LA CLÉ DE L’INDÉPENDANCE

Conquérir Québec pour conquérir le Québec

Version télégraphique d’un argumentaire rédigé dans le sillage du passage à Québec du NMQ (Nouveau Mouvement pour le Québec), le 24 septembre 2011

Projet d'Indépendance - un état des lieux automne 2011

LA CLÉ DE L’INDÉPENDANCE :
_ CONQUÉRIR QUÉBEC POUR CONQUÉRIR LE QUÉBEC
Version télégraphique d’un argumentaire rédigé dans le sillage du passage à Québec du NMQ (Nouveau Mouvement pour le Québec), le 24 septembre 2011
PRÉMISSES DU RAISONNEMENT :
Au référendum du 30 octobre 1995, 48 % des résidents de Québec ont voté NON, alors que cette ville est à 98 % francophone1 et qu’en tant que capitale d’un État indépendant, c’est elle qui aurait sur tous les plans le plus profité de ce statut;
Un tel résultat n’est pas tombé du ciel au hasard, ex nihilo : il repose au contraire sur une tendance lourde bien concrète, un atavisme, c’est-à-dire une hérédité des idées, des comportements;
Cet atavisme sommeille parfois longtemps, et il faut des événements majeurs comme un référendum pour le réveiller;
Ils apparaissent rapidement à l’œil averti de quiconque s’arrête un peu sur l’histoire particulière de l’ancienne capitale de l’Empire français d’Amérique. Mais encore faut-il prendre le temps, justement, de s’y attarder.
LES TRAITS HISTORIQUES QUI ONT FAÇONNÉ QUÉBEC
Le réflexe curieux qui consiste à être réfractaire à sa propre autonomie découle en grande partie des traits hérités des circonstances historiques particulières dans lesquelles Québec a grandi;
Ces traits profonds ont déjà été identifiés par plusieurs intellectuels, dont le journaliste Jean-François Cloutier dans l’essai Jeff Fillion et le malaise québécois (Liber, 2008), à savoir : conservatisme, fédéralisme, militarisme, anglophilie et anti-montréalisme;
Ces cinq traits ont dominé le paysage intellectuel, politique et social de Québec dès la fin du XVIIIe siècle (à la suite de la conquête anglaise de 1759), et ce jusqu’à la Révolution tranquille. Un exemple probant suffira à l’illustrer : le mouvement patriote, de 1830 à 1839, s’est avéré un phénomène essentiellement montréalais : il a heurté un mur d’indifférence à Québec, siège du pouvoir colonial anglais;
Durant ces deux siècles, deux écoles historiques bien distinctes se sont formées, l’une à Montréal, autour des Maurice Séguin, Guy Frégault et Michel Brunet et l’autre à Québec autour des Marcel Trudel, Jean Hamelin et Fernand Ouellet. Sans surprise, celle de Québec était fédéraliste, conservatrice, militariste et anglophile, tout le contraire de celle de Montréal, caractérisée elle par son nationalisme souvent exacerbé par les luttes linguistiques perpétuelles. Les historiens de l’école de Québec croient par exemple que la Conquête anglaise s’est avéré à maints égards un bienfait, les Anglais ayant apporté le progrès libéral et la « démocratie » à leur nouvelle colonie. Pour ceux de Montréal, il s’agit au contraire d’une catastrophe nationale dont les effets délétères se font encore aujourd’hui sentir;
Dès 1840, Québec perd son statut de capitale du Canada au profit de Kingston (1841-1843), puis de Montréal (1843-1849). De 1850 à 1858, c’est au tour de Toronto et de Québec d’être alternativement hissées au rang de capitales. En 1859, la reine d’Angleterre (Victoria) proposa Bytown au poste de capitale de la Province du Canada-Uni afin de faire définitivement taire les prétentions des quatre rivales. Le gouverneur proposa alors à Québec un prix de consolation : qu’elle se contente du titre de capitale temporaire, d’ici à ce que les bâtiments soient prêts à Ottawa… C’est donc depuis ce temps que Québec porte comme une cicatrice le surnom suranné de « Vieille capitale »;
