Le gouvernement Couillard a réussi un tour du chapeau avec sa loi sur la neutralité religieuse, imposant que la livraison et la réception de services publics se fassent à visage découvert. Largement jugée insuffisante au Québec, elle a suscité un tollé dans le reste du Canada et provoqué la division dans les rangs libéraux !
Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est la décision de la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, d’assujettir les municipalités et les sociétés de transport à la législation.
Alors que personne ne l’avait demandé.
Pourquoi ainsi modifier le projet de loi deux ans après son dépôt ?
Obliger les femmes qui ont le visage voilé à se découvrir au moment d’embarquer dans l’autobus, c’est ce qu’on aurait pu imaginer de plus difficile à appliquer.
À se demander s’il ne s’agit pas d’une opération d’autosabotage.
Philippe Couillard, qui aime distribuer les accusations « d’intolérance » à tout vent, se retrouve dépeint comme un raciste par les Ontariens. C’est le retour du boomerang !
À l’interne, le gouvernement a sapé en moins de temps qu’il n’en faut pour dire « burqa » l’effet rassembleur qu’avait eu le généreux remaniement.
MALAISE LIBÉRAL
Un élu libéral mécontent a confié que l’application de la loi provoquera un « malheureux amalgame » à l’égard des femmes musulmanes, que « ça les stigmatise ».
« Ça n’a pas été des discussions agréables », a-t-il admis entre deux profonds soupirs, ajoutant que « ça aurait pu être mieux géré ».
Un autre membre de l’équipe libérale affirme que « les députés ont été surpris » lorsqu’ils ont compris lors de l’adoption la semaine dernière que les chauffeurs d’autobus devraient jouer à la police du visage caché.
MAIS POURQUOI ?
Mme Vallée l’avait pourtant dit en déposant ses amendements le 15 août. Ont-ils cru à une joke ? Ou à un seul ballon d’essai ? Il faut dire qu’à ce moment-là, elle avait refusé de commenter « les cas d’espèce ».
« Ça dérange énormément les députés », a ajouté cette source.
Visiblement, il y avait un tel inconfort dans les troupes que la ministre a accepté de perdre la face et de reculer sur un aspect.
Même si elle avait dit le contraire à maintes reprises, après avoir découvert leur visage pour s’identifier au chauffeur, les personnes voilées pourront se recouvrir pendant le reste du trajet.
Au bureau de la ministre, on explique avoir seulement voulu éviter les cas d’exception. Pourquoi permettre le voile intégral, ou le visage caché par quoi que ce soit dans les autobus et les bibliothèques, si on l’exclut dans les hôpitaux ou la SAAQ ?
Le député de la circonscription anglophone de D’Arcy-McGee, David Birnbaum, a confié à The Gazette que ce n’est pas de gaieté de cœur qu’il a voté en faveur de cette loi.
La différence québécoise semble plus difficile à assumer, pour certains, que la tolérance aux symboles d’asservissement de la femme.