Comment bien rendre en français la formule phare de l'ère de la post-factuelle

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Réalités présumées






L’expression «alternative facts» se répand dans la langue politique. C’est Kellyanne Conway qui l’a popularisée. Comment bien rendre la notion en français?


Conway est cette incroyable porte-parole de l’incroyable président Trump. (Incroyable est utilisé ici non pas dans le sens figuré «qui possède un caractère extraordinaire» mais bien au sens propre, «qui n'est pas croyable; difficile à croire».)




L’expression a été traduite littéralement (de manière fautive) en français.




Dans un débat sur le train REM, de la Caisse de dépôt, le ministre des Finances Carlos Leitão a lancé: «Nous sommes dans la mouvance des faits alternatifs[Il] n'a jamais été question d'une taxe 450, c'est une invention pure et simple du Parti québécois.» Dimanche, le chef péquiste Jean-François Lisée a aussi utilisée l’expression: «M. Couillard essaie de créer ce qu’on appelle maintenant des "faits alternatifs".»




Bref, dans l’ère post-factuelle ou de la post-vérité, les «faits alternatifs» deviennent rapidement, dans la rhétorique politique, une insulte courante, un synonyme de mensonge, de foutaise.




Mais «faits alternatifs» c’est une traduction beaucoup trop littérale!




«Alternatif», en français, signifie «qui vient tour à tour, qui se répète à intervalles plus ou moins réguliers». (Voir le Trésor de la langue française informatisé)




La Banque de dépannage linguistique nous déconseille d’utiliser le substantif «alternative» dans son sens anglais: «On n’emploiera pas alternative pour désigner chacune des possibilités offertes à quelqu’un, le terme n’étant pas synonyme de choix, solution, possibilité, etc.»




J’ai donc lancé à quelques endroits (dont Facebook et l’émission Dutrizac) la question suivante : «Quelle serait la meilleure expression française pour exprimer cette notion?»


Versions péjoratives




Les réponses ont été légion! J’ai surtout reçu des propositions péjoratives. Le professeur et chroniqueur Pierre Martin lance: «Mensonges, bullshit et idioties font aussi très bien l'affaire!» Un traducteur et auditeur de Dutrizac, André Dupont, suggère: «vérité trumpeuse», car «cela l'avantage de renvoyer à l'instigateur de cette notion». Il propose aussi «fait factice». Un autre s’exclame : «Invention, le mot existe déjà et faut l'employer!». On me suggère aussi : «Fantaisies trumpeuses? Élucubrations opportunistes? Chimères réactionnaires?» Que pensez-vous de «faux vrais faits»?




Certains m’ont aussi suggéré «vérité inventée», «réalités de rechange», et même «alter-factualité». Plusieurs convergent vers «réalité parallèle» (c’est une des très bonnes suggestions, il faut le dire.)




Le linguiste Lionel Meney avance «contre-faits». Délicieux! Comme le clin d’œil du collègue et ami Michel Hébert, «faits accessoires». Vraiment drôle.




Neutres


Mais quelle notion française pourrait se retrouver dans la bouche de Kellyanne Conway dans une post-syncro, disons?




Lionel Meney a tenté de répondre à la question dans son blogue. En voici un extrait: «Dans l'esprit de son auteure [Mme Conway], il s'agissait certainement de dire qu'elle avait des "faits à opposer" à ceux des medias, en quelque sorte des "faits de rechange", comme il y a des "solutions de rechange" ou des "faits de substitution". Ce qui n'a fait qu'aggraver son cas. En effet, les faits sont têtus, comme on dit. Contrairement à une opinion, on ne peut pas les changer...»


Et vous, que suggérez-vous ?




 



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