Les députés feront leur rentrée à l'Assemblée nationale mardi. Jean Charest y sera, appuyé par un nouveau chef de cabinet et un Conseil des ministres élargi. Son objectif sera de «regagner la confiance des Québécois». Vaste programme qu'il ne pourra accomplir que s'il se met à l'écoute de ses concitoyens.
Rumeurs et spéculations ont fait état ces derniers mois d'un départ possible de Jean Charest. On disait que son honneur lavé par la commission Bastarache, il passerait la main. On peut imaginer qu'après l'annus horribilis que fut 2010, il ait pu en avoir la tentation. Mais il est un politicien combatif. Il sait ne pouvoir avoir de sortie honorable sans d'abord tout faire pour rétablir le lien de confiance avec les Québécois. Et qui sait, s'il y arrivait, peut-être voudrait-il prolonger sa carrière de premier ministre...
Avec seulement deux ans écoulés à son mandat, Jean Charest mise d'abord sur le temps qui lui reste, soit deux, voire trois autres années. Les élections sont «à quelques éternités», disait-il il y a quelques semaines. La question est de savoir comment utiliser ce précieux temps. Depuis déjà un an bien compté, le Parti libéral est bon second derrière le Parti québécois, sans qu'aucun mouvement significatif de l'opinion publique ait pu être décelé. Il lui faudra au moins un an pour surmonter l'insatisfaction des Québécois, surtout celle des francophones qui lui ont tourné le dos à un point que certains qualifient d'irrémédiable.
Ces dernières semaines, le premier ministre et certains de ses ministres ont entrepris d'envoyer des signaux annonciateurs d'un virage, adoptant ainsi un ton plus conciliant dans l'explosif dossier des gaz de schiste. Surpris, certains ont cru le gouvernement disposé à décréter un moratoire sur l'exploration et l'exploitation de ces gaz.
N'imaginons surtout pas le gouvernement prêt à abdiquer totalement devant les revendications des mouvements d'opposition. Hier, le premier ministre se disait ainsi prêt à défendre des politiques aujourd'hui impopulaires, mais nécessaires à l'avancement du Québec. Tout dépendra de la réaction des Québécois devant l'évocation de changements dans les politiques libérales. Pour l'instant, on en est à l'étape des ballons d'essai, qui se multiplieront sans doute ces prochains jours. La mesure que l'on prendra de la réaction des Québécois permettra d'établir quels virages effectuer, et à quel degré.
Le gouvernement n'a pas arrêté sa stratégie. L'indique le report de la présentation d'un nouveau discours inaugural qui était attendu pour la rentrée de mardi. Ce discours ne viendra que plus tard. Il faut voir là l'effet de l'état de désorganisation du gouvernement, auquel M. Charest a entrepris de remédier avec la nomination d'un nouveau chef de cabinet et l'entrée au Conseil des ministres de trois députés qui rongeaient leur frein depuis longtemps et dont il s'assure ainsi la loyauté.
S'il vient, ce discours inaugural sera l'occasion d'un nouveau départ. Il clarifiera le cours de l'action du gouvernement et des décisions à venir dans les dossiers qui l'éloignent de la population. S'il n'arrive pas à créer ce rapprochement, d'ici douze mois au plus tard, Jean Charest aura sans doute épuisé les «éternités» dont il dispose aujourd'hui. Il en restera une seule, et c'est celle dont son successeur aura besoin pour préparer la prochaine confrontation électorale. Il devra la lui réserver.
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