En cette magnifique fin de semaine printanière, l'auguste ville de Laval fut bénie d'entre toutes les principautés du grand royaume québécois.
Car elle fut choisie par la longue lignée des Libéraux pour être l'hôte d'un événement grandiose et rarissime: l'autoproclamation d'un «bâtisseur»!
Si, en 1804, Paris a eu droit à son empereur autoproclamé, les livres d'histoire retiendront qu'en l'an de grâce 2009, Laval fut nantie du sacre autoproclamé du très digne héritier des Godbout, Lesage et Bourassa. Un véritable sacre du printemps...
Et les historiens n'ont qu'à bien se tenir!
Voici donc comment l'onction libérale effaça d'un trait tous les mauvais souvenirs laissés par les pertes de la Caisse de dépôt, les questions portant sur l'«éthique» des uns et des autres, la récession, des clowns «thérapeutiques» soudainement embarrassants, un président de la SODEC par trop aristocratique, des cours d'histoire «dénationalisés», de grands hôpitaux non construits. Et tutti quanti.
Bref, un «bâtisseur» vous est né...
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Bon. Sur une note, disons, plus sérieuse, voici donc la nouvelle:
Voir: http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/politique/200905/23/01-859292-jean-charest-sacre-grand-batisseur-par-le-plq.php
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Le problème ici étant que le titre de «bâtisseur» émérite doit habituellement et justement se «mériter».
Et que ce mérite vient habituellement de la RECONNAISSANCE des autres pour services et devoirs ACCOMPLIS. Pour projets BÂTIS.
Et non pas pour des idées projetées dans un horizon lointain.
C'est pourquoi s'autoproclamer «bâtisseur» avant d'avoir bâti risque de provoquer le scepticisme plutôt que de susciter l'admiration...
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Surtout - du moins, si vous me demandez mon très humble avis -, cette autoproclamation semble aussi trahir un certain sentiment de hâte chez le premier ministre.
Comme s'il était tout à coup pressé de tenter de définir son propre héritage.
Comme si, fort d'être le seul premier ministre depuis Maurice Duplessis à avoir aligné trois mandats consécutifs, il tentait maintenant de se préparer une sortie la plus élégante possible en ajoutant à cet exploit le titre fort prisé de «bâtisseur» du Québec.
Mais de fait, même s'il est évident que personne ne le pousse vers la porte, il reste que ce week-end, M. Charest donnait l'impression d'un premier ministre particulièrement impatient de rédiger son testament politique.
Qu'il s'en serve dans les prochains mois. Ou en quelque part au cours des deux prochaines années...
Car après tout, c'est un fait que dans les coulisses, on parle de plus en plus de sa succession éventuelle...
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Mais disons aussi que ce n'est PAS la première fois que M. Charest se sert du thème des «bâtisseurs» en l'associant au PLQ.
Il le faisait déjà pendant la campagne électorale de 2003, où il rappelait «la très grande tradition libérale de bâtisseur de société» en citant huit réalisations du Québec moderne, qui allait du vote des femmes à la nationalisation de l'électricité, des systèmes publics de santé et d'éducation au français, langue officielle. Voir:
http://www.premier.gouv.qc.ca/salle-de-presse/communiques/2008/juin/2008-06-18.shtml
La différence notoire étant qu'aujourd'hui, le voilà ajoutant soudainement son propre nom à la liste...
Le sacre d'un bâtisseur
C'est pourquoi s'autoproclamer «bâtisseur» avant d'avoir bâti risque de provoquer le scepticisme plutôt que de susciter l'admiration...
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