Au cours d'un événement indépendantiste transpartisan, plusieurs m'ont servi l'argument comme quoi «le Parti Québécois ne redeviendra un parti souverainiste qu'en 2022», qu'il est donc un parti provincialiste et qu'en conséquence, ça ne servirait à rien de voter pour ce parti. Or, l'indépendance n'est pas un simple projet de loi ou enjeu électoral. Elle requiert le fameux «50% + 1» et doit donc être minutieusement préparée.
Après deux échecs référendaires, la rhétorique fédéraliste a réussi à s'imposer depuis plus de vingt ans. On associe aujourd'hui largement l'indépendantisme au séparatisme et au fédéralisme – ou, comme j'aime bien l'appeler, au dépendantisme – à l'union. Face à ce faux dilemme, séparation ou union, les termes du débat sont viciés, et le choix s'avère trompeusement évident pour beaucoup de citoyens.
Si l'on veut, ne serait-ce qu'avoir une chance de convaincre une majorité de Québécoises et de Québécois que l'indépendance du Québec est la bonne chose à faire, il faudra certainement renverser cette rhétorique pernicieuse.
L'amour perdu de la nation
Notre magnifique capitale, qui devrait être le berceau du sentiment nationaliste, vit des heures difficiles avec des radios qualifiées à raison de «poubelles» qui, chaque jour, propagent des faussetés sur notre capacité immédiate à devenir un pays. Être «séparatiste» dans la grande région de Québec suffit souvent à vous rendre politiquement infréquentable, ce terme étant employé comme une insulte ou comme une attaque ad hominem contre quiconque oserait souhaiter l'indépendance du Québec.
Le parti qui souhaitera faire l'indépendance du Québec devra travailler fort afin de remettre sur pied l'État québécois.
Jean-François Lisée, souverainiste convaincu et convaincant, sait très bien qu'il nuirait terriblement à sa cause s'il perdait un référendum dans un premier mandat. Or, depuis 15 ans, les gouvernements libéraux qui se sont succédé ont échoué dans leurs politiques de francisation et d'intégration des nouveaux arrivants, en plus d'avoir miné notre solidarité si unique en Amérique du Nord.
Ils ont coupé dans les services à la population à un point tel que l'idée de tout privatiser séduit de plus en plus de gens. Difficile d'insuffler l'amour de la nation et de son État quand ces derniers sont mis à mal depuis plus d'une décennie. Le parti qui souhaitera faire l'indépendance du Québec devra travailler fort afin de remettre sur pied l'État québécois et d'ainsi revigorer la confiance que ses citoyens lui accordent. Peut-être qu'à ce moment seulement, l'envie du pays leur reviendra.
Inutile de dire qu'une troisième défaite pour le camp du «Oui» ferait porter à la cause indépendantiste un boulet extrêmement lourd dont elle ne se débarrasserait pas de sitôt.
Face à cette situation, force est de constater qu'une consultation référendaire sur la question nationale dans le premier mandat d'un gouvernement du Parti Québécois, ou de tout autre parti souverainiste, serait vouée à l'échec. Inutile de dire qu'une troisième défaite pour le camp du «Oui» ferait porter à la cause indépendantiste un boulet extrêmement lourd dont elle ne se débarrasserait pas de sitôt.
Voilà donc pourquoi il faut préparer la souveraineté du Québec, et c'est pour cette raison que le Parti Québécois ne l'a pas abandonnée, mais a plutôt décidé de prendre le temps de réussir l'indépendance. On ne parle pas ici «d'attentisme», puisque l'objectif est bien présent. Le retour de Jean-Martin Aussant au Parti Québécois en est une preuve, lui qui est en politique avant tout pour réaliser la souveraineté du Québec.
Promotion et rapport de force
L'option souverainiste doit être promue de façon plus active par les différents acteurs du milieu. Mais une telle promotion demande de gros moyens.
Quand un organisme comme l'IRAI doit se battre devant les tribunaux pour recevoir son statut d'organisme de bienfaisance, alors que «L'idée fédérale», un «réseau québécois de réflexion sur le fédéralisme», n'a eu aucun problème à l'obtenir; quand le gouvernement libéral ne se fait aucunement critiquer d'utiliser les fonds publics pour promouvoir le fédéralisme canadien, mais que le Parti Québécois fait la manchette dès qu'il propose de faire de même pour la souveraineté.
Quand le contexte mondial actuel nous montre une Catalogne dont le droit à l'autodétermination a été bafoué de manière violente, sans une seule réaction valable ou effective des pays de l'Union européenne ou de l'ONU, force est d'admettre que l'accession à l'indépendance du Québec sera ardue et se devra d'être préparée à la perfection.
Hypocrisie et opportunisme
Ainsi, quand des indépendantistes prétendent que le Parti Québécois est un parti «provincialiste» et qu'on cite en opposition le programme de Québec solidaire qui «ferait l'indépendance dans un premier mandat», un constat s'impose: cette démarche échouerait sans l'ombre d'un doute. Ils le savent très bien eux-mêmes. Dans les faits, les quelques votes qu'ils iront gruger chez les souverainistes mécontents de la démarche qu'a choisie le Parti Québécois leur donneront peut-être, qui sait, la chance de faire élire un ou deux députés de plus à l'Assemblée nationale.
Enfin, tous ceux qui souhaitent l'avènement du pays du Québec doivent s'apercevoir d'une chose: à la suite du reniement de l'accord des OUI Québecet du rejet total de la convergence des forces souverainistes par Québec solidaire lui-même, si nous voulons voir le mouvement indépendantiste survivre à l'année 2018, il n'y a qu'un seul parti vers lequel nous devrons tous et toutes converger le 1er octobre prochain: le Parti Québécois.