D’une façon générale, tous les commentateurs, organismes financiers, gourous & Cie ont quitté la “bulle” des décomptes et contestations divers des effets de la grande crise de l’automne 2008 et conséquences, avec la crise européenne, la crise de la dette US, etc., ce temps où l’on mesurait les effets de la chose pour en déterminer les conséquences. Nous sommes entrés dans une autre séquence, dans une sorte de “sas” qui s’est établi entre les crises syrienne et ukrainienne, et nous en avons usé pour franchi un nouveau Rubicon. Nous sommes désormais postés dans l’attente de la prochaine crise du type “bulle”, comme c’est la tradition, et de catégorie financière. Bien entendu, tout le monde s’accorde à observer qu’elle sera terrible. Le décalage entre la folie des bourses qui sont à des hauteurs sans précédent où dominent l’ivresse et l’irresponsabilité et la pauvreté catastrophique des situations économique et sociale illustre un déséquilibre qui devient de plus en plus insupportable. Les tonnes de papier-monnaie imprimé par la Fed ne servent qu’à la folie des bourses et aux magouilles des banques, et nullement, ni à l’économie, ni à la population. L’idée de bien public, le sentiment de la solidarité, sont emportés par l’extraordinaire inconscience collective qui est la marque de cette contre-civilisation... Triste cortège qui n’attend que le classique “éclatement de bulle” pour se faire son affaire et se précipiter dans un nouvel abysse.
Dernier “indicateur” en date, le 84ème rapport annuel d’une institution respectée, la Bank for International Settlement (BIS) installée en Suisse. Il est apprécié et commenté sur un fond assez sombre d'une rude nouvelle, celle de la contraction de 3% de l’économie US durant le premier trimestre de 2014. Nick Beams présente le rapport BIS et ses perspectives, sur WSWS.org le 30 juin 2014.
«... The report expressed concerns that the present low-interest rate regime, initiated to try to overcome the effects of the 2008 crash, has pushed financial markets to new highs while lowering the rate premium for many risky loans. The BIS noted that markets had been “exuberant over the past year,” particularly in advanced economies. They were “dancing mainly to the tune of central bank decisions,” with volatility reaching historical lows and “market participants ... hardly pricing in any risks.” “Overall, it is hard to avoid the sense of a puzzling disconnect between the markets’ buoyancy and underlying economic developments globally,” the bank stated.
»The “disconnect” is most clearly expressed in the United States, where the Federal Reserve’s policy of pumping trillions of dollars into financial markets has seen stock market indexes reach record highs, while the underlying economy stagnates and reverses. Last week, it was revealed that the US economy contracted almost 3 percent in the first quarter of 2014, but stock markets climbed even further in the belief that the on-going stagnation would lead to the provision of still more ultra-cheap money. [...]
»The BIS warned that any crisis in emerging markets would have a major impact on the more advanced economies. Since the Asian financial crisis of 1997, the share of emerging market economies had risen to around one third of global gross domestic product and their weight in the international financial system had increased. “The ramifications would be particularly serious if China, home to an outsize financial boom, were to falter. Especially at risk would be the commodity-exporting countries that have seen strong credit and asset price increases and where post-crisis terms of trade gains have shored up high debt and property prices.”
»The BIS did not specifically name Australia but the description matches its economy exactly. Other commodity exporting countries that would suffer a major impact include Brazil and South Africa.
According to the report, it was “somewhat unsettling” to see growth patterns similar to those that preceded the crisis of 2008. Property prices in Britain had been “unusually buoyant,” while segments of the corporate lending market in the US were “even frothier than they were before the crisis.”
»While it did not name the US Federal Reserve, the BIS report criticised its policy of quantitative easing on two fronts. While the benefits of “unusually easy money” policies may appear quite tangible in the short term, especially if assessed on the basis of the response of financial markets, “the costs ... will become apparent only over time and with hindsight. This has happened often enough in the past.” The BIS then took aim at the Fed’s policy of informing financial markets of its intentions. “Seeking to prepare markets by being clear about intentions may inadvertently result in participants taking more assurance than the central bank wishes to convey. This can encourage further risk-taking, sowing the seeds of an even sharper reaction.”
»In other words, the very policies being implemented, supposedly with the aim of preventing a financial crisis, may well be creating the conditions for one. The report noted that any policy model which relied too much on the increase of debt, as “financial booms sprinkle the fairy dust of illusory riches” over time “sows the seeds of its own demise.”»
Cela fait plusieurs semaines que sont publiées, détaillées, commentées, etc., des analyses alarmistes concernant la situation financière en fonction du comportement des bourses et des spéculations et autres arrangements postmodernes qui vont avec. Le nihilisme de l’action (pseudo-)publique, la Federal Reserve en premier avec son rôle d’imprimeur-en-chef alimentant ce qu’il y a de plus pervers dans le système financier, pèse de tout son poids sur les psychologies. De ce point de vue de l’espèce de prescience qu’on peut avoir des choses, effectivement, l’atmosphère commence à ressembler à ce que l’on a connu entre l’été 2007 et l’effondrement de septembre 2008, – mais, semble-t-il, en beaucoup plus rapide, selon l’observation constante de l’accélération de l’histoire et de la contraction du temps. Par conséquent, tout le monde attend la crise de pied ferme ou de plume alerte, et sans