L’obstruction faite par la commission scolaire de Montréal (CSDM) pour l’application de la loi sur la laïcité risque de choquer la majorité des Québécois et prédispose mal à un débat serein sur l’avenir des commissions scolaires. C’est une erreur politique majeure des commissaires et la présidente Catherine Harel-Bourdon aura fort à faire pour limiter les dégâts.
Je suis de ceux qui sont favorables au maintien des commissions scolaires dans leur forme actuelle, élection locale incluse. Partout dans le monde, mis à part la France et ses ex-colonies, il existe un palier intermédiaire de gouvernance des établissements scolaires pour mettre en œuvre les politiques et les règlementations de l’État. Que ce soit des commissions scolaires, des commissions municipales ou des cantons, toutes ces structures comportent un nombre de représentants élus démocratiquement qui répondent de l’application des programmes auprès de la population et qui rapprochent le centre de décision du lieu de l’action.
Transformer ces institutions en centre de services à la merci du tiraillement entre les établissements scolaires d’une région et sans véritable pouvoir d’assurer un équitable partage des ressources sur leur territoire s’avère une totale aberration. Le ministre se paie des voyages à New-York et en Ontario pour conforter ses positions sur les maternelles 4 ans, en plus d’assumer les frais de certains étrangers pour venir dire ce qu’il veut entendre en commission parlementaire, je lui suggère aussi d’élargir son champ d’étude à ce qui se fait en termes de gouvernance ailleurs et d'entendre également les voix discordantes à la sienne. Ainsi, il éviterait peut-être de s’enliser une nouvelle fois dans une promesse mal ficelée comme celle des maternelles avec laquelle il piétine lamentablement.
Malgré mes convictions sur ce nécessaire palier intermédiaire et l’utilité des contre-pouvoirs pour éviter les débordements, je considère que la CSDM a dépassé les limites et a fait preuve d’arrogance en adoptant, lors de sa réunion du conseil, une proposition reportant l’application de la loi sur la laïcité. Au lieu d’entamer des discussions avec le ministère et de solliciter un accompagnement efficace pour l’application de la loi, les commissaires ont préféré frayer avec la désobéissance civile, tout en s’en défendant. La réponse gouvernementale ne s’est pas fait attendre et l’État entend demeurer ferme sur le respect de cette nouvelle loi. La tutelle pourrait même s’imposer si la CSDM n’obtempère pas.
Il existe des responsabilités inhérentes à chaque palier. La détermination des grandes politiques éducationnelles et le cadre social dans lequel elles se vivront relève du gouvernement central. La CSDM avait raison en défiant le ministre de l’Éducation sur le temps de récréation et en le fixant à 15 minutes plutôt que 20. Ce dernier ne s’est pas mêlé de ses affaires. Il aurait dû se contenter d’élaborer une grande orientation sur le besoin de détente des enfants pendant la fréquentation scolaire et laisser le soin aux différents milieux d’user des moyens nécessaires. Toutefois, en matière de neutralité des agents de l’État, c’est la CSDM qui outrepasse sa mission et qui doit être rappelée à l’ordre.
Le lien de confiance dans le bon vouloir de la CSDM m’apparait ténu dans les circonstances et j’aurais tendance à croire que tôt ou tard la tutelle s’imposera comme la seule solution garantissant l’application de la loi.
S’il est vrai que le ministre n’a pas à se comporter comme s’il était le directeur de chaque école du Québec, il est encore plus vrai que la CSDM n’est pas l’État!