Des mères porteuses pourront être remboursées pour certaines dépenses

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Vers une banalisation de la marchandisation des enfants

(Ottawa) D'ici moins d'un an, les mères porteuses pourront être remboursées pour une série de dépenses encourues pendant la grossesse, de la compensation pour les heures de travail manquées aux factures d'épicerie ou de télécoms.



Santé Canada a annoncé, hier, par voie de communiqué l'entrée en vigueur prochaine de trois mesures réglementaires entourant la procréation assistée, dont celle portant sur la gestation pour autrui, qui sera implantée à compter du 9 juin 2020.


Le gouvernement a ainsi accouché d'une liste comptant plus d'une dizaine de dépenses valables pour un remboursement - frais « relatifs aux vêtements de maternité », frais « liés à l'accouchement », frais « de services de consultation », etc.


Le règlement ne fixe pas de plafond de dépenses. « À condition de respecter les exigences énoncées », a précisé à La Presse Éric Morrissette, porte-parole chez Santé Canada, en indiquant qu'il n'existait auparavant aucune liste officielle en cette matière.


 


Si les paramètres révélés hier constituent une « grande déception », ils ne représentent pas pour autant « une surprise », a écrit à La Presse la présidente du regroupement Pour les droits des femmes du Québec (PDF), Diane Guilbault.




« Le gouvernement donne tout son appui à une industrie qui profite du désir d'enfants de parents suffisamment riches pour se payer les services d'une mère porteuse et ainsi obtenir un enfant sur commande. »


- Diane Guilbault, présidente de Pour les droits des femmes du Québec




Ottawa permet aussi « que des femmes qui transigent leur bébé par l'entremise d'un contrat à des commanditaires soient mieux traitées que des femmes qui ont des enfants avec l'intention de les garder », a soutenu Mme Guilbault.


Moins loin que la décriminalisation


Les propositions gouvernementales avaient été mises de l'avant après que le député libéral d'arrière-ban Anthony Housefather eut présenté un projet de loi visant à décriminaliser la rétribution des donneurs de gamètes et des mères porteuses.


La Loi sur la procréation assistée de 2004 interdit ces pratiques au Canada. Elles sont permises seulement si elles sont gratuites - en revanche, les mères porteuses peuvent se faire rembourser certains frais liés à la grossesse.


Le projet de loi C-404 du député Housefather, qui visait à modifier cette loi, est mort au feuilleton, n'ayant jamais été débattu dans cette législature. Invité à offrir son avis sur le cadre réglementaire dévoilé hier, l'élu a signifié qu'il restait sur son appétit.


« Il est certain que cela ajoute un peu de certitude, ce qui est bien, mais les dépenses sont limitées à celles contenues dans la liste. Cela signifie que, s'il s'ajoute des dépenses qui ne sont pas sur la liste, vous ne pouvez les réclamer », a-t-il déploré.


« C'est problématique », a conclu M. Housefather dans un échange de courriels avec La Presse.


La mesure législative qu'il avait présentée en mai 2018 jouissait d'un bon appui au sein des troupes libérales. Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, avait lui-même affirmé que c'était « une réflexion que nous devons avoir en tant que société ».


De plus en plus de Canadiens se tournent en effet vers la procréation assistée pour fonder une famille, plaidait-on au gouvernement. La ministre de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, y a fait écho, hier, dans une déclaration accompagnant l'annonce.


Les nouveaux règlements donneront aux Canadiens, « en particulier les couples aux prises avec des problèmes d'infertilité, les personnes célibataires et les membres de la communauté LGBTQ2+, d'autres options pour fonder leurs familles », a-t-elle affirmé.




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