Pendant que Québec se mit à stagner, Ottawa passa rapidement de simple bourgade rurale éloignée des grands centres dont l’économie reposait sur l’industrie du bois à la capitale prospère qu’on connaît aujourd’hui.
LES MÉDIAS DE QUÉBEC ET LE REPLI SUR LE CONSERVATISME
Depuis 1996, soit précisément un an après la défaite référendaire des forces indépendantistes et progressistes, ces cinq traits sont entrés dans les médias de Québec par la grande porte : ils dominent aujourd’hui sur les ondes des deux stations de radio d’opinion parmi les plus écoutées (FM 93,3 et CHOI 98,1), alors que les autres stations populaires (CHIK 98,9, RYTHME FM et ROUGE FM 107,5) se cantonnent dans la musique, et sont même allergiques à toute forme d’opinion;
L’impact de la télévision est marginal à cet égard, puisque la grande majorité des émissions écoutées à Québec sont en fait produites à Montréal;
Le Soleil est depuis un siècle l’indéfectible serviteur du fédéralisme, et le Journal de Québec n’affiche son nationalisme qu’en de rares occasions, essentiellement à travers la voix de chroniqueurs qui ont tous comme point commun d’être… de Montréal.
LA MISSION DES INDÉPENDANTISTES DE CŒUR ET DE RAISON DEVANT CET ÉTAT DE FAIT
Concentrer leur énergie à casser ces vieux réflexes historiques, ces atavismes, cette hérédité des idées et des comportements, et le faire avec courage et lucidité;
Le remplacer par un contre-discours positif qui met l’accent sur les avantages qu’il y aurait pour Québec à redevenir la « Nouvelle capitale »;
Cesser de faire comme si le mouvement souverainiste pouvait se passer de Québec pour régler la question nationale…
QUELQUES AVANTAGES QUE QUÉBEC AURAIT À TIRER DU STATUT DE CAPITALE
Chaque année, les Québécois envoient un « butin » (comme le disait Duplessis) d’environ 40 milliards de dollars en taxes et impôts à Ottawa. L’indépendance permettrait de rapatrier du jour au lendemain cet argent au Québec, et de répartir ses retombées en fonction des besoins spécifiques des Québécois;
Le statut de capitale à part entière attirerait ambassades et consulats en quantité, qu’il faudrait construire, entretenir et faire fonctionner. Des emplois de qualité qui permettraient de juguler l’hémorragie annuelle vers Ottawa de diplômés de l’Université Laval (et de toutes nos universités) en sciences politiques, en droit, en économique et dans tant d’autres domaines, afin de combler des postes dans les nouveaux ministères ainsi créés : les affaires étrangères, les affaires indiennes et du Nord, la citoyenneté, le commerce international, la défense nationale, l’industrie, les services météorologiques, les pêcheries et le transport ferroviaire et maritime, pour ne nommer que les plus significatifs;
L’élimination des dédoublements, qui entraînerait dans certains cas une hausse substantielle des budgets des ministères touchés, dans d’autres une baisse d’impôts pour le contribuable : l’immigration, le transport terrestre, les ressources humaines, la santé, les ressources naturelles, la sécurité publique et la protection civile, les travaux publics et les services gouvernementaux;
La fonction publique québécoise, ainsi redynamisée et gonflée de moyen inégalés, forte de nouvelles compétences, offrirait d’innombrables nouvelles carrières stimulantes d’employés de l’État;
Québec ne se contenterait désormais plus d’être ouverte sur le Canada, rôle auquel son statut inféodé à Ottawa la confine depuis 1840, mais serait forcée plus que jamais de s’ouvrir au monde…
par Jean-François Vallée, le 15 octobre 2011

