LANGUE

Droit fondamental ou compromis politique?

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Que du vent !

La semaine dernière, le commissaire aux langues officielles du Canada, M. Graham Fraser, a annoncé devant le comité permanent pour les langues officielles qu’il déposerait plusieurs rapports — dont le très attendu « rapport spécial sur Air Canada » — avant de quitter ses fonctions l’automne prochain. Air Canada a souvent été blâmée par le commissaire en raison de ses manquements répétés à ses obligations en matière de langues officielles.

Malgré tout le respect que l’on doive porter au commissaire, il faut bien admettre que depuis l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, les éléments substantiels des droits linguistiques sont déterminés par les tribunaux et, au premier chef, par la Cour suprême du Canada. Ainsi, sans attendre ces rapports de M. Fraser, nous faut-il examiner la détermination judiciaire récente des droits linguistiques.

Détermination judiciaire

La Cour suprême du Canada a tranché plusieurs litiges relativement aux droits linguistiques ces dernières années, dont notamment une affaire qui impliquait Air Canada, en raison du fait qu’elle n’offrait pas de services en français lors de ses vols internationaux ainsi que dans certains aéroports. Ainsi, dans l’arrêt Thibodeau (2014), la Cour suprême a conclu que malgré les violations de la Loi sur les langues officielles (LLO), les citoyens canadiens n’avaient que peu ou prou de recours contre Air Canada ; la LLO — quoique jugée de nature « quasi constitutionnelle », c’est-à-dire ayant une prééminence sur toutes les autres lois — étant supplantée par les normes du droit international consacrées par la Convention de Montréal, laquelle a été ratifiée par le Canada en 2002.

À l’exception de l’arrêt Association des parents de l’école Rose-des-Vents (2015) — où il s’agissait d’appliquer le principe de l’équivalence des services fournis en vertu de l’article 23 de la Charte relativement à l’instruction dans la langue de la minorité (une décision contraire aurait signifié l’acceptation de la discrimination comme l’avaient fait les États-Unis avec la doctrine ségrégationniste entre 1896 et 1952) —, la Cour suprême a ravivé son interprétation timorée des droits linguistiques.

Ainsi, dans l’arrêt Commission scolaire francophone du Yukon (2015), elle a conféré la préséance aux normes législatives territoriales, lesquelles soustrayaient des autorités francophones le pouvoir de déterminer les critères d’admissibilité aux écoles françaises. Dans l’arrêt Caron (2015), qui soulevait la question du bilinguisme législatif, la Cour suprême a rejeté la proposition voulant que les droits linguistiques puissent découler d’une norme juridique implicite, comme elle l’avait pourtant déterminé dans le Renvoi sur la sécession du Québec (1998). C’est sur la base de ce raisonnement que la Cour d’appel de l’Ontario avait appuyé sa décision afin de maintenir ouvert l’hôpital Montfort à Ottawa, le seul hôpital universitaire francophone de la province. Les spécialistes des droits linguistiques reconnaissent habituellement qu’il y a eu trois périodes quant à l’interprétation des droits linguistiques constitutionnels à la Cour suprême.
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Alain-Robert Nadeau4 articles

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Avocat et docteur en droit constitutionnel, l'auteur publie ces jours-ci ses Propos sur la justice constitués d'un agrégat de 60 chroniques et de 10 entrevues publiées principalement dans les pages du Devoir.





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