J'ai toujours cru que les députés du Parti québécois étaient des idéalistes et les motifs de démission de cinq d'entre eux me l'ont confirmé. Dans cette crise interne, il est difficile de dissocier le vrai du faux, à savoir quels sont les véritables motifs amenant ces départs. La loi 204 sur l'amphithéâtre? Ce n'était que la goutte qui a fait déborder le vase, selon plusieurs démissionnaires. Est-ce à dire que le vase était déjà plein? Mais plein de quoi? Plein de frustrations, bien sûr! Les motifs? Peut-être en partie le manque de liberté dû à la discipline de parti, mais surtout une grosse fatigue idéologique qui a pris sa source lors du résultat de l'élection fédérale du 2 mai dernier.
En effet, l'élimination du Bloc québécois, parti souverainiste, a brisé les fondements traditionnels de cette idéologie nationaliste qui a déjà traversé de grandes périodes de mutation. Du concept d'indépendance (années 1960) à la souveraineté-association (référendum de 1980), au beau risque (1984), à l'affirmation nationale (1987), à la souveraineté partenariat (référendum 1995), aux conditions gagnantes (1998), à un référendum le plus tôt possible dans un mandat (2005), à un référendum au moment jugé opportun (2011), les militants péquistes ont régulièrement changé de «mantra» et le vase idéologique actuel ressemble plus à une fatigue idéologique qu'à une crise de leadership. Après tout, la chef du Parti québécois a reçu 93 % d'appui lors du dernier congrès, c'est un record historique pour le PQ.
D'une autre époque
Le Parti québécois peut-il se sortir de cette crise idéologique? Oui, à la condition de sortir de son carcan idéologique qui le confine à un espace trop restreint. Il doit sortir de son carré de sable qu'il a bâti lui-même, adapter sa culture et son langage politiques à une approche plus populaire et moins élitiste. À l'instar de l'Église catholique en plein déclin au Québec, le Parti québécois est perçu dans le grand public comme ayant une idéologie «souverainiste» d'une autre époque, qui ne correspond plus, au niveau du langage du moins, aux besoins du peuple québécois.
Le nouveau programme de «gouvernance souverainiste» répond-il à ces besoins? Le projet de création d'une nouvelle constitution québécoise, d'une nouvelle charte des droits et libertés, et d'une citoyenneté québécoise ou de rapatriement de pouvoirs fédéraux ne constitue-il pas un premier pas vers la souveraineté politique d'un nouvel État? De quel type d'État s'agit-il? Une république de type présidentiel? Une nouvelle démocratie parlementaire avec une proportionnelle régionale? Le rapatriement de nouveaux pouvoirs dans le cadre fédéral ne constitue-t-il pas pour certains péquistes une caution du système en place, décrié par de nombreux militants souverainistes plus pressés? Une stratégie qui n'est pas sans rappeler la participation du Bloc à Ottawa pendant les 20 dernières années qui n'a, somme toute, pas fait avancer l'idéologie souverainiste traditionnelle.
Vaincre les peurs
Pauline Marois doit vaincre, non seulement l'esprit défaitiste hérité de l'élection fédérale du 2 mai, mais aussi les peurs traditionnelles du Parti québécois. Il y a, d'une part, la peur chronique d'une autre défaite référendaire et, d'autre part, la peur du report illimité d'une éventuelle consultation populaire. Elle ne veut pas se laisser distraire, dit-elle; peut-être devra-t-elle maintenant axer son discours vers une gouvernance publique plus efficace avec de nouvelles institutions démocratiques plus représentatives de la population et se distancer du discours souverainiste passéiste.
Ainsi, elle se distancerait de ses détracteurs en définissant les bases d'une nouvelle république démocratique indépendante du Canada de 1982, dont le Québec n'a jamais signé la Constitution. Pensons-y: contrôler tous les leviers décisionnels, soit la totalité des taxes et impôts, l'adoption des lois sur son territoire et la signature de traités internationaux avec des alliances qu'il a choisies! Ainsi, le «nouveau» Parti québécois pourrait renaître, débarrassé de son carcan idéologique traditionnel qui freine son élan et la réalisation de son projet de société.
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Jean Baillargeon - Expert-conseil en communication et développement stratégique
Avenir du Parti québécois
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