La Cour d'appel de l'Alberta donne raison aux provinces dans leur bataille pour bloquer le projet de loi fédéral de création d'une commission des valeurs mobilières pancanadienne. Si le gouvernement Harper n'était pas si entêté, il mettrait fin dès maintenant à sa tentative de s'approprier des compétences qui ont toujours été exercées par les provinces.
Il y a un an, Ottawa rendait public le libellé d'un projet de loi créant une commission nationale des valeurs mobilières avec le soutien actif de l'Ontario. Devant le rejet de son projet par quatre provinces et l'appui très réservé des autres, le gouvernement Harper a demandé à la Cour suprême de se prononcer. De leur côté, le Québec et l'Alberta entreprenaient une procédure similaire auprès de leur cour d'appel respective.
Dans le cas de la Cour suprême, les audiences sont prévues pour le mois prochain. En revanche, la Cour d'appel de l'Alberta a déjà rendu sa décision et l'on attend celle de la Cour d'appel du Québec pour bientôt.
Difficile de prévoir de quel côté pencheront ces deux tribunaux, qui se sont plus souvent montrés sensibles aux arguments du gouvernement fédéral. Mais dans le cas de la cour albertaine, sa décision est entièrement favorable aux provinces.
Ottawa prétend qu'avec la mondialisation, le commerce des valeurs ne connaît plus de frontières. Or, puisque le commerce international est de sa compétence, il serait moins coûteux et plus efficace de centraliser les contrôles de l'industrie des valeurs mobilières.
Logique ou non, répond la cour, la fédération canadienne n'a pas été conçue ainsi. Au contraire, cette prérogative revient aux provinces, de qui relèvent les questions de droit civil et de propriété.
Il ne suffit pas de constater que la réalité évolue dans un sens ou l'autre pour qu'un gouvernement s'arroge le droit d'interpréter la Constitution à sa guise. Le monde des assurances et celui des professions se sont aussi internationalisés, explique le tribunal, cela ne donne pas le droit à Ottawa de réglementer ces secteurs reconnus de compétence provinciale.
Autre argument rejeté par la Cour, celui du risque de grave crise financière à laquelle seule une organisation centralisée pourrait faire face. D'abord, une telle crise qui justifierait une intervention d'urgence d'Ottawa n'a pas lieu à l'heure actuelle; et de toute façon, Ottawa ne pourrait pas imposer des règles uniformes puisque les provinces continueraient d'exercer leur autorité sur leur territoire.
Voilà des arguments qui font sûrement plaisir aux provinces, sauf à l'Ontario dont l'appui au projet fédéral tient à la volonté clairement manifestée de faire de Toronto la seule grande place financière au pays. Curieusement, c'est aussi pour protéger sa position privilégiée que l'Ontario est sur le point de s'opposer à la fusion de la Bourse TMX avec le London Stock Exchange, une transaction qui est pourtant le signe le plus tangible de cette mondialisation de la finance qui lui sert d'argument-choc en faveur de la création d'une commission nationale des valeurs mobilières...
En tout respect pour la Constitution, Ottawa doit renverser cette tendance à la centralisation de l'industrie de la finance en Ontario et encourager plutôt le développement de pôles régionaux forts à l'est et à l'ouest, dont celui de Montréal.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé