(Cet article résume la position de l’auteur lors du [Colloque du 6 juin 2009->20294])
Au moment où toute l’attention est tournée vers une sortie de la crise économique, le Québec demeure toujours politiquement dépendant d’un Gouvernement fédéral que le Québec n’a pas élu et qui prend tout de même des décisions qui affectent fortement notre avenir. Il y a quelque chose de profondément anti-démocratique dans cette situation alors que les deux-tiers des Québécois souhaitent sortir du carcan constitutionnel canadien ou le modifier profondément.
Peu après l’élection de 2007, dans les pages du Devoir et dans le livre « La Nécessaire Alliance », j’ai proposé divers éléments pour en arriver à une solution de la question nationale, dont le point de départ serait la convocation d’États généraux indépendantistes ayant pour but de concerter l’ensemble des partis, mouvements et médias indépendantistes dans une action menant, dans un deuxième temps, à un mouvement de concertation populaire plus large.
L’élection de 2008 a modifié le contexte d’une telle démarche mais elle en augmente la pertinence, puisqu’elle replace un grand parti souverainiste en position de reprendre le pouvoir à Québec. Lors du récent Conseil National du Parti Québécois, soulignant que la famille indépendantiste s’est élargie d’autres partis politiques, le nouveau vice-président de ce parti, Daniel Turp, a proposé que « d’ici la prochaine élection québécoise, (…) soit convoquée une Convention sur l’indépendance nationale du Québec, faisant fonds sur l’expérience des États généraux du Canada français qui ont donné, à la veille de la création du Parti Québécois, un véritable élan à la cause de l’indépendance du Québec ».
La prochaine élection, un moment clef
L’élection québécoise de 2008 aura été vide de sens quant à notre avenir national si dans 4 ans, elle ne ramenait au Gouvernement, presque 20 ans après le référendum de 1995, qu’un parti indépendantiste empêtré encore une fois dans le cadre du statu quo constitutionnel. La perte de crédibilité qui s’ensuivrait serait catastrophique et accentuerait la multiplication de partis et de mouvements se concurrençant dans leur impuissance. Les indépendantistes et les nationalistes ont donc 4 ans, quel que soit le parti auquel ils adhèrent, pour faire en sorte que, lors de la prochaine élection, les partis politiques confrontent leurs visions de notre avenir national, pour ensuite entreprendre une démarche plus large avec la population.
L’expérience des États généraux du Canada français, nous montre qu’il s’agit d’une démarche qui demande beaucoup de temps et d’effort. L’idée lancée en 1961 par la Fédération des Sociétés Saint-Jean-Baptiste du Québec prendra véritablement son envol en 1966 par la tenue des élections des délégués aux assises préliminaires, puis en 1967 et 1969 par la tenue des assises nationales regroupant 1075 délégués du Québec, 167 de réseaux associatifs et 364 francophones de l’extérieur du Québec.
Dépéquiser la démarche
Nous avons besoin d’une organisation de grande ampleur pour relancer une démarche souverainiste qui ait des chances de réussir. Bien que le Parti Québécois ait un rôle indispensable à jouer dans cette initiative, il est essentiel de « dépéquiser » la démarche. Il faut une remobilisation de l’intérieur et de l’extérieur de ce parti, pour rétablir la crédibilité de l’option et l’espoir que cette question puisse être résolue, et ce malgré les divergences d’opinion. Certains pourraient craindre que des États généraux indépendantistes puissent accentuer des divergences bien connues. Mais il serait illusoire et contre productif de les cacher sous le tapis. Bien que difficilement tolérables au sein d’un même parti politique, des différences de point de vue sont acceptables dans le cas d’un vaste mouvement rejoignant un grand nombre d’organismes.
Parmi les partis politiques, la compétition électorale entre le PQ, Québec solidaire, le Parti indépendantiste ou même certains nationalistes de l’ADQ peut et doit être dépassée si on veut faire faire du Québec un pays. Si dans le domaine économique, des entreprises en compétition arrivent à coopérer en investissant dans des projets communs, il n’y a pas de raison qu’on ne puisse en arriver à une saine coopétition sur le plan politique. Nous sommes tous des Québécois. Si chaque personne, parti ou mouvement laboure son coin de pays à sa façon, à gauche, au centre, à droite, en mettant l’accent sur le plan écologique, linguistique, social ou économique, on fera avancer rapidement le Québec vers son indépendance. La diversité des arguments peut mener à la multiplication des appuis dans la population.
