Nantel, #sérieusement?

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Guy Nantel est plein de bonnes intentions, mais saura-t-il faire face à l'hostilité de l'establishment péquiste ?


C’est avec beaucoup de sérieux que Guy Nantel a fait son entrée sur la scène politique.  


Jadis, les humoristes qui plongeaient cherchaient surtout à se moquer du processus électoral.   


Candidat à la présidentielle de 1981, Coluche avait pour slogan : «Jusqu’à présent la France est coupée en deux. Avec moi, elle sera pliée en quatre!»   


En 1965, l’écrivain Pierre Dac, fondateur du «Mouvement ondulatoire unifié» avait aspiré à l’Élysée. Sa phrase-choc : «Les temps sont durs, votez MOU!»   


Chez nous, le Parti rhinocéros joue les humoristes électoraux depuis longtemps. C’est toutefois en 2011 qu’un «vrai» humoriste issu de l’«industrie», Jean-François Mercier, alias le «gros cave», se présentait aux fédérales dans Chambly-Borduas pour... le Parti pour la gloire. Son slogan? «Là c’t’assez tabarnak!»   


Une de ses déclarations prend une certaine actualité : «Certaines personnes ont décrié l’absence de contenu politique chez les humoristes. J’espère qu’ils se réjouiront qu’un politicien ait enfin un contenu humoristique.»   


Vrai pouvoir  


Mercier répétait qu’il ne voulait pas être élu et il a été exaucé. Il obtint tout de même 7843 voix, soit 11,3 % du vote, et arriva troisième devant le libéral!   


Nantel, lui, semble très sérieusement rêver de remplacer Jean-François Lisée. Un chef qui, en passant, s’était transformé en humoriste expert en «blagues de péquistes», au début de la campagne de 2018. Sans grand succès. #sérieusement (mot-clic ironique du PQ d’alors).   


Ce qui m’intrigue : les humoristes ont déjà énormément de pouvoir dans notre société. Ce sont les artistes aux carrières les plus lucratives. Le politologue Jean-Herman Guay faisait remarquer il y a quelques années : «Les salles des humoristes sont remplies alors que celles des partis politiques et des associations (syndicats, groupes de pression, etc.) sont vides.»   


Parmi les personnalités les plus influentes au Québec, il y a certains humoristes : Guy A. Lepage, Infoman. C’est devant eux que les politiciens défilent à la télévision ou dans les vidéos sur les réseaux sociaux, pour se faire élire.   


Compétence  


Qu’un humoriste comme Nantel souhaite diriger un parti, puis un gouvernement est un signe des temps. L’influence, il faut croire, ne lui suffit plus.   


Il souhaite exercer le pouvoir, ce qui est une autre paire de manches. Cela exige de convaincre son groupe, le maintenir uni autant que possible, tenter d’être conséquent dans ses prises de position, s’intéresser aux détails des propositions, connaître ses «dossiers», être prêt à écouter les critiques, faire face à un barrage d’opposition, etc.   


Il y a des précédents : l’Ukraine a catapulté président, en mai 2019, un comédien et humoriste, Volodymyr Zelensky.   


La grande question qu’un élu se posait hier, concernant la candidature de Nantel, est celle de la compétence. Certes, ça met du piquant dans la campagne du PQ, mais un humoriste a-t-il ce qu’il faut pour le poste? N’a-t-il pas trop développé le détachement nécessaire au rire? La réponse de Nantel à ce type de question fut une boutade efficace hier matin : «un professeur de théâtre» est bien devenu PM du Canada. Mais est-ce un bon argument politique? #sérieusement?   





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