Il existe différents types de funérailles officielles : funérailles d’État, funérailles nationales, funérailles civiques. J’en ajouterais un autre : les funérailles politiques, à travers lesquelles un gouvernement cherche à courtiser une clientèle et à repolir son image. Celles du cinéaste Gilles Carle appartiendraient à cette catégorie.
Les funérailles d’État sont réservées aux ex-premiers ministres et aux premiers ministres décédés dans l’exercice de leurs fonctions. Les funérailles nationales, quant à elles, sont offertes par le gouvernement aux proches de personnalités qui ont marqué la vie politique, culturelle ou sociale du Québec.
Le service du Protocole du gouvernement du Québec se charge de l’organisation de ces deux types de funérailles, en collaboration avec la famille, qui exprime ses choix sur certaines modalités de la cérémonie. Les drapeaux sont aussi mis en berne dès le jour du décès dans le cas des funérailles d’État et le jour seulement de la cérémonie funéraire lors de funérailles nationales.
Des funérailles civiques, par ailleurs, sont organisées par des groupes qui veulent rendre hommage à l’un des leurs, comme les policiers à la suite du décès d’un collègue dans l’exercice de ses fonctions. Le gouvernement n’est alors pas mêlé directement à l’organisation même s’il arrive que le Protocole donne un coup de pouce lorsque des dignitaires seront présents.
La décision discrétionnaire de Jean Charest d’honorer Gilles Carle par des funérailles nationales contribue à une banalisation malheureuse de cet hommage. Carle a certes réalisé quelques films à succès, mais sa filmographie n’occupe tout de même pas une place déterminante dans l’histoire culturelle du Québec. Il est aussi loin d’être assuré que son œuvre traversera, test ultime, l’épreuve du temps. Ce n’est pas Steven Spielberg tout de même!
Capital de sympathie
Gilles Carle a, par contre, attiré un capital de sympathie depuis 1991. Tout le Québec a assisté à l’évolution de la maladie de Parkinson dont il souffrait et au démarchage de sa conjointe, Chloé Sainte-Marie, pour que les gouvernements apportent un soutien sous différentes formes aux aidants naturels.
La comédienne a obtenu peu de succès auprès de ceux-ci, mais le gouvernement Charest sait bien qu’elle se faisait la porte-parole de plusieurs milliers de Québécois qui soutiennent jusqu’à leur propre épuisement un parent qui requiert des soins prolongés et dont ils deviennent otages, faute de ressources de rechange.
Le gouvernement fait du millage politique cette semaine sur l’histoire touchante Carle-Sainte-Marie en s’associant à eux par des funérailles nationales.
Décisions discrétionnaires
Chaque décision d’honorer quelqu’un par des funérailles nationales est arbitraire. L’évaluation de la contribution d’un individu à la société québécoise variera selon le gouvernement en place.
Par ailleurs, les gouvernements sont vite sur la gâchette lorsqu’il s’agit d’organiser un gros spectacle médiatique à la suite du décès d’une vedette ou d’une personnalité populaire, artistique ou sportive. Ils demeurent, par contre, indifférents le plus souvent dans les cas de chercheurs, de sommités universitaires et scientifiques ou de gens d’affaires qui ont atteint des niveaux d’excellence et contribué à l’évolution d’une science ou au développement et au rayonnement du Québec.
Ces derniers n’ont droit qu’à un communiqué de presse de cinq lignes du bureau du premier ministre offrant ses condoléances à la famille. Et les drapeaux restent au haut des mâts.
jjacques.samson@journaldequebec.com
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