Le « HEILLE » du premier ministre

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Le harcèlement fédérastique


Le moment fort de la conférence de presse de François Legault sur ses demandes aux partis fédéraux, hier matin, fut sans contredit son « heille ».


L’interjection est sortie de sa bouche au moment où il évoquait certaines promesses libérales en santé, notamment 3 milliards $ pour embaucher 7500 médecins de famille et infirmières.


« Heille, on les prend où, les médecins ? Ça prend sept ans pour [en] former [...], on fait quoi en attendant ? [...] Ce ne sont pas des fonctionnaires à Ottawa qui devraient décider des priorités au Québec », pesta François Legault.


Ça venait du fond du cœur.


Piétiner doublement


Avec raison. On connaissait la manie libérale de piétiner les compétences des provinces. Mais avec ces promesses récentes, ça devient pathologique.


L’équipe Trudeau va jusqu’à s’engager à rembourser les prêts étudiants des médecins qui accepteront d’aller pratiquer en région ! Dans sa chronique constitutionnelle de lundi à Qub, Patrick Taillon y voyait une sorte de deux pour un : une mesure, deux compétences exclusives envahies : santé ET éducation !


J’en discutais mardi avec une membre du gouvernement fédé-ral. Elle relativisait, soutenait en substance que les électeurs se soucient peu de ces questions. En plus, faisait-elle valoir, quand il envahit, Ottawa compense : à preuve, les 6 milliards $ que le gouvernement Trudeau s’est engagé à verser au Québec sur 5 ans pour les garderies.


Mais à quoi sert d’avoir une Constitution si un gouvernement la contourne sans vergogne, grâce un pouvoir de dépenser qu’il croit illimité ?


Rapport de force


Revenons à Legault : la conférence de presse d’hier était remarquable. Bien sûr, c’est un exercice dont les premiers ministres du Québec raffolent : ils sont en demande.


Mais le style Legault, clair, concret, lui a permis de passer des messages forts, en profitant d’un rapport de force avantageux.


En après-midi, le chef du Parti conservateur, Erin O’Toole, lui répondait avec une missive dans laquelle il promet au Québec « un nouveau fédéralisme » qui « offre un nouveau pacte fondé sur le respect ».





6 milliards $ ou 6 %


À mon micro de Qub par la suite, M. O’Toole a tout de même refusé de s’engager, s’il est élu, à verser les 6 milliards $ pour les services de garde, prévus dans l’entente Trudeau-Legault du 5 août. On le comprend : un gouvernement O’Toole annulerait le programme de garderie des libéraux et verserait plutôt une aide directe aux familles.


Il a refusé aussi de s’engager à faire passer de 22 à 35 % le financement fédéral en santé, comme le réclame François Legault. Il a plutôt rappelé sa promesse de faire croître les transferts de 6 % par année, ouvrant la porte à une augmentation plus grande si la croissance économique le permet.


Bref, sur 5 ans, ce sera 6 milliards $ rouges (pour les services de garde). Sinon, les 6 % bleus (pour la croissance des transferts en santé) !


Mais au fond, pourquoi toujours devoir quémander à Ottawa des sous qu’on lui a en grande partie envoyés ? Réclamer un transfert de points d’impôt serait plus simple. Le gouvernement Lesage, dans les années 1960, en avait obtenu.


Et c’est ce que préconisait la CAQ dans son fameux « Nouveau projet pour les nationalistes du Québec », en 2015. Ainsi, le Québec ne serait « plus à la merci des brusques changements de cap dans les orientations budgétaires d’Ottawa », écrivait la CAQ, qui plaidait aussi pour un encadrement du pouvoir fédéral de dépenser (promesse non tenue de Harper).


Rappeler ces solutions réelles aux défauts du fédéralisme canadien eût sans doute constitué un « heille » encore plus porteur et durable.











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