Élections Québec 2022

Pour une élection sur l’avenir de notre nation

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Le piège canadien : la « politique d’immigration subversive »


Les élections québécoises déclenchées dimanche feront-elles de nouveau abstraction des enjeux collectifs du peuple québécois ? Aux dernières élections, nous avions eu droit à un déluge de 366 promesses de la part des quatre principaux partis, qui s’étaient strictement limités aux compétences provinciales, ce carcan que le Canada a imposé au Québec dans la Constitution canadienne.


On avait oublié un détail : la majeure partie des gestes importants du gouvernement québécois ne peuvent plus se faire sans une intervention d’Ottawa jusque dans le cadre des compétences provinciales.


On ne peut plus faire abstraction de la dépendance politique du Québec, comme si les intrusions du gouvernement ou des tribunaux canadiens étaient naturellement légitimes ou, pire, comme si les lois de notre Assemblée nationale adoptées démocratiquement sur le français et la laïcité pouvaient être infirmées, au mépris de la démocratie québécoise et de ses représentants élus.


Par ailleurs, le Québec est dépendant du Canada pétrolier devant les bouleversements climatiques qui s’accélèrent et qui réclament les interventions d’un État « de plein exercice », capable de répondre également aux défis de l’économie et de la répartition des richesses.


Devant ces menaces pour l’avenir de notre nation, nous demandons aux partis de faire porter la campagne électorale sur les pouvoirs du Québec et sur la réalisation de projets collectifs d’avenir que ces pouvoirs permettraient. Sans rapport de force devant le gouvernement canadien, les beaux discours nationalistes provincialistes du gouvernement Legault sonnent creux.


Refus successifs


Rien n’illustre mieux leur vacuité que les refus successifs qu’essuie le Québec, non seulement dans le maintien de ses lois votées démocratiquement avec un appui massif de la population, mais également dans ses demandes légitimes en matière de financement de la santé et des services sociaux, ou dans les pouvoirs qu’il réclame vainement en immigration.


Dans ce dernier domaine, le Québec est placé devant une situation intenable. Le Canada, en fixant les seuils d’immigration à plus de 450 000 par année, poursuit une politique d’immigration subversive. Le Québec est loin de pouvoir accueillir les 100 000 immigrants par année qu’il lui faudrait pour maintenir son poids relatif dans la population canadienne.



366

C’est le nombre de promesses qui avaient été faites aux dernières élections par les quatre principaux partis, qui s’étaient strictement limités aux compétences provinciales, ce carcan que le Canada a imposé au Québec dans la Constitution.


Si le Québec maintenait son objectif actuel de 50 000 par année, le poids du Québec pourrait chuter sous les 10 % de la population canadienne d’ici la fin du siècle.


Par ailleurs, au rythme de 100 000 immigrants par année, le Québec n’aurait pas la capacité de maintenir la proportion des francophones au Québec. Avec une immigration inférieure à 50 000 par année, le Québec intègre en français non pas 90 % des nouveaux Québécois qu’il faudrait pour maintenir sa population francophone, mais autour de 53 %. Le choix qu’offre le Canada au Québec est simple : la minorisation accrue au Canada ou l’anglicisation du Québec ! À une autre époque, lord Durham recommandait l’accélération de l’immigration britannique au Canada afin que « les Français du Canada abandonnent leurs vaines espérances de nationalité ».


Des appuis de la gauche à la droite


Peu importent les dossiers, le gouvernement de la CAQ continue de prétendre qu’il pourra obtenir quelque chose d’Ottawa. Nous dénonçons cette mystification.


Même avec 100 députés de la CAQ, le gouvernement se fera toujours dire « non » par le Canada, non à la laïcité, non au français, non à la lutte contre les changements climatiques, non au financement de la santé, non aux pouvoirs économiques du Québec, non à la capacité du Québec de faire ses propres lois, selon ses propres valeurs. Tout simplement non !


Il faut combattre les dénigreurs du Québec qui reprennent ad nauseam le mantra selon lequel le combat pour l’émancipation des Québécois est chose du passé. Il faut leur démontrer le contraire en votant pour les candidats des partis indépendantistes lors des prochaines élections.


Le combat pour l’indépendance doit reprendre, par simple respect pour les quelque 35 % et plus de souverainistes, forcés de payer des taxes au Canada. Les partis qui croient à l’avenir du Québec doivent proposer des projets en prise avec le réel, des projets collectifs qui feront consensus dans la population, mais pour lesquels nous sommes dépourvus des pouvoirs, des budgets et des compétences internationales que nous ne devons plus céder au Canada.


Pour réussir l’indépendance, il faut rassembler les appuis de la gauche à la droite, quelles que soient les allégeances partisanes, les classes sociales ou l’origine ethnoculturelle des personnes. Un tel rassemblement exigera la collaboration entre un maximum de députés indépendantistes et des mouvements de la société civile.


Depuis 1945, des dizaines de nations sont devenues indépendantes pour pouvoir disposer librement d’eux-mêmes. Irlandais, Écossais, Catalans, Premières Nations et bien d’autres peuples continuent de lutter pour ce droit. Le Québec a pour sa part tout ce qu’il faut pour réussir son projet d’indépendance. Il a le devoir de persister et de le réaliser.

 





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Gilbert Paquette67 articles

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Ex-ministre du Parti Québécois
_ Président des Intellectuels pour la souveraineté (IPSO)

Gilbert Paquette est un chercheur au Centre interuniversitaire de recherche sur le téléapprentissage (CIRTA-LICEF), qu’il a fondé en 1992. Élu député de Rosemont à l’Assemblée nationale du Québec le 15 novembre 1976, réélu en 1981, Gilbert Paquette a occupé les fonctions de ministre de la Science et de la Technologie du Québec dans le gouvernement de René Lévesque. Il démissionne de son poste en compagnie de six autres ministres, le 26 novembre 1984, pour protester contre la stratégie du « beau risque » proposée par le premier ministre. Il quitte le caucus péquiste et complète son mandat comme député indépendant. Le 18 août 2005, Gilbert Paquette se porte candidat à la direction du Parti québécois. Il abandonne la course le 10 novembre, quelques jours à peine avant le vote et demande à ses partisans d’appuyer Pauline Marois. Il est actuellement président du Conseil d’administration des intellectuels pour la souveraineté (IPSO).





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