Laïcité: terrain d'entente partiel entre le sociologue Rocher et le philosophe Weinstock?

Les deux s'entendent sur l'échec du gouvernement après la commission Bouchard-Taylor

Laïcité — débat québécois


Lisa-Marie Gervais - Généralement appelés à croiser le fer, les deux intellectuels et défenseurs de deux positions différentes sur la laïcité, Guy Rocher et Daniel Weinstock, ont été invités hier à garder leur épée au fourreau pour débattre de la question devant un auditoire de jeunes universitaires de la génération Y, lors d'un midi-conférence à l'Université de Montréal. Pour la professeure à la Faculté de droit de l'Université, Violaine Lemay, et son équipe, c'était l'occasion de tenter de mettre en valeur les éléments communs du discours des deux penseurs. Mais sont-ils vraiment conciliables?
Déjà, le sociologue Rocher et le philosophe Weinstock ont abondamment échangé sur la place publique et dans les pages du Devoir, où ils ont publié les textes de leur manifeste respectif. Le premier défend une vision plus laïque, en ce sens qu'elle insiste davantage sur la neutralité de l'État en ne reconnaissant pas la place des signes religieux dans les institutions. Le second, lui, est d'avis que l'ostentation de ces symboles, dans une certaine mesure, n'entrave pas la neutralité de l'État.
Neutralité
Ledit concept de neutralité est un premier point de rapprochement, conviennent les deux hommes. «Les citoyens doivent se sentir traités avec un égal respect, là-dessus nous sommes d'accord», dénote M. Weinstock. «Mais la question est de savoir dans quelle mesure. Nous voulons que la neutralité de l'État soit compatible autant que possible avec la liberté individuelle», a ajouté le professeur, qui ne fait pourtant pas mention du concept de «neutralité de l'État» dans son manifeste.
Pour Guy Rocher, les choix religieux sont des choix personnels que l'on doit respecter. «Mais doivent-ils être respectés par l'institution publique jusqu'à devenir ceux de l'institution publique?» s'est-il interrogé. Pas à n'importe quel prix, a acquiescé M. Weinstock, à la différence que «si ce prix est raisonnable, nos institutions devraient l'accepter». D'où l'importance de baliser ce qui est acceptable ou pas dans notre société, ce qui n'a pas encore été fait, ont reconnu à l'unisson les deux intellectuels.
Échec du gouvernement
Les deux s'entendent ainsi sur l'échec du gouvernement, qui n'a pas su tirer profit du rapport de la commission Bouchard-Taylor pour écrire un livre blanc, par exemple, ou légiférer sur la question. Le projet de loi 94 n'a pas encore abouti et s'avère réducteur, croient les deux chercheurs.
Profitant de la tribune qui lui était offerte, M. Weinstock a mis en garde contre une certaine «européanisation» du débat québécois en rappelant que certaines politiques d'intégration ont connu un franc succès. Guy Rocher a pour sa part conclu en appelant à nourrir le débat et même à l'enrichir d'une réflexion sur ce qui constitue le patrimoine. Est-ce que le sapin ou la croix à l'Assemblée nationale en font partie? «Je me sens devant un vide intellectuel. J'espère que nos institutions veilleront à nourrir [le débat]», a-t-il soutenu.


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