Des femmes de la génération Y rêvent d’un Québec libre

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Un engouement bienvenu

Rouyn-Noranda — Isabelle Rivest se sentait un brin nostalgique, vendredi soir, à la salle de spectacle l’Évolu-Son, à Rouyn-Noranda. Elle était nostalgique d’une époque qu’elle n’a pas connue : celle où René Lévesque galvanisait les foules avec ses discours souverainistes. Le temps d’une soirée, elle aurait bien aimé revenir en arrière, se retrouver dans la foule le 15 novembre 1976, lorsque le Parti québécois (PQ) a été élu pour la première fois. « J’aimerais dire, “ah je me souviens quand on a vécu ça”, mais je n’étais même pas au monde ! », lance la future maman de 28 ans.

Née dans les années 80, la génération Y n’a pas connu les années fastes du mouvement souverainiste au Québec. Les moins de 35 ans n’étaient pas de ce monde lors du premier référendum en 1980. Et en 1995, ils n’avaient pas encore l’âge de voter.

Près de vingt ans après la défaite du « oui », Isabelle Rivest croit qu’il serait temps que les Québécois se reprennent en main. « Plus que jamais, surtout avec ce qui se passe dans ma région par rapport aux mines, je voudrais être dans un Québec souverain qui a plus de contrôle sur ses décisions », soutient-elle. Mais elle ne croit plus que le PQ soit le meilleur parti pour faire du Québec un pays indépendant. Isabelle aimerait plutôt que ce grand projet se fasse sous un gouvernement de Québec solidaire (QS). Et elle n’est pas la seule à se tourner de plus en plus vers le parti de Françoise David et d’Amir Khadir pour que la Belle Province devienne souveraine.

« La question souverainiste ne m’intéressait pas au début », reconnaît Marie-Ève Duclos, qui raconte qu’elle vient d’une famille « fédéraliste » et que ses parents ont voté pour le « non » en 1995. « En découvrant Québec solidaire, j’ai compris que la souveraineté pouvait être l’outil pour réaliser le pays de justice que je veux ; un pays juste, équitable et environnemental pour mes enfants », poursuit-elle en frottant son ventre rond.

« Moi aussi, j’ai trouvé que ce parti reflétait mes valeurs », renchérit son amie Josée Frenette, qui vient pour sa part d’une famille complètement apolitique. Elle avoue même qu’elle ne « votait pas avant. » Mais à quelques semaines d’avoir son premier enfant, elle prend de plus en plus conscience du monde dans lequel il naîtra. Un monde encore dominé par le pétrole, les intérêts des multinationales et des riches, vous dira-t-elle.

Sans aucune gêne, les trois futures mamans trouvent que les dirigeants actuels sont inconscients de l’impact de leurs décisions à long terme sur les plus jeunes générations. Elles déplorent le manque de transparence, d’intégrité, et d’équité des politiciens. Elles s’inquiètent du développement à outrance des ressources naturelles. Elles voudraient une redistribution plus juste de la richesse.

« Ce n’est pas un pays pour avoir un pays qu’on veut, c’est un pays avec des valeurs et ce n’est surtout pas un pays avec Pierre Karl Péladeau comme premier ministre », lance Marie-Ève comme un cri du coeur. « L’arrivée de PKP au PQ est une preuve de plus que ce parti prend un virage à droite. Il avait pourtant promis beaucoup de choses lors de la dernière campagne électorale, il était plus campé vers la gauche, mais ç’a duré trois semaines après leur prise de pouvoir et, après, tout s’est envolé », poursuit-elle avec ferveur.

« On aurait le goût de croire que le PQ va nous donner cette souveraineté, mais dans les faits, ce n’est pas le cas », dit Isabelle qui tente d’être plus terre à terre même si elle rêve toujours des grands rassemblements d’antan. Si un jour le Québec devenait indépendant, elle serait sûrement parmi la foule en liesse à chanter Gens du pays.

Son conjoint, Dominic Leclerc, n’hésiterait pas, lui non plus, à agiter avec fierté la fleur de lys en cas de troisième référendum. Même s’il n’avait que 14 ans en 1995, il se souvient avoir pleuré avec son frère lorsqu’il a vu que le résultat final était si serré. « Mes parents étaient impliqués dans le camp du Oui. Ils ne se sont pas rendu compte, mais on avait été contaminés par le mouvement », raconte-t-il. Aujourd’hui, le futur papa se considère comme souverainiste, mais il affirme qu’il est « rempli d’ambiguïtés. » Sans vouloir diaboliser Pierre Karl Péladeau, il doute qu’il soit l’homme de la situation pour permettre au Québec de devenir indépendant.

En leur demandant d’ailleurs si leur enfant vivra un jour dans un Québec souverain, Isabelle lâche un grand soupir quelque peu désespéré. « J’aimerais ça vous dire oui, mais je n’y arrive pas. Il va falloir que chaque citoyen y croie plus fort et qu’on ne parle pas de souveraineté comme on parle de température. Il va falloir que ça devienne un enjeu au coeur des Québécois, parce que présentement, c’est encore, pour certains, une utopie. »


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