Nous pouvions lire dans votre édition du 6 juin que le ministère de l'Éducation est en train d'élaborer, dans la foulée du rapport Berger, une nouvelle politique en évaluation de la qualité de la langue dans l'épreuve uniforme de français au collégial. Cette nouvelle m'incite à réagir personnellement et immédiatement dans un premier temps, avant de laisser les membres du collégial de notre association émettre un avis officiel à ce sujet.
Le rapport Berger, qui préconise de renoncer à l'évaluation quantitative des erreurs de syntaxe, de ponctuation et d'orthographe pour évaluer globalement ces critères, me semble ouvrir la porte à l'approximation et à une trop grande subjectivité. On y met en avant l'aspect «punitif» de la méthode actuelle, mais elle a pourtant plusieurs mérites: elle évite de laisser au seul jugement personnel de l'enseignant l'évaluation de ces critères, assure une certaine rigueur dans la correction et garantit que les compétences de l'étudiant en écriture sont bien réelles et vérifiables.
Il faut bien l'admettre, c'est la capacité d'utiliser adéquatement les règles de grammaire et de ponctuation et d'employer un vocabulaire juste et varié qui conditionne l'expression d'une pensée claire, structurée et compréhensible. Tous les enseignants de français ont pu vérifier que la qualité de la langue utilisée est la plupart du temps le reflet de la qualité d'ensemble d'un texte. Il est donc rarissime que les seuls critères touchant la langue suffisent à déterminer l'échec ou la réussite. Ils ne font en fait que confirmer la qualité ou la médiocrité de la performance.
Le taux d'échec actuel à cette épreuve, qui est de 12,9 %, n'est pas suffisamment alarmant pour remettre en cause la méthode actuelle. Il reflète tout à fait le pourcentage de jeunes qui, à la sortie du cégep, n'ont pas développé les compétences suffisantes en langue écrite pour être admis à l'université, là où ces compétences seront sollicitées de façon encore plus systématique. L'université blâme souvent le cégep, l'accusant de ne pas faire en sorte de garantir que ses diplômés aient acquis les règles du fonctionnement de la langue et soient en mesure de les appliquer. Il faut donc tout mettre en oeuvre pour corriger cette situation.
Il serait peut-être nécessaire, cependant, d'adapter la méthode «comptable» actuelle en y introduisant une tolérance pour la même erreur de ponctuation ou de syntaxe répétée à de multiples reprises dans un texte. Et c'est là que le jugement du correcteur pourrait entrer en jeu, de façon à ne pas punir exagérément un étudiant qui ne maîtrise pas une notion particulière.
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Arlette Pilote, Présidente de l'Association québécoise des professeurs de français
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