L’été dernier, le quotidien britannique The Telegraph a publié un article sur notre pays. Les deux premières phrases se lisaient comme suit: «Le Canada, à l’exception du Québec français, est en train de devenir la première nation woke du monde. Le wokisme est de plus en plus son identité.»
J’ai repensé à ce papier en prenant connaissance de la plus récente controverse concernant la loi 21. Une professeure dans une école anglaise de l’Outaouais a dû cesser d’enseigner car elle refusait d’enlever son voile.
Les critiques n’ont pas tardé. Des pancartes de soutien ont été ont été posées aux abords de l’école et des parents ont dénoncé la chose. L’affaire a fait réagir la classe politique, notamment Justin Trudeau. «Personne au Canada ne devrait perdre son emploi à cause de ce qu’il porte ou de ses croyances religieuses», a déclaré le premier ministre.
Malheureusement, aucun politicien, dans ses réactions, ne s’est intéressé au bien-être des enfants, à leur liberté de conscience et à celle de leurs parents. Pourtant, c’est précisément ce qui est en cause. La laïcité protège l’école de l’influence religieuse, un choix collectif que les Québécois ont fait en sortant la religion des salles de classe à partir de la Révolution tranquille. Pour le bénéfice des enfants de toutes les religions, incluant les athées, les professeurs s’abstiennent d’afficher leur religion pendant leur travail.
Cette approche fait de l’éducation un terrain neutre, un endroit où l’on étudie, protégé de l’idéologie religieuse. À l’école, on s’éduque, on apprend la langue commune, on assimile l’histoire et les valeurs de la nation. Pour prendre un exemple personnel, il ne me viendrait jamais à l’idée, quand je donne mes cours, d’arborer un signe qui indiquerait la religion que je pratique. Celle-ci est partagée par certains élèves, mais pas tous. En montrant mes couleurs, comment pourrais-je prétendre être le professeur de tous les élèves et les juger équitablement entre eux? La religion relève d’une vision du monde et du sacré, ce n’est pas une banale opinion. L’apparence de neutralité religieuse est importante quand on est en situation d’autorité.
En somme, la laïcité protège la neutralité de l’école de même que la liberté de conscience des élèves. Elle constitue par le fait même une mesure inclusive et égalitariste.
Cela n’a pas empêché Kyle Seeback, un député conservateur ontarien, de qualifier l’affaire de «honte absolue», ajoutant qu’il ne pouvait plus, «en bonne conscience, maintenir le silence».
Si monsieur Seeback tient absolument à dénoncer l’intolérance, il n’a qu’à se tourner vers sa propre province. L’Ontario et Ottawa ont donné des centaines de milliers de dollars à la Muslim Association of Canada (MAC), un groupe islamiste qui invite des prédicateurs haineux à ses activités et qui a eu des liens, dans le passé, avec des organisations terroristes.
La MAC a pour mandat d’éduquer les élèves ontariens sur l'«islamophobie» en préparant des vidéos. Celles-ci visent à empêcher toute critique de l’islam et suinte le prosélytisme. Dans l’une d’elles, on nous apprend que les chrétiens, les sionistes et les féministes ont comploté pour mettre sur pied une «industrie de l’islamophobie». Quand les vidéos ont été mises en ligne, elles ont été louangées dans plusieurs médias anglophones.
Le multiculturalisme canadien est devenu complètement fou. Cette idéologie a dévoré le sens moral de nos compatriotes anglophones et, quand nous refusons de sombrer avec eux dans cette folie, ils nous accusent d’intolérance.