C’était beau à voir. Elles avaient le vent dans les voiles. 20 000 femmes, ça déplace du vent, surtout qu’elles ont beaucoup plus l’habitude des petits groupes. 20 000, « ça fait du monde à messe », comme disaient nos ancêtres. En les regardant marcher, j’ai pensé à celles du début que je n’ai pas connues mais dont je sais qu’on leur doit beaucoup, comme Marie Lacoste-Gérin-Lajoie, ou peu après d’autres dont j’ai partagé les combats Thérèse Casgrain, Simonne Monet-Chartrand et toutes les autres qui ne sont pas là pour voir les Québécoises en marche, mais qui avaient ouvert la voie.
Le 26 octobre dernier, je me suis demandé si j’allais prendre ma retraite. 60 ans à redire aux femmes qu’elles ont du pouvoir, qu’elles ont le devoir de réclamer ce qui est leur juste part, que l’égalité n’est pas un cadeau qu’elles ont à quêter mais un Droit qui, hélas, même inscrit dans la Charte des droits depuis longtemps et bientôt dans la Charte de la laïcité, n’est pas totalement acquis pour autant et que là où il l’est, il reste fragile et se trouve souvent remis en question, comme en Faculté de médecine où les garçons disent ouvertement qu’il y a trop de filles. La vigilance de toutes les femmes sera nécessaire. Merci de l’avoir redit Janette.
J’ai été heureuse de voir que des hommes s’étaient mêlés au défilé des femmes. Pas de policiers comme avec les étudiants du printemps érable, mais des compagnons, des maris, des pères, ceux qui ont compris les revendications des femmes et qui réalisent que la révolution tranquille qu’elles mènent depuis des siècles est loin d’être achevée même s’il leur arrive d’être fatiguées et de s’arrêter sur le bord de la route pour respirer.
Les femmes sont douées pour accomplir plusieurs tâches à la fois. Il suffit de penser à toutes ces spécialisations qu’elles acquièrent forcément à la maison avec des enfants. Diplômées en tout par la force des choses. Elles auront réussi deux choses importantes sans avoir l’air d’y toucher : donner des pères à leurs enfants, car les pères étaient presque totalement absents de l’éducation des enfants et du monde d’amour dont les petits ont besoin. Puis, elles ont réussi à travailler à l’extérieur du foyer sans que la famille s’écroule totalement. Elles ont ainsi doublé leurs heures de travail en cumulant les tâches. Elles sont toujours en demande sur la participation des hommes aux travaux de la maison. Leur juste part à eux, même si on en parle depuis longtemps, est rarement au rendez-vous. Mais les femmes tiennent bon. Elles continuent de tout faire, ou presque, à la maison pendant qu’ils lisent le journal.
Citoyennes efficaces
Là où ça se complique, c’est que comme citoyennes, elles ont aussi besoin de lire les journaux, de s’informer de ce qui se passe dans le monde afin d’être des citoyennes efficaces. J’espère voir le jour où pas une seule femme ne dira qu’elle vote pour tel candidat parce qu’il est « cute », ce que j’ai entendu récemment au sujet du vote municipal. La vigilance dont les féministes parlent couvre tout ce terrain.
Les femmes ont marché en faveur de la Charte de la laïcité. Elles ont aussi besoin de suivre le cheminement de la loi 52 sur la dignité de la fin de vie, car ce sujet, à plus ou moins longue échéance, nous concerne toutes. Il faut aussi surveiller le comportement intolérable de Stephen Harper depuis longtemps sur tout ce qui touche les femmes au coeur de ce qu’elles sont et de ce qui touche le Québec dont il a fait une lutte sans trêve. Cet homme ne semble plus capable de séparer le bien du mal, il règne sur le Canada et ça sent la dictature à plein nez, ce qui devrait nous tenir sur nos gardes en tout temps.
Les femmes n’ont pas eu le choix. Elles ont toutes appris à faire plusieurs choses à la fois, assez pour en devenir des spécialistes. Il y a longtemps que ça les fait sourire d’entendre dire qu’il faut être capable de marcher et de mâcher de la gomme en même temps.
Pour moi, qui ai eu si souvent l’impression de marcher seule, d’être la voix qui criait dans le désert, la vieille féministe enragée qu’on montrait parfois du doigt, le 26 octobre sera une date importante. Vous étiez belles et malgré la pluie, vous avez tenu bon. La relève est assurée pour la première fois. Trois générations de femmes au moins, peut-être quatre parfois… ça devrait tenir la mer. Toujours se souvenir que les femmes étaient dans la rue pour la Révolution française en 1789. Puis quand la bataille a été finie, les hommes révolutionnaires les ont renvoyées à la maison.
Le reste s’est fait sans elles. Une chance qu’on se souvient…
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