Il est toujours délicat de déterminer le nom du candidat qui ressort gagnant d’un débat des chefs en campagne électorale, particulièrement dans un débat où aucun candidat n’est ressorti de façon flagrante dans les échanges entre eux. Or il existe pourtant un champ d’intervention dans lequel un candidat s’est démarqué, à savoir la maîtrise de ses dossiers. Je veux parler ici du chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet.
D’un côté, le chef libéral Mark Carney qui, dans un français souvent laborieux et parfois inaudible, ne s’est contenté que de réponses succinctes aux questions de ses adversaires, d’un autre, Jagmeet Singh, qui est revenu sans vergogne sur le thème de la santé tout en reléguant les autres thèmes aux oubliettes, et finalement, Pierre Poilievre qui, malgré son calme et la clarté de ses interventions, n’a pas réussi à déstabiliser son principal adversaire, Mark Carney.
Quant à Yves-François Blanchet, force est d’admettre qu’il avait un avantage marqué sur les autres candidats à savoir qu’il était le seul à profiter d’un débat tenu dans sa langue maternelle. Toutefois, hormis cet avantage indéniable, le chef du Bloc a su se montrer respectueux envers tous le chefs de partis, y compris sa solidarité envers le Canada dans l’épineux épisode des tarifs de Donald Trump. Ce qui ne l’a pas empêché de défendre la pertinence d’un Québec indépendant dans le climat géo-politique actuel baignant dans l’incertitude et le chaos économique.
Au moment d’écrire cet article, il est trop tôt pour connaître les réactions des Canadiens à l’égard du débat dans les sondages. Toutefois, en ce qui a trait à l’opinion de plusieurs journalistes, Yves-François Blanchet se classe premier eu égard à la performance des chefs, ses résultats oscillant entre 7,5 et 9 sur 10. En revanche, aucun candidat n’a réussi à « sortir un lapin de son chapeau » pour infliger un « knock out » à son adversaire. Somme toute, un débat sans histoire qui aura permis aux téléspectateurs d’en connaître davantage sur les engagements des chefs de partis et ce, en tout respect les uns envers les autres.
De la Commission des débats des chefs
Organiser deux débats des chefs en campagne électorale à tous les quatre ans, tel est le mandat de la Commission des débats des chefs, financée annuellement à environ 1,7 million de dollars en moyenne par les contribuables. Et que fait la Commission en absence de débat? Elle mène des recherches sur les «meilleures pratiques liées aux débats en consultant les organisateurs de débats à travers le monde ». Elle consulte aussi des experts qui les aident à améliorer les débats à venir.
Manifestement, l’année 2025 n’aura pas été un « grand crû » pour la Commission. En effet, en plus d’avoir exclu le co-chef du Parti vert, Jonathan Pedneault, du débat le matin même de l’événement, elle a dû devancer de deux heures le débat pour permettre aux amateurs de hockey de regarder la dernière et décisive partie du calendrier régulier du Canadien. Et pourtant, à cet effet, il appert que personne de la Commission n’ait pensé consulter le calendrier de la LNH, lequel a été dévoilé le 2 juillet 2024 et dans lequel deux matchs étaient bel et bien prévus les 16 et 17 avril 2025, deux matchs cruciaux où se jouent potentiellement les dernières places en séries éliminatoires. Et, pour ajouter au chaos, la Commission, afin d’éviter une poursuite devant les tribunaux, a offert cinq accréditations aux controversés médias d’extrême droite Rebel News et True North, ce qui a eu pour effet de bouleverser le point de presse des chefs. À cet effet, il faut se rappeler qu’en 2021, une juge de la Cour fédérale avait tranché en faveur de Rebel News en ordonnant à la Commission d’accréditer une dizaine de journalistes du média de droite pour assister aux débats organisés, une décision qui a amené la Commission, cette année, à acheter la paix et céder ainsi à la pression.
De toute évidence, la crédibilité de la Commission des débats des chefs est fortement malmenée, en raison notamment de la très longue période de temps dont elle dispose pour s’acquitter avec rigueur et efficacité de son mandat. En conséquence, je suis d’avis que le ministère des Institutions démocratiques envisage des pistes de réflexion ayant pour objectif d’assurer la légitimité de la Commission des débats des chefs en tout respect pour les contribuables canadiens qui en paient les frais.
Henri Marineau, Québec
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1 commentaire
François Champoux Répondre
18 avril 202518 avril 2025
Bonjour M. Marineau,
J'amerais savoir de vous si vous êtes "pour" ou "contre" les débats des chefs?
Merci de votre réponse.
François Champoux, Trois-Rivières