Le pari de Martine Ouellet était d'intéresser nos concitoyens à l'indépendance en la remettant au cœur du débat public. De proposer une démarche claire menant à un vote rapide pour forcer chacun à se positionner personnellement et obliger tout le monde à s'intéresser à la question.
C'était une suite logique au Nouveau Mouvement pour le Québec (NMQ) et à son manifeste de 2011, Brisons l'impasse. Et je salue son engagement.
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Un obstacle restait à être franchi. Il fallait un jour ou l'autre qu'un arbitrage, qu'un débat prenne place entre les porteurs des deux grands courants de pensée politique de notre mouvement.
D'un côté, il y a le nationalisme, «qui assimile les luttes pour la sauvegarde de la nation aux luttes pour la sauvegarde de la langue et autres caractéristiques et valeurs religieuses, sociales ou culturelles». De l'autre, l'indépendantisme, qui est «une stratégie de conquête du pouvoir politique pour libérer la nation québécoise de toutes les tutelles». Il fallait un arbitrage, car comme l'écrivait Denis Monière en 2013 «une partie des difficultés d'orientations idéologiques et stratégiques du mouvement souverainiste résultent des oscillations entre ces deux courants de pensée qui s'enchevêtrent ou se combattent selon les conjonctures».
Pour toutes sortes de raisons, le PQ n'a pas tenu ce débat depuis... au moins 2005!
Alors, il a existé ailleurs. Il s'est fait depuis l'extérieur du PQ et naturellement contre le PQ. Que ce soit avec Québec solidaire, avec le NMQ, avec Option nationale, avec la Convergence nationale, avec les OUI-Québec, avec les Orphelins politiques ou Faut qu'on se parle, nous avons cherché et continuons de chercher à résoudre un nœud.
Bien sûr que cela n'a pas aidé à notre cohésion. Mais il était tout à fait légitime de chercher à faire exister ce débat par tous les moyens possible. Ainsi font les nations fortes et entêtées de leur avenir.
Maintenant, c'est fait. Cet arbitrage a eu lieu. Et il faut en prendre acte.
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Transparence totale : je ne suis pas un amant des thèses identitaires. Se retrancher dans l'identitaire, c'est pour moi se refuser le combat indépendantiste, c'est se lancer dans la survivance, c'est accepter sa maigre pitance dans le pays des autres, c'est possiblement être prêt à s'arrêter en chemin alors que l'identité la plus forte qu'on ne puisse jamais donner à un peuple réside dans sa liberté. Lui seul ensuite a le contrôle sur ce qu'il est et l'idée qu'il se fait de lui-même.
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Le résultat de vendredi dernier nous renvoie un miroir de nous-mêmes.
S'ils sont un reflet fidèle de ce que nous sommes, les 70 000 membres du PQ ont choisi le statu quo constitutionnel pour encore quatre ans de crainte de perdre le pouvoir provincial si on revendique trop le pouvoir national.
On peut voir cela de deux façons.
Ou bien cela n'a aucun sens, et alors c'est impossible de travailler ensemble et l'on déchire notre carte du Parti québécois, on pourfend son nouveau chef, on rejoint les rangs d'Option nationale, de Québec solidaire ou de mouvements comme Faut qu'on se parle.
Ou bien cela a un certain sens, et alors c'est possible de travailler ensemble et on œuvre à rendre Jean-François Lisée et le Parti québécois plus forts dans l'optique qu'un jour l'indépendance revienne forcément à l'avant-plan et dans l'espoir qu'à ce moment précis, on soit déjà en meilleure position pour avancer positivement sur la route de l'indépendance.
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J'ai beau avoir défendu Martine Ouellet et son programme becs et ongles depuis deux ans, maintenant que l'arbitrage a eu lieu, je suis incapable de me convaincre que la démarche de Jean-François Lisée n'a aucun sens.
Nous avons sans doute en ce moment le gouvernement le plus insensible à sa population de notre histoire. Ce gouvernement saccage les politiques modernes de l'État du Québec, il se montre à-plat-ventriste face au gouvernement fédéral et les œuvres centralisatrices de Trudeau fils.
Nous ne pouvons pas, par notre action, devenir les complices indirects de l'appauvrissement durable de nos concitoyens.
Aussi, il faut s'occuper de notre monde. La preuve que nos concitoyens ont besoin qu'on entende leurs préoccupations réside dans le fait que des groupes comme Faut qu'on se parle trouvent l'essence nécessaire pour asseoir leur action dans le temps et chercher à y donner des assises dans toutes nos régions. C'est très sain. Mais ça illustre la profondeur du trou duquel essaient de se sortir nos concitoyens et toute l'importance de s'occuper d'eux.
Il apparaît tout à fait logique, dans les circonstances, de faire porter la prochaine élection provinciale sur le seul bilan du gouvernement libéral, sur ses compressions en éducation, en santé, en environnement, ses surtaxes aux parents pour les services de garde, etc. Il faut rappeler nos inégalités croissantes, la stagnation des salaires, les fausses politiques de développement, l'intransigeance des banquiers Coiteux et Leitao dans leurs politiques sociales, etc. Les raisons sont multiples de s'opposer à Philippe Couillard et son gouvernement.
Notre devoir est de se fédérer et de fédérer tous ceux et celles qui veulent un meilleur Québec. Notre population est aux abois. Nous ne pouvons pas, par notre action, devenir les complices indirects de l'appauvrissement durable de nos concitoyens. Il faut être pour eux un phare, un espoir, une solution immédiate si on veut leur présenter une solution d'enrichissement collectif pérenne.
Enfin, en élisant Jean-François Lisée, les membres du PQ ont choisi une date pour la ligne de départ vers l'indépendance. C'est ainsi. Ce n'est pas la date que nous proposait Martine Ouellet, mais nous en avons bel et bien une. On peut passer les quatre prochaines années à morigéner sur le fait que ce sera en 2022 plutôt qu'en 2018, mais on peut aussi préparer dans l'intervalle le terrain pour un avenir libre et fécond.
Dans un tel cas, trois périodes sont devant nous. La première nous mène à la prochaine élection provinciale, la seconde est entre l'élection provinciale et l'élection fédérale de 2019 et la troisième période est entre 2019 et l'élection provinciale de 2022. Si on sait que la première période doit porter essentiellement sur le bilan libéral, on devine que la deuxième période devrait permettre à un gouvernement du Parti québécois de mettre en lumière la régionalisation économique et politique constante du Québec au sein du Canada et que la troisième période devrait servir à se mettre tous en formation en vue d'une élection portant sur l'indépendance du Québec et la démarche d'accession à l'indépendance.
Je pense que nous devons faire nous-mêmes la convergence qu'il nous faut sans attendre les petits partis
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La course ayant permis cet arbitrage entre nos deux grands courants d'idées et les appels à la bonne foi et à la convergence ayant été vulgairement refusés cette semaine par ON et QS, j'estime qu'il ne vaut plus la peine de chercher ailleurs qu'au Parti québécois.
Je pense que nous devons faire nous-mêmes la convergence qu'il nous faut sans attendre les petits partis qui se montrent aujourd'hui plus corporatistes que le corporatisme qu'ils dénonçaient jadis avec raison.
Je crois que le temps est venu, après toutes ces épuisantes années de luttes fratricides, de redevenir de puissants alliés, de recomposer notre puissance politique, de prendre à nouveau racine au sein du Parti québécois pour mieux y transformer le réel, pour mieux s'occuper de notre monde et mieux se remettre en selle vers l'indépendance du Québec.
Chacun doit y mettre du sien pour le pays. Ce n'est pas vrai que notre peuple est indécis et rêveur. Ce n'est pas vrai qu'il ne fait pas de sacrifices. Il fait face à l'adversité avec détermination et solidarité. À l'heure où il faut se préparer à défendre notre population assiégée par ce gouvernement, sommes-nous solidaires? Sommes-nous soudés?
Bien sûr que c'est difficile de converger. Surtout quand on a passé la majeure partie des dernières années à se regarder en chiens de faïence. Mais pensez-vous un instant que ce pays se fera sans effort, en claquant des doigts? Pensez-vous vraiment que sur la route qui nous y mènera tous les égos et les corporatismes politiques en sortiront intacts? À quel sacrifice ceux qui refusent aujourd'hui la convergence, que ce soit au nom de l'identité ou de l'indépendance, sont-ils prêts sinon au sacrifice de la prospérité de notre peuple et au sacrifice de notre propre liberté?
Je dis que devant ce peuple à la recherche de sa liberté, de sa prospérité et de sa pérennité, il ne doit exister aucun royaume.
Il appartient à chacun de nous de saisir le moment. Il faut se remettre ensemble. Il faut s'occuper de notre monde. Puis faire l'indépendance. Ce sont là trois objectifs nobles susceptibles de nous faire entrer dans la tombe comme des conquérants pour des générations à venir.
Au fond, se rallier reste encore le chemin le plus rapide.
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