Le ministre Simon Jolin-Barrette a la « conviction » que son projet de loi sur la laïcité de l’État respectera la Charte canadienne des droits et libertés. Il emploiera néanmoins la clause dérogatoire afin de mettre à l’abri une interdiction du port de signes religieux chez des employés de l’État en « position d’autorité » d’une éventuelle contestation judiciaire.
L’élu caquiste s’est dit déterminé mercredi à honorer le « contrat moral » conclu entre l’électorat québécois et la Coalition avenir Québec l’automne dernier en légiférant au plus vite afin de prohiber le port de signes religieux chez les policiers, procureurs, juges, gardiens de prison, ainsi que les enseignants. « La population québécoise, elle est souveraine de ses choix et, lorsqu’elle porte au pouvoir un gouvernement avec certains engagements, ce gouvernement-là respecte ces engagements-là qu’il a pris en campagne électorale. C’est un contrat moral que nous avons avec les électeurs », a-t-il souligné dans un impromptu de presse.
Le projet de loi, qui se trouve actuellement sur la table à dessin du gouvernement, respectera la loi fondamentale du Canada, a assuré M. Jolin-Barrette aux médias. « Lorsqu’on dépose un projet de loi à l’Assemblée nationale, on a la conviction que les lois [proposées] respectent la Constitution canadienne », a-t-il affirmé à quelques jours du dépôt prévu du projet de loi.
Cela dit, M. Jolin-Barrette se réserve le droit de faire fi de l’opinion des juristes de l’État. « On travaille en collaboration avec l’ensemble des partenaires de l’administration publique, l’ensemble des collègues ministres. Il y a des discussions qui ont cours. Et, le gouvernement va prendre ses décisions », a-t-il affirmé, refusant aussi de diffuser les avis juridiques en la matière qu’il aurait reçus.
Comme l’indiquait Le Devoir il y a près de deux mois, le gouvernement Legault envisage de couper court à toute contestation juridique en ayant recours à la clause dérogatoire de la Charte canadienne des droits et libertés.
Il compte aussi recourir à l’« arme nucléaire constitutionnelle » ― expression de l’ex-premier ministre Philippe Couillard ― pour sauver l’article 10 de la « loi 62 des libéraux » prévoyant qu’une personne offrant ou recevant un service public « doit avoir le visage découvert ». Cette disposition controversée a été suspendue par les tribunaux quelques jours après l’entrée en vigueur de la Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l’État (loi 62), et ce, jusqu’à l’audition au mérite.
Le gouvernement caquiste fera des pieds et des mains pour faire adopter en moins de 10 semaines le projet de loi sur la laïcité. « La CAQ a été très claire avant la campagne électorale, pendant la campagne électorale, et suite à la campagne électorale à l’effet que le débat, notamment sur les signes religieux, et relativement à la laïcité de l’État, c’était un débat qui était important, mais qu’on devait surtout régler la situation », a insisté M. Jolin-Barrette mercredi.