L’auteur de ce court billet revient sur la substance d’un ancien texte qui a provoqué de mauvaises ondes sur Vigile. J’ai demandé au Webmestre de retirer mon dernier texte qui appelait les indépendantistes à se rapprocher des communautés culturelles issues du Maghreb et du Moyen-Orient. Ayant eu le malheur d’employer l’expression «communauté musulmane» j’ai provoqué – bien malgré moi – une tempête dans un verre d’eau. Retour sur les origines d’un simple constat.
Le Québec est une colonie faisant partie de nébuleuse de la Dynastie des Windsor - autrefois appelée maison de Saxe-Cobourg-Gotha – et toujours dépendante d’un Dominion de cette couronne. Cette dynastie est la plus puissante sur la terre, avec celle des Saoud qui est assise sur près du quart des réserves prouvées de pétrole dans le monde. La troisième grande dynastie est celle des banquiers Rothschild. Il s’agit de trois dynasties qui se sont partagé le Moyen-Orient il y a près d’un siècle. C’est dans le sillage de cette alliance maudite que sont nées les nébuleuses wahhabites d’un fondamentalisme qui est loin de faire l’unanimité dans le monde musulman.
Les affinités électives
Le Québec et certaines petites nations – à l’instar du Liban, de la Kabylie ou de la Lybie – est sous la coupe de cette alliance maudite. S’il est une donne du mondialisme à laquelle nous ne pouvons échapper, c’est bien les effets pervers d’un néocolonialisme qui règne toujours sur plusieurs hémisphères.
L’empire britannique est celui qui aura le mieux compris qu’il fallait «diviser pour régner». C’est James Balfour – alors ministre britannique des Affaires Étrangères – qui transfère, rien de moins, la propriété des terres palestiniennes entre les mains de Lord Lionel Walter Rothschild en 1917. La déclaration de Balfour coïncide avec la Révolution bolchévique en Russie et le traité de Versailles (1919) qui annoncera la création d’une Société des Nations faisant le jeu des alliés de la couronne britannique. C’est d’ailleurs à cette époque que l’Allemagne se voit dépecée de ses colonies et doit verser un immense tribut aux puissances alliées.
Depuis lors, les puissances alliées à l’axe britannique se sont partagé le monde en le dépeçant et en recomposant les nations au gré d’une manipulation continue des conflits internes propres à chaque culture et aux pratiques religieuses en lice. Le Liban a fait les frais de guerres internes qui auront été fomentées par les services secrets des puissances environnantes. Malgré tout, les forces chrétiennes derrière le Général Aoun et la mouvance islamique (non pas islamiste) du Hezbollah signent une entente historique en 2006, près d’un siècle après le Traité de Balfour. Que s’est-il passé ?
Un nouvel axe en construction
La poignée de main entre le général Michel Aoun et le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah n’est pas fortuite. À l’instar du général De Gaule, Michel Aoun aura compris qu’il fallait tendre la main au monde musulman afin de provoquer une faille sismique dans l’axe des forces de l’alliance atlantique. Bien plus qu’un geste tactique ou symbolique, cette tentative de concorde entre chrétien et musulman représente une cassure épistémologique qui menace le cœur même de la théorie du Choc des civilisations.
L’odieuse théorie – élaborée par l’Américain Samuel Huntington autour de 1996 – vise d’abord et avant tout à «remanier l’Ordre du Monde via un Conflit de Civilisations» qui permettra de créer un nouvel ennemi public à la face du monde occidental. Ainsi, suite à l’effondrement du bloc soviétique, la puissance anglo-saxonne ne peut poursuivre son imperium qu’en désignant un nouveau challenger, en accord avec sa vision dichotomique du monde. La géopolitique du monde se fonctionnera plus à partir de clivages «politiques», mais bien sur la base d’un «conflit de civilisation» s’articulant à partir de revendications culturelles et religieuses.
Cet écran de fumée servira à repositionner l’axe atlantiste sur le pourtour du Moyen-Orient, autour de la Russie et aux abords d’une Afrique qui sera dépecée à nouveau dans un avenir proche. Curieusement, le monde catholique aura passé près d’un demi-millénaire à se quereller avec une faction protestante gagnant un pouvoir qui est sans égal au moment d’écrire ces quelques lignes. Les musulmans ayant fait les frais de l’empire britannique – avec la pulvérisation de l’Empire Ottoman par la mise en place du gouvernement des «Jeunes Turcs» et la consolidation de la Maison Saoud – ils deviendront les faire-valoir d’une guerre à géométrie variable qui profite à l’Empire mondialiste.
À la croisée des civilisations
Plusieurs islamophobes qui sévissent dans les médias – ici ou ailleurs – font fi d’oublier que chrétiens et musulmans ont vécu des rapports harmonieux au Liban, au Maroc et ailleurs sur le pourtour de la Méditerranée pendant plusieurs siècles. Les dynasties berbères ont régné pendant une longue période en Espagne et le Royaume d’Al-Andalus sera le théâtre d’échanges culturels et scientifiques féconds entre les civilisations du Livre (Juifs, Chrétiens et Musulmans). Par ailleurs, il ne faudrait pas oublier les racines berbères de certaines tribus juives ayant fourni un important contingent de mercenaires aux insurgés du Maghreb qui se révoltent contre une domination arabe déjà solidement implantée il y a plus de 1200 ans.
C’est l’amour berbère de la liberté qui permit – sans doute – que fleurisse ce génie proprement Andalous qui n’a pas d’équivalent dans le monde occidental. Toutefois, le Califat de Baghdad contribua lui aussi à l’essor culturel de cette partie du monde et c’est sous le règne d’Abb al-Rahman (2e partie du 8e siècle) que les intérêts berbères et arabes sont finalement réconciliés pour que fleurisse une civilisation hybride entre l’occident et l’orient. Contrairement à d’autres conquérants, les gouverneurs de cet Islam ibérique n’ont JAMAIS imposé leur foi aux conquis. Les jardins du Généralife, à l’Alhambra de Grenade, témoignent du génie d’une civilisation capable de faire dialoguer architecture, aménagement du territoire et science de l’irrigation. Il n’existe, nulle part ailleurs, d’ouvrage d’aménagement si somptueux dans le monde occidental.
Un effort dialogal
Difficile tâche que de faire converger des points de vue (non pas des intérêts contrairement à ce qu’affirment mes détracteurs) qui recoupent une aussi vaste conscience de l’espace-temps. Je reviendrai, ici et ailleurs, proposer des pistes de réflexion sur les aspects culturelles, géopolitiques ou historiques d’un dialogue des civilisations qui n’est pas une idée contemporaine. Il importe de souligner que les puissances d’argent et de pouvoir se servent des traits culturels et religieux pour mousser des conflits qui fonctionnent – invariablement – sous faux drapeaux. Il est tout de même consternant de lire à longueur de journée des diatribes contre le monde musulman – et sa supposé velléité de conquête du territoire québécois – alors que les principaux intéressés osent À PEINE prendre la parole dans nos médias.
Pendant que les pleutres font le sale boulot de mousser ce prétendu «conflit de civilisation», rien n’est dit à propos des réels lobbies du pouvoir qui passent leur temps à décrire le Québec comme une terre d’absolutisme francophone sur toutes les tribunes américaines. S’il y a bien des terroristes qui ont frappé au Québec, ce sont les factions des Warriors instrumentées par l’empire durant le conflit d’Oka, il y a deux décennies. Mais, lorsqu’une femme de confessionnalité musulmane ose se promener avec un simple hijab nos vierges offensées hurlent à l’agression islamiste. Les quasi 500 000 citoyens issus du Maghreb et du Moyen-Orient – et principalement de confessionnalité musulmane – ne sont pas des fauteurs de troubles, ils paient leurs impôts comme tout le monde et plusieurs de leurs compatriotes savent ce que ça signifie être un «porteur d’eau». Comme nous les Québécois. J’y reviendrai en temps et lieu. D’ici là, j’espère que les Mohamed Lofti de ce monde sortiront de leur mutisme pour m’aider, un tant soit peu, à rétablir les faits sur ce site.