Beaucoup d’objets sont perdus dans l’armée

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Le laisser-aller des Forces armées canadiennes

OTTAWA | De l’équipement militaire disparu aux ordinateurs volés, en passant par les quelque 2000 armes et accessoires perdus ou brisés, la Défense a échappé d’importantes quantités de matériel encore cette année, signe d’une culture du laisser-aller, selon d’anciens hauts gradés.


Les Forces armées et son ministère se sont fait voler 353 fois lors de l’année fiscale se terminant au 31 mars dernier, révèlent les Comptes publics du Canada publiés en octobre.


Au total, les vols et actes de vandalisme ont coûté 88 000 $ en fonds publics, une hausse de 32 % par rapport à l’an dernier.


« Je pense que c’est lié à un climat de laisser-faire, qui n’est pas discipliné. Je m’attendrais à ce qu’il y ait un meilleur contrôle », a indiqué le colonel à la retraite Michel Drapeau, autrefois responsable de la logistique au sein des Forces armées canadiennes.


Il s’inquiète en particulier de la dizaine de vols d’ordinateurs et des données sensibles qu’ils pourraient contenir.


Objets perdus


Aux objets volés s’ajoutent des centaines de milliers de dollars en objets perdus, une vaste catégorie qui inclut aussi les articles détruits ou endommagés.


On y retrouve par exemple trois armes réellement perdues (2 baïonnettes et un bouchon de tir) pêle-mêle parmi 2183 armes et accessoires endommagés.


La liste comprend aussi 4000 tenues de combat, indistinctement classées comme « pertes de fonds publics attribuables à une perte, destruction ou un dommage accidentel », tout comme deux avions qui se sont écrasés (valeur de 2 M$), ou encore les dommages causés par un incendie à un immeuble de la Défense (7,5 M$).


« La perte de n’importe quelle arme, accessoire ou tenue de combat est un vrai problème », admet le général à la retraite Walter Semianiw.


Il précise que les chiffres contenus dans les comptes publics ne permettent pas de véritablement départager ce qui constitue une perte de ce qui a simplement été brisé. Une enquête est normalement nécessaire lors de tout objet égaré ou volé.


Inventaire


Ces données sont connues au même moment où le chien de garde des contribuables canadiens, Michael Ferguson, a conclu cet automne pour une 14e année consécutive que la Défense gère mal ses stocks, comme des munitions, du carburant ou des fournitures médicales.


Pour le vérificateur général, le gouvernement échoue à garder la trace de ce matériel, et n’en connaît pas la valeur exacte. Cet inventaire vaudrait ainsi près de 6 milliards de dollars.


« Il y a beaucoup de travail rigoureux à faire afin de s’assurer que les quantités [inscrites] soient bonnes, que leur valeur soit exacte. [...] Le problème, on le constate depuis 14 ans. C’est important que le ministère trouve comment le régler », a-t-il précisé, après avoir publié cette remarque dans le dernier rapport sur les comptes publics.


Il note toutefois certaines améliorations cette année, comme la mise en place d’un plan.


Exemples de vols et pertes de matériel militaire


Objets volés :



  • 2 vols d’équipement de transport : 16 800 $

  • 10 ordinateurs : 16 724 $

  • 88 vols d’équipement spécifique militaire : 14 467 $

  • 159 tenues de combat : 14 260 $


Total des vols : 88 068 $ (hausse de 32 %)


Autres pertes de fonds publics



  • 1 édifice endommagé* 7 458 177 $

  • 2 avions militaires écrasés : 2 052 329 $

  • 441 pertes ou bris d’équipement spécifiques militaires : 358 726 $

  • 232 ordinateurs perdus* 285 885 $

  • 3982 pertes ou bris de tenues de combat : 272 674 $

  • 2186 pertes ou bris d’armes et accessoires : 139 960 $


Total des pertes et bris : 12 730 063 $


Source : Comptes publics du Canada 2016-2017, vol III


* L’édifice à bureaux fédéral Louis-Saint-Laurent, à Gatineau, a été sérieusement endommagé par un incendie en avril 2016, raison de la « perte » de la plupart des ordinateurs du ministère de la Défense nationale cette année.


– Avec la collaboration d’Émilie Bergeron