Featured 22fbb88912f1dbce87e719bb999b55c4

Jean-François Vallée91 articles

  • 88 831

Jean-François Vallée est professeur de littérature québécoise et française au niveau collégial depuis 1995. Son ambition de pédagogue consiste à rendre les étudiants non seulement informés mais objectivement fiers de la culture dans laquelle ils vivent. Il souhaite aussi contribuer à les libérer de la relation aliénante d'amour-haine envers leur propre culture dont ils ont hérité de leurs ancêtres Canadiens français. Il a écrit dans le journal Le Québécois, est porte-parole du Mouvement Quiébec français dans le Bas-Saint-Laurent et milite organise, avec la Société d'action nationale de Rivière-du-Loup, les activités de la Journée nationale des patriotes et du Jour du drapeau.





Laissez un commentaire



2 commentaires

  • Bruno Deshaies Répondre

    26 octobre 2011

    CHANGER LA MENTALITÉ FÉDÉRALISTE DANS LE CERVEAU DES QUÉBÉCOIS
    26 octobre 2011, par Bruno Deshaies
    Puisque vous faites une référence à l'École de Montréal en histoire, j'aimerais rappeler à vos condisciples les adresses Internet du cours de Maurice Séguin en 1961-1962 (infra).
    Pour faire l'indépendance du Québec, selon moi, il va falloir plus que conquérir Québec (ville) mais toute la population québécoise à l'idée d'indépendance d'une façon majoritaire. « La souveraineté rampante » nous a assez cassé les pieds. Il ne faut pas en ajouter.
    À tous ceux et toutes celles qui veulent connaître l'histoire du Québec et comprendre le présent en vue d'une action sur l'avenir, j'aimerais signaler l'édition du cours de Maurice Séguin de 1961-1962 à l'Université de Montréal.
    INTRODUCTION À L’HISTOIRE DU CANADA
    SYNTHÈSE GÉNÉRALE DE L’ÉVOLUTION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DES DEUX CANADAS
    Maurice Séguin
    Cours HIST-585
    Université de Montréal
    Histoire des deux Canadas
    (Version 1961-1962)
    Le PREMIER Canada
    http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-1-5
    http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-2-5
    http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-3-5
    http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-4-5
    http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-5-5
    Le DEUXIÈME Canada
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-1-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-2-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-3-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-4-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-5-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-6-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-7-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-8-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-9-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-10-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-11-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-12-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-13-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-14-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-15-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-16-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-17-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-18-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-19-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-19a-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-20-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-21-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-22-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-23-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-24-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-25-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-26-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-27-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-28-29
    http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-29-29
    http://www.vigile.net/Le-Canada-actuel-30
    L'« Histoire de deux nationalismes au Canada » (Montréal, Guérin, Éditeur, 1997) mérite toute notre attention pour se sortir du dilemme Québec/Canada. « L'indépendance d'abord » est incontournable. Tout le reste, c'est du babillage. Il nous faut partager des idées communes fondamentales pour parvenir à l'indépendance nationale, ce qui suppose que les Québécois doivent enfin parvenir à parler d'une seule voix sur cette question. Un grand défi.
    Pour nous éclairer encore plus en profondeur, voir Les Normes de Maurice Séguin.
    Les Normes établies par Maurice Séguin
    (Version 1961-1962)

    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-1-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-2-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-3-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-4-20
    http://www.vigile.net/Les-Normes-en-histoire
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-6-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-7-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-8-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-9-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-10-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-11-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-12-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-13-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-14-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-15-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-15-20,18580
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-17-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-18-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-19-20
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-20-20
    CHRONIQUES SUPPLÉMENTAIRES
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-21
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19364
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19509
    http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19636
    SUITE…
    HISTOIRE DE DEUX NATIONALISMES AU CANADA http://www.rond-point.qc.ca/auteur/livres/nationalismes.html
    par MAURICE SÉGUIN
    http://www.guerin-editeur.qc.ca/Default.aspx
    UNE HISTOIRE DU QUÉBEC, VISION D'UN PROPHÈTE
    par MAURICE SÉGUIN
    Bruno DESHAIES, « LE PROBLÈME « NATIONAL » DES CANADIENS-FRANÇAIS. Nature du conflit national au Canada selon l’historien Maurice Séguin. » Dans Vigile.net, Chronique du jeudi, 22 juin 2000.
    http://archives.vigile.net/ds-deshaies/docs/00-6-22.html

  • Archives de Vigile Répondre

    26 octobre 2011

    M. Vallée,
    Vous me faite prendre conscience d’une réalité qui m’échappait relativement aux gens de Québec.
    Le P.Q. au lieu de se battre pour leur donner un amphithéâtre aurait dû mettre des efforts pour les amener à comprendre les avantages de l’indépendance dont ils seraient les premiers bénéficiaires.
    Je vois bien à la lumière de votre texte que notre marche vers l’indépendance passe par une évolution de la pensée des gens de Québec sur cette question. Elle est d’une importance capitale :o). Merci.