Les objectifs et le fonctionnement
Pour en arriver là, l’établissement d’objectifs partagés et de règles démocratiques pour la tenue des États généraux est d’une importance capitale. Les objectifs ne manquent pas : actualiser les arguments en faveurs de la souveraineté, lier les pouvoirs du Québec à la solution de nos grands problèmes de société, préparer une démarche de concertation nationale menant à une forme ou l’autre de décision populaire, préparer des instruments juridiques dont des projets de constitution du Québec qui seraient discutés pendant l’élection, identifier des campagnes et des projets d’action politique de promotion de l’indépendance. Ces objectifs, ainsi que l’agenda et le déroulement des États généraux seraient évidemment établis en concertation avec les principaux partis et mouvements, par une commission indépendante mise sur pied par eux.
Comme le soulignait dans Vigile en 2007 un militant, M. Georges Le Gal, suite à ma première proposition, cette démarche « redonnerait un immense espoir aux indépendantistes. Elle permettrait de redonner le goût du militantisme à des dizaines de milliers d’indépendantistes décrochés. Elle permettrait aussi à des dizaines de milliers de nouveaux d’embarquer en vue de bâtir notre pays, le Québec. Cette vaste coalition indépendantiste serait tellement plus rafraîchissante politiquement, socialement et humainement que l’élection, année après année, de députés dont les mandats principaux sont, au provincial, d’améliorer la « province de Québec » et de se faire réélire, et, au fédéral, d’améliorer le sort du Québec dans le Canada et de se faire réélire. »
Cette idée d’États généraux indépendantistes est maintenant largement appuyée par les quelques 100 indépendantistes qui ont participé le 6 juin au colloque des Intellectuels pour la souveraineté et par plusieurs leaders indépendantistes dont Jacques Parizeau. Ce dernier nous invite à bien les préparer par des analyses de fond et une solide organisation.
À nous maintenant de nous mettre au travail.
***
Gilbert Paquette
Président des Intellectuels pour la Souveraineté (IPSO)
Ex-ministre du Gouvernement Lévesque
Convergence indépendantiste
Préparons les États Généraux sur l’Indépendance Nationale
Chronique de Gilbert Paquette
Gilbert Paquette68 articles
Ex-ministre du Parti Québécois
_ Président des Intellectuels pour la souveraineté (IPSO)
Gilbert Paquette est un chercheur au Centre interuniversitaire de recherche sur le téléapprentissage (CIRTA-LICEF), qu’il a fondé en 1992. Élu député de Rosemont à l’...
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Ex-ministre du Parti Québécois
_ Président des Intellectuels pour la souveraineté (IPSO)
Gilbert Paquette est un chercheur au Centre interuniversitaire de recherche sur le téléapprentissage (CIRTA-LICEF), qu’il a fondé en 1992. Élu député de Rosemont à l’Assemblée nationale du Québec le 15 novembre 1976, réélu en 1981, Gilbert Paquette a occupé les fonctions de ministre de la Science et de la Technologie du Québec dans le gouvernement de René Lévesque. Il démissionne de son poste en compagnie de six autres ministres, le 26 novembre 1984, pour protester contre la stratégie du « beau risque » proposée par le premier ministre. Il quitte le caucus péquiste et complète son mandat comme député indépendant. Le 18 août 2005, Gilbert Paquette se porte candidat à la direction du Parti québécois. Il abandonne la course le 10 novembre, quelques jours à peine avant le vote et demande à ses partisans d’appuyer Pauline Marois. Il est actuellement président du Conseil d’administration des intellectuels pour la souveraineté (IPSO).
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
22 juin 2009M. Paquette,
Merci pour votre contribution inestimable à ces grands travaux.
Vous dites après avoir énumérés un certain nombre d'objectifs à partager la chose suivante :
« ... une Commission indépendante mise sur pied par ... les principaux partis et mouvements » de la mouvance souverainiste.
Ainsi, nous en sommes à l'étape d'attendre que ces « principaux partis et mouvements » bougent ? Comment vont-ils bouger ?
S'il faut attendre que ces instances bougent et mettent sur pieds ce qui nous permettra de « préparer » les États généraux de l’Indépendance Nationale, ne risquons-nous pas d'attendre longtemps ? Pourquoi nous en remettre au fait qu'elles bougent ? Pourquoi ne pas les préparer maintenant ?
Dans ce sens, dans Vigile, semble se mettre en place quelque chose qui ressemble beaucoup à cela, rompre avec l'attentisme et nous commettre maintenant. Cette initiative pourrait en inspirer d'autres, voir créer un mouvement capable d'entraîner le mouvement des instances dont nous attendons qu'elle bougent, comme les y invitent vos invitations. NON ?
Quelques personnes ont endossé des Objectifs partagés à cet égard...
Stratégies de convergence-Programme commun de souveraineté
Tribune libre de Vigile - Ouhgo- 2009 06 15
CUMULATIF du 2009 06 21 - 18h
Dossier spécial de la Tribune libre
PROJET - Pour un PROGRAMME COMMUN de SOUVERAINETÉ
OBJECTIFS PARTAGÉS par les PARTICIPANT(E)S
- Exposer et discuter les termes d’un PROGRAMME COMMUN de SOUVERAINETÉ ;
- Nous entendre sur l'essentiel de ses termes simples et étoffés capables d'emporter l'adhésion du peuple souverain du Québec ;
- Solliciter l'adhésion de toutes les composantes de la mouvance souverainiste.
Signataires :
Luc Archambault, Raymond Poulin, Gaëtan Dostie, Ghislaine Caron, Daniel Roy C.A., Michel Gendron, etc...
Serez-vous des nôtres ?
Référence utiles Dossier spécial de la Tribune libre - Stratégies de convergence
- Une contribution à la stratégie de convergence Michel Gendron - 20 juin 2009
- Stratégies de convergence - Programme commun de souveraineté Ouhgo-2009 06 15
- Vigile-2009 06 16-Luc ARCHAMBAULT-Robert Barberis-Gervais - Le Plan-Marois VS Programme commun de souveraineté-Une élection suivie d’un référendum, n’est pas une élection décisionnelle-
- Vigile-2009 06 14-Luc ARCHAMBAULT-Souveraineté OU Indépendance ?-Souveraineté ! Celle du peuple souverain du Québec-
- Vigile-2009 06 14-Raymond POULIN-Une rentrée par la porte des cuisines ?
- Vigile-2009 06 14-Robert BARBERIS-GERVAIS-Le soir de la défaite au référendum du 30 octobre 1995-L’histoire du Québec aurait été changée-Politique fiction : Jacques Parizeau cède aux pressions populaires et retire sa démission
- Vigile-2009 06 14-Écrire sur Vigile ! Jacques BERGERON
Un peuple uni jamais ne sera vaincu !
Cela commence par un rassemblement citoyen souverainiste
Pourquoi pas aussi à travers un RIN² dont est annoncée la résurgence par M. Michel Laurence, inspirateur doué.
Le R.I.N. revit enfin – Vive le R.I.N
Archives de Vigile Répondre
22 juin 2009Mon cher Paquette, permettez-moi cette familiarité entre militants, quand même!
Depuis que je vais sur VIGILE, des dizaines d'intervenants réclamment ces fameux états-généraux sur la souveraineté. J'y ai moi-même utilisé vos propres mots à plusieurs reprises:''DÉPÉQUISER LE DÉBAT!''
Quand allons-nous comprendre cela?
L'option ne doit plus être portée par un seul parti ni uniquement par des parlementaires. Elle doit d'abord être portée par le peuple québécois!
Pour la prochaines élections générales, nos votes doivent être accordées aux hommes et aux femmes qui voudront faire la promotion de l'indépendance du Québec à l'Assemblée nationale.Et en ce qui me concerne, c'est très clair dans ma tête!Et vous?
Archives de Vigile Répondre
22 juin 2009En complément de réflexion j'ai jadis publié un texte sur vigile
Dépéquitiser le projet d'indépendance du Québec.