Plusieurs milliers de personnes ont marché samedi dans les rues de Québec afin de manifester leur appui à la lutte contre les changements climatiques. Une lutte qui passe selon plusieurs par le rejet des projets de pipelines et un virage énergétique majeur.
Selon les organisateurs de la Marche action climat, plus de 25 000 personnes ont défilé dans les rues de la Vieille Capitale, empruntant notamment le secteur du Vieux-Québec, avant de se rendre sur la colline parlementaire. Là, ils ont formé un «thermomètre» climatique rouge dans le but d'exiger un plan de lutte contre les bouleversements du climat mondial.
Cette marche, «festive» et familiale, est l'une des plus importantes de l'histoire canadienne consacrée aux enjeux climatiques. Des gens sont venus de plusieurs régions du Québec, mais aussi de l'Ontario et des Maritimes. La preuve, selon le directeur général de Nature Québec, Christian Simard, que le message envoyé aux décideurs est clair. «Nous demandons haut et fort au premier ministre Philippe Couillard de prendre des engagements fermes envers la lutte contre les changements climatiques.»
Cohérence
Les premiers ministres provinciaux se rencontrent d'ailleurs dans quelques jours à Québec pour discuter d'une éventuelle stratégie interprovinciale en faveur de la protection du climat. S'il salue cette initiative, M. Simard estime qu'une telle stratégie doit être «cohérente». «On ne peut clairement pas tenter de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et dire oui aux projets de pipelines comme celui de TransCanada. Et on ne peut pas autoriser les projets d'exploitation de pétrole et de gaz de schiste tout en affirmant se soucier du climat.»
Le porte-parole du Parti québécois en matière d'Environnement, Sylvain Gaudreault, juge également que le projet de pipeline Énergie Est est «incompatible» avec tout plan de sortie du pétrole. Parmi les manifestants, plusieurs brandissaient d'ailleurs des pancartes arborant des slogans d'opposition aux projets d'oléoducs. Nombre d'entre eux affirmaient aussi leur opposition aux sables bitumineux albertains, dont l'exploitation est responsable de la hausse constante des émissions de gaz à effet de serre du Canada. Sur la banderole tenue en tête de cortège, on pouvait lire: «Oui au climat = non aux sables bitumineux».
«Il y a 20 ans, quand nous avons fondé Équiterre, les gens nous traitaient d'alarmistes, souligne son directeur principal, Steven Guilbeault. Aujourd'hui, les signaux scientifiques sont clairs. Nous connaissons des records de températures mois après mois. Il est donc clair que nous sommes prêts pour un virage vers une société plus sobre en carbone.»
Selon M.Gaudreault, le gouvernement Couillard doit aussi doter le Québec d'une stratégie claire en vue de la rencontre de Paris. Face à l'inaction du gouvernement Harper, «le Québec doit faire preuve de leadership», selon lui. La rencontre de Paris, qui doit se tenir en décembre prochain, est en effet cruciale pour l'avenir climatique mondial. C'est là que doit être conclu l'accord le plus ambitieux de l'histoire pour répondre à cette crise environnementale sans précédent.
Pour Québec solidaire, des pistes de solutions existent. La formation propose notamment d'investir 20 milliards de dollars en 5 ans dans le transport en commun, mais aussi de lancer un «chantier de rénovation écologique» pour améliorer l'efficacité énergétique. Selon le parti, de tels projets seraient créateurs de «milliers» d'emplois.
Impacts climatiques
Quoiqu’en pensent les climato-sceptiques, les indices d’un réchauffement de la planète ne cessent de s’accumuler depuis quelques années. Qui plus est, le XXIe siècle compte déjà 13 des 14 années les plus chaudes jamais observées.
Les niveaux actuels des émissions mondiales de GES conduisent la planète vers une hausse des températures 4 à 5 °C à la fin du siècle. Un tel scénario serait tout simplement catastrophique pour le maintien de la vie sur Terre, selon ce qui se dégage de rapports produits par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et la Banque mondiale.
Pour éviter le pire, la communauté scientifique est d’avis qu’il faudrait limiter la hausse globale à 2 °C d’ici la fin du siècle, par rapport au début de l’ère préindustrielle. Pour y parvenir, il faudrait que l’humanité se donne un objectif de «zéro émission» de GES au plus tard en 2100, selon le GIEC. À titre de comparaison, les émissions de GES du Canada doivent au contraire poursuivre leur croissance marquée, en raison de l’exploitation pétrolière.
Cette nécessaire refonte en profondeur de notre modèle énergétique exigerait des investissements de plusieurs centaines de milliards de dollars par an d’ici 2030, notamment pour des mesures d’efficacité énergétique et la production «décarbonée» d’électricité. Le GIEC mise aussi sur le développement de la technologie de la capture et du stockage du carbone, une technique qui est pour le moment expérimentale.
Lutter contre les changements climatiques ne nuirait pas pour autant à la croissance de l’économie mondiale, estiment les experts. Des efforts «ambitieux» de réduction de gaz à effet de serre feraient baisser de 0,06 point le taux mondial de croissance, estimé entre 1,6 et 3 % par an au cours du XXIe siècle. En contrepartie, soutient le GIEC, «plus nous attendons pour agir, plus ce sera coûteux».
QUÉBEC
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