Québec -- Le gouvernement Charest n'a pas mis «l'économie d'abord» en mettant en avant le projet de loi 9 contre les poursuites abusives, estiment la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) et le Conseil du patronat (CPQ).
Le projet de loi, déposé le 7 avril dernier pour une seconde fois (dans sa première mouture, l'automne dernier, il était mort au feuilleton), vise à empêcher les grandes entreprises de se servir des tribunaux pour faire taire des citoyens ou des groupes qui les dénoncent sur la place publique.
Dans une lettre ouverte hier, la présidente de la FCCQ, Françoise Bertrand, a condamné le gouvernement, qui a procédé cette semaine à l'adoption de principe du projet de loi, avec l'appui des partis d'opposition. «"L'économie d'abord", nous a-t-on dit en décembre dernier. Vraiment?» écrit-elle.
Aux yeux de Mme Bertrand, la loi contre les poursuites abusives est un «irritant» dont les entreprises n'ont pas besoin en période de difficultés économiques. À ses yeux, une telle loi empêchera les entreprises de poursuivre en diffamation «des groupes ou des personnes qui, volontairement et sciemment, tiennent des propos ayant pour seul but de nuire à la réputation de ces mêmes entreprises».
Selon Mme Bertrand, la ministre de la Justice, Kathleen Weil, erre lorsqu'elle parle d'un consensus autour de ce projet de loi. «Ce consensus n'existe pas», affirme-t-elle en évoquant l'opposition du Conseil du patronat et du Barreau du Québec, qui se sont déjà exprimés en ce sens en commission parlementaire à l'automne 2008.
Avantages, groupuscules
Dans une autre lettre adressée à Mme Weil en mars cosignée avec Daniel Audet, vice-président du CPQ, Mme Bertrand déplorait le fait que le Québec se donne la loi «la plus sévère au monde» qui profitera, ajoutait-elle, surtout aux «groupuscules» qui s'opposent «à tout projet de développement économique» tel le barrage hydroélectrique la Romaine ou les travaux de modernisation des infrastructures.
Selon Mme Bertrand et M. Audet, il n'y a «ni urgence ni épidémie de ce genre de poursuites». Si jamais le gouvernement refusait de laisser tomber ce projet de loi, la FCCQ et le CPQ proposent de retirer plusieurs dispositions qui, à leurs yeux, pourraient «nuire au Québec, donnant l'image d'une juridiction où les administrateurs et dirigeants sont soumis à un fardeau de responsabilités plus élevé qu'ailleurs».
Jointe récemment, la vice-présidente de la FCCQ, Caroline St-Jacques, a admis qu'une poursuite comme celle que la minière Barrick Gold avait intentée contre les Éditions Écosociété, laquelle a publié l'essai Noir Canada, était bel et bien une poursuite-bâillon. Mais «on ne change pas la loi pour un cas», a-t-elle fait valoir. Selon elle, de toute façon, le code de procédure civile contient tout ce qu'il faut pour que les juges puissent rejeter sommairement une poursuite frivole et sans fondement.
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