Le 21 juin 2017, Justin Trudeau a décidé de renommer l’Édifice Langevin et de le désigner dorénavant sous le nom de Bureau du premier ministre et du Conseil privé, sous prétexte qu’Hector-Louis Langevin aurait été « l’architecte des pensionnats autochtones » et qu’il aurait été à l’origine de la création du système des pensionnats autochtones, ce qui est parfaitement faux.
Hector-Louis Langevin (1826-1906) n’est pas le créateur des pensionnats autochtones ; les premiers pensionnats autochtones ont été ouverts en 1820, six ans avant la naissance de Langevin. Ces pensionnats relevaient de l’Église anglicane, et l’Église catholique attendra 30 ans avant d’en ouvrir de son côté.
Langevin n’était pas surintendant des Affaires indiennes quand ces pensionnats ont été érigés en système par le fédéral. Langevin a occupé ce poste pendant seulement un an et demi, du 22 mai 1868 au 7 décembre 1869, alors que l’Indian Act a été adopté en 1876 par le gouvernement libéral d’Alexander Mackenzie (et non sous John A. Macdonald) et que la décision de créer un système fédéral de pensionnats autochtones date de 1883 (soit 14 ans après la fin du mandat de Langevin aux Affaires indiennes).
En 1883, c’est Macdonald qui occupait les postes à la fois de premier ministre et de surintendant des Affaires indiennes. Pour ce qui est des pensionnats autochtones, sa responsabilité est entière.
Langevin est mort en 1906, alors que la fréquentation des pensionnats par les Autochtones a été rendue obligatoire quatorze ans plus tard, en 1920, et il n’est nullement responsable du fait que le système des pensionnats autochtones a duré plus d’un siècle, de 1883 à 1996. À ce titre, Jean Chrétien a une très lourde responsabilité, lui qui a été ministre des Affaires indiennes de 1968 à 1974 et qui a maintenu en place cet odieux système d’assimilation.
Bien qu’à aucun moment de sa vie Hector-Louis Langevin n’ait exercé la moindre autorité ministérielle sur un quelconque pensionnat autochtone, Justin Trudeau a choisi d’effacer son nom de notre mémoire collective. Or, Langevin est non seulement un Père de la Confédération canadienne, il est aussi bel et bien, avec George-Étienne Cartier, un des deux pères du fédéralisme québécois.
En effet, Langevin et Cartier ont été les deux seuls francophones à avoir assisté aux trois conférences qui ont donné naissance à la Confédération, dont les francophones représentaient 40 % de la population. À la conférence de Charlottetown, seulement 11,7 % des participants étaient des Canadiens français [4 / 34] ; à la conférence de Québec, ils ne représentaient que 12,9 % d’entre eux [4 / 31] et à celle de Londres, 13,3 % [2 / 15].
On aura compris que, lorsque Macdonald déclarait au sous-ministre francophone Georges-Auguste Gigault : « Vous êtes 40 % de la population et, si vous êtes unis, vous pouvez toujours faire respecter vos droits », il se moquait de lui, de nous et de la supposée démocratie Canadian.
De même, lorsque Justin Trudeau invite à ne pas toucher aux statues de Macdonald, grand responsable de la mise sur pied du réseau fédéral des pensionnats autochtones, après avoir lui-même effacé le nom de Langevin qui n’en fut aucunement responsable, il se moque de nous.