Mario Dumont a bien raison quand il dit que, 25 ans plus tard, il est temps de «réparer l’erreur de 1982», puisqu’un quart de siècle après le rapatriement de la constitution et l’entrée en vigueur de la Charte canadienne des droits et libertés, le Québec n’a toujours pas accepté la légitimité politique du geste.
Encore faut-il corriger les bonnes erreurs. Sans quoi, on risque de nouveau l’échec et on replongera le Canada dans un syndrome post-traumatique qui l’empêchera pour longtemps de même penser à des modifications constitutionnelles.
Vingt-cinq ans après, le problème essentiel reste encore lié à la question linguistique.
Il faut se reporter au contexte de l’époque : Pierre Trudeau est au pouvoir dans ce qu’il sait être son dernier mandat et il n’a pas digéré la Loi 101, qu’il considère comme contraire aux valeurs canadiennes.
La Charte des droits a donc été écrite spécifiquement pour invalider certaines parties de la Loi 101. C’est d’ailleurs ce que la Cour suprême du Canada avait reconnu explicitement dans son arrêt Procureur général du Québec c. Quebec Protestant School Boards, en 1984 : «Vu l’époque où il a légiféré, et vu surtout la rédaction des art. 72 et 73 de la Loi 101, il saute aux yeux que le jeu combiné de ces deux derniers articles est apparu au constituant comme un archétype des régimes à réformer».
Il est ironique de constater que la section de la Charte des droits qui porte sur les droits linguistiques est presque aussi longue que celle qui porte sur l’ensemble des droits fondamentaux – soit 919 mots contre 1047 – ce qui est pour le moins inusité pour un document de cette nature.
La Charte prévoit aussi que la liberté de choix de la langue d’enseignement est la situation qui devrait être la normale partout au Canada. C’est une question qui, il faut le rappeler, a été au cœur même de tous les débats linguistiques des années 1960 et 1970.
Le Québec n’est exempté de cette disposition que par une disposition transitoire qui disparaîtra de la constitution le jour où le gouvernement du Québec accepterait de rejoindre la norme canadienne.
C’était, ni plus ni moins, qu’une façon d’inscrire dans la constitution canadienne que la voie qu’avait choisie le Québec pour régler le dossier linguistique était contraire aux valeurs canadiennes. C’est l’une des choses qui doit être changée pour que le Québec puisse accepter la constitution de 1982.
Après tout, aujourd’hui, il n’y a plus de politiciens au Canada, que ce soit au niveau fédéral ou provincial, qui affirment que la Loi 101 soit contraire aux valeurs canadiennes. Alors il n’y a aucune raison pour que cela doive être consigné à tout jamais dans la constitution.
En passant, notons que les dispositions sur la langue d’affichage de la Loi 101 ont été invalidées par la Cour suprême en application de la Charte québécoise des droits. Cela ne fait donc pas partie des raisons pour lesquelles le Québec n’a pas soigné la constitution de 1982.
L’autre correction à apporter touche la formule d’amendement. Peu après le référendum de 1995, le Parlement fédéral a admis de façon implicite l’erreur de 1982 en passant une loi redonnant au Québec – ainsi qu’à l’Ontario et à la Colombie-Britannique – un droit de veto sur les amendements futurs. On devrait faire de même dans le texte constitutionnel lui-même.
M. Dumont, en fin de semaine, parlait de la limitation du pouvoir fédéral de dépenser. C’est une vieille demande du Québec, cela est vrai. Elle faisait partie des cinq conditions de Meech. Elle était même celle qui était la plus importante selon Robert Bourassa. Mais elle ne fait pas partie du contentieux de 1982.
M. Dumont peut bien y voir la clé d’une reprise des négociations constitutionnelles, mais cela ne serait aucunement le moyen de régler un contentieux Québec-Canada qui dure depuis 25 ans. Si on veut régler, il faudra s’attaquer d’abord aux questions linguistiques.
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