Le cours d'éthique et de culture religieuse qui sera dispensé sans exception à tous les élèves du primaire et du secondaire dès l'automne 2008, suscite pour quelques personnes de vives résistances. Plusieurs personnes affirment que les droits des parents ne sont pas respectés.
Certes, il s'avère légitime que certains groupes, en particulier très religieux, puissent considérer ce cours comme une menace à leurs convictions profondes. Il n'est alors guère surprenant que ceux-ci s'opposent au processus de déconfessionnalisation et défendent le statu quo représenté par le régime d'option, dernier vestige d'une école publique confessionnelle. Ces groupes estiment que la liberté religieuse, un droit fondamental, est lésée par le projet pédagogique prochainement en vigueur. Est-ce bien le cas?
Pour justifier leur point de vue, ces gens prétendent que le gouvernement québécois a sciemment transformé l'article 41 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Ils rappellent le droit conféré par cet article qui s'énonçait ainsi avant la modification par la loi 95 en juin 2005: «Les parents ou les personnes qui en tiennent lieu ont le droit d'exiger que, dans les établissements d'enseignement publics, leurs enfants reçoivent un enseignement religieux ou moral conforme à leurs convictions, dans le cadre de programmes prévus par la loi.»
Après la modification adoptée avec la loi 95, l'article 41 stipule désormais: «Les parents ou les personnes qui en tiennent lieu ont le droit d'assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs convictions, dans le respect des droits de leurs enfants et de l'intérêt de ceux-ci.»
Respect des droits
Cette modification ne résulte pas d'un caprice du législateur, mais correspond au respect des droits de tous les parents croyants ou non. En effet, l'amendement de l'article 93 de la Charte canadienne qui garantissait le droit des parents catholiques et protestants, a été fait pour transformer en 1998 les commissions scolaires confessionnelles en commissions scolaires linguistiques.
En 2000, avec la loi 118, la déconfessionalisation des écoles ne permettait plus l'octroi du privilège d'enseignement confessionnel public tant aux catholiques qu'aux protestants. De plus, de tels privilèges ne correspondent plus vraiment à l'évolution du droit international comme le rappelle la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse dans un avis publié en juin 2005 concernant la loi 95. La Commission estime que l'article 18 par. 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques «ne reconnaît aucun droit d'exiger que les établissements publics dispensent un enseignement religieux. La liberté reconnue par l'article 18 est avant tout une liberté négative, celle de ne pas subir d'endoctrinement».
Par ailleurs, la Commission cite le comité de droits de l'homme de l'ONU qui affirme quant à ce paragraphe 4, ce qui suit: «Le paragraphe 4 de l'article 18 permet d'enseigner des sujets tels que l'histoire générale des religions et des idées dans les établissement publics, à condition que cet enseignement soit dispensé de façon neutre et objective.»
Mesure transitoire
Dans ce contexte, l'utilisation des clauses dérogatoires pour maintenir le privilège des catholiques et des protestants s'explique comme une mesure de transition vers un autre régime scolaire, respectueux des droits de tous les parents. Certaines personnes croient que le recours aux clauses dérogatoires peut être renouvelé indéfiniment. La Commission, en s'appuyant sur l'article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, affirme qu'une clause dérogatoire demeure toujours une mesure exceptionnelle.
Une clause dérogatoire ne doit pas entraîner une forme de discrimination fondée sur la religion par exemple. La Commission cite à nouveau le comité onusien des droits de l'homme. Il rappelle que «le fait qu'une religion est reconnue en tant que religion d'État ou qu'elle est établie en tant que religion officielle ou traditionnelle, ou que ses adeptes représentent la majorité de la population, ne doit porter en rien atteinte à la jouissance de l'un des quelconques des droits garantis par le Pacte [international relatif aux droits civils et politiques] ni entraîner une discrimination quelconque contre les adeptes d'autres religions ou les non-croyants». En d'autres termes, selon le droit international, il se révèle impossible d'invoquer la majorité pour justifier le maintien d'un cours confessionnel puisque cela discriminerait les personnes et les groupes sur la base de l'appartenance religieuse.
Le cours d'éthique et de culture religieuse respecte tant le droit tant international que les chartes. Dans une perspective de laïcité ouverte, ce cours vise à promouvoir une culture publique commune, une meilleure compréhension du phénomène religieux et un dialogue afin de favoriser un mieux-vivre collectif. Il ne s'agit pas d'un cours sur les religions, mais sur le phénomène religieux. Un des objectifs est de transmettre le patrimoine historique religieux, particulièrement catholique et protestant, à tous les enfants. Cette transmission s'effectue selon une approche culturelle et non confessionnelle.
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Patrice Perreault, Bibliste
- source
Éthique et culture religieuse
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