomatiquement dit souhaiter que le Canada assume un leadership dans le monde étant donné que cette question est importante dans l'esprit des Canadiens.
Or, loin de corriger le tir devant l'opposition grandissante à la politique réactionnaire de son gouvernement en matière de lutte contre les GES, Mme Ambrose vient de confirmer devant ses homologues du monde entier que les conservateurs canadiens ne feront à peu près rien d'ici l'échéance de 2012. La ministre en a même profité pour accuser ses opposants d'utiliser le dossier du réchauffement de la planète pour diviser le pays. Tiens donc!
Eh bien, non! Mme Ambrose, ce ne sont pas les gens de l'opposition, pas plus que le gouvernement du Québec ou les environnementalistes qui divisent le pays: c'est vous et votre gouvernement qui, en reniant de facto la signature du Canada au bas du protocole de Kyoto, faites honte aux Canadiens et aux Québécois.
À l'heure actuelle, le Canada fait partie du groupe de pays développés dont les émissions de GES sont les plus élevées de la planète et qui ne font cependant aucun effort pour se conformer à leurs propres engagements. Avec 731 mégatonnes de CO2 émises en 2002, le Canada se classait parmi les plus grands émetteurs du monde, certes loin derrière les États-Unis (6 934 mégatonnes), mais devant la Grande-Bretagne (634 mégatonnes), l'Italie ou la France (554 mégatonnes chacun), qui comptent pourtant environ deux fois plus d'habitants que le Canada. Une situation qui n'a certainement pas cessé de se détériorer depuis 2002.
Alors que le Canada s'est engagé à réduire ses émissions pour atteindre un niveau de 6 % inférieur à celui de 1990 d'ici 2012, elles sont aujourd'hui de 27 % plus élevées qu'il y a 16 ans. C'est la pire performance des 36 pays signataires du protocole! Pendant cette même période, le Royaume-Uni a réduit ses émissions de 14 % sans nuire aucunement à la croissance économique, l'Allemagne de 17 % et la France de 1 %, elle qui affichait déjà des résultats intéressants compte tenu de son niveau de développement.
Voilà des pays qui se retrouvent aujourd'hui dans une position de force pour exiger des autres nations, comme le Canada, qu'elles fassent leur part. Il est vrai que le Canada est un grand producteur de pétrole, mais compte tenu des revenus très importants qu'il tire de cette activité, son gouvernement fédéral et chacun de ses gouvernements provinciaux devraient s'engager avec encore plus de détermination à en combattre les effets pervers sur l'environnement. De toute façon, n'est-ce pas là le meilleur moyen d'inciter l'industrie à investir dans les technologies de pointe, et les consommateurs à adopter des habitudes de vie compatibles avec la protection de leur environnement?
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