Les témoignages d’Éric Caire, de François Bonardel et de Geneviève Guilbault devant la commission Gallant ont démontré hors de tout doute à quel point la gouvernance de l’État de la part du gouvernement Legault a été sérieusement malmenée eu égard au chaos suscité par la saga du dossier SAAQclic, révélant notamment des manques flagrants de communication entre les fonctionnaires et le cabinet des ministres. Ou l’information aux ministres ne se rendaient pas à leur cabinet ou ils ne jugeaient pas opportun de les révéler au grand jour, arguant, dans la foulée des membres du CA de la SAAQ, qu’il était « normal » qu’un projet d’une telle ampleur subisse des dépassements de coûts en cours de réalisation.
Par ailleurs, la comparution de l’ex-président du Conseil du Trésor de 2018 à 2020, Christian Dubé n’a rien révélé sinon qu’à son arrivée en poste, le projet CASA/SAAQclic ne figurait pas dans le cahier de breffage. Pour sa part, la présidente du Conseil du trésor actuelle, Sonia LeBel, aurait été informée dès 2020 que le projet SAAQclic ne livrerait pas d’économies pour l’État comme prévu en raison d’un report important tout en arguant que les pleins pouvoirs de surveillance relevaient de son collègue responsable du Numérique, Éric Caire, et qu’elle ne connaissait pas les coûts du projet ni les économies attendues. Enfin tout au long de son témoignage, la présidente du Conseil du trésor s’est déresponsabilisée du fiasco, tout en se défendant d’avoir été «passive» en plaidant que son rôle se limitait à une vue d’ensemble et «globale» des programmes.
Le témoignage du premier ministre, François Legault, était bien sûr fort attendu. D’entrée de jeu, le premier ministre s’est dissocié de toute imputabilité en lien avec le chaos SAAQclic n’étant informé des coûts et dépassements de 500 millions qu’au moment du rapport de la vérificatrice générale en février 2025, écorchant au passage le gouvernement Couillard pour son laxisme lors de la signature du contrat en 2017 eu égard à son silence sur les pénalités encourues dans le cas de dépassements de coûts, ce que M. Legault a qualifié de « pas normal ». L’interrogatoire s’est ensuite étendue sur les distinctions à apporter entre le contrat de 458 millions$ et le projet de 682 millions$, ce qui vient contrecarrer à raison une augmentation des coûts de 224 millions. Enfin François Legault a admis que les premiers imputables dans ce dossier étaient les ministres des Transports (sans les nommer), François Bonardel et Geneviève Guilbault, pour ne pas s’être informés suffisamment de la situation financière du projet, et ne pas l’avoir informé de ce fiasco à la SAAQ, une société d’État dont ils sont ou étaient responsables.
Tout au long de cette saga, le commissaire et les procureurs ont tenté d’obtenir ce que les témoins savaient qu’ils n’ont pas révélé et ce qu’ils ignoraient ce qu’on ne leur a pas révélé. Or un dénominateur commun a prédominé au fur et à mesure des témoignages des ministres ayant été appelés à témoigner à la commission, à savoir l’opacité des communications entre les fonctionnaires et les ministres ou clairement une absence de communication entre les différents intervenants sur l’état des dossiers, notamment sur les coûts de dépassements et les reports des échéances. En termes clairs, il ressort des travaux de cette commission jusqu’à maintenant que la gouvernance de l’État dans le dossier SAAQclic a été durement mise à mal. Des solutions de redressement doivent être mises de l’avant dans les meilleurs délais à l’égard des sociétés d’État. Il en va de la crédibilité et de l’imputabilité de ce gouvernement durement entachées par son laxisme, voire sa nonchalance dans le suivi du chaos SAAQclic.
Henri Marineau, Québec
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