(Québec) M. McKay, on aimerait que vous soyez candidat pour nous. On avait pensé à la circonscription de Bourget!
- Ça ne m'intéresse pas. Je veux gagner. Je veux une circonscription sûre, où j'ai de bonnes chances d'être élu!- D'accord, c'est bien, alors il faudrait se rencontrer. Demain pour souper... Il y a un restaurant près de la permanence du parti.
- J'y serai, à 18h30. J'amènerai mon jeune fils. J'ai une garde partagée.
Quand il raccrocha, l'organisateur politique se dit qu'il devrait faire un effort supplémentaire pour capturer ce candidat. Bien sûr, Scott McKay avait été battu à la direction du Parti vert, mais il disposait d'une bonne notoriété. Sa réputation auprès des environnementalistes serait un atout certain pour le Parti... libéral.
Le lendemain, 30 octobre, un ancien employé politique de M. McKay rappela Karl Blackburn, le responsable de l'organisation de toute la campagne libérale. «Il n'y aura pas de souper», se contenta d'annoncer l'émissaire de McKay, futur candidat péquiste dans l'Assomption.
«Les libéraux, je les ai laissés s'approcher pour mieux leur dire ce que je pensais d'eux», a expliqué hier M. McKay à La Presse, confirmant ses discussions avec l'ennemi. Pendant trois jours, il avait discuté avec Robert Dubé, membre de la commission politique du PLQ. Il l'avait rencontré le 28 octobre à la réunion d'un comité pancanadien sur l'environnement. Puis il a conversé avec Karl Blackburn, organisateur de la campagne de Charest. «J'étais curieux, je voulais savoir ce qu'ils avaient à proposer, jusqu'où ils iraient», explique McKay, candidat dans l'une des circonscriptions les plus souverainistes du Québec.
Pourtant, le réseau de McKay était clairement plus péquiste. Cet ancien conseiller municipal du RCM sous Jean Doré avait connu Jean-Robert Choquet, bras droit du maire et conjoint de Nicole Stafford, l'éminence grise, le chef de cabinet de Pauline Marois. Il était copain avec les députés péquistes de l'Est. Il s'était présenté à l'investiture contre Nicole Léger au départ du regretté Michel Bourdon dans Pointe-aux-Trembles. Battu, il s'était rallié sans causer de problèmes. Comme chef des verts, il traitait le PQ de «vieux parti» et soutenait qu'André Boisclair n'avait pas de solutions pour l'avenir.
Ceux qui ne suivent pas la politique peuvent être surpris. Circonscriptions et candidats semblent interchangeables. En fait, la distribution des circonscription relève plus de la théorie du chaos, du hasard, que des manuels de science politique. Les anecdotes, étonnantes, foisonnent. Pourquoi Jacques Dupuis, un employé politique, se trouve-t-il du jour au lendemain candidat dans le bastion libéral de Saint-Laurent? En 1998, Gérald Tremblay avait accepté de s'y porter candidat pour Jean Charest - il a changé d'idée la veille de l'annonce. Dupuis était disponible. David Levine, technocrate de confession juive et anglophone, devient candidat dans la circonscription rurale de Berthier - le mariage le plus étrange qui puisse s'imaginer. Gilles Baril, député sortant, avait promis un ministre à ses électeurs.
Habituellement, l'instinct de survie fait foi de tout et les vedettes ont droit à des sinécures; par exemple, Philippe Couillard avait eu droit successivement à Mont-Royal et Jean-Talon, deux bastions libéraux. Ancien chef des verts, éjecté de son poste par un vote des membres, Scott McKay a été désigné samedi par Pauline Marois comme candidat péquiste dans L'Assomption, l'une des circonscriptions les plus sûres pour le Parti québécois -même si elle a été emportée dans la vague adéquiste il y a 18 mois.
En fermant la porte à l'ancien député Jean-Claude St-André, Pauline Marois a fait un geste d'une rare audace. Du vrai courage, mais pas de stratégie. La querelle, prévisible, aurait dû être réglée depuis quelques semaines. Voilà qui vient de ruiner deux jours de campagne électorale. Il est vrai que M. McKay était un peu occupé avant le déclenchement des élections.
Lors du premier conseil national du PQ avec Pauline Marois à la barre, St-André avait joué les trouble-fêtes, soutenu que le PQ manquait à sa mission première en mettant la souveraineté sous le boisseau. Autour de lui, une phalange d'orthodoxes fera un baroud d'honneur. Pour leur malheur, cela permettra de les compter.
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Scott McKay (Photo: Martin Chamberland, Archives La Presse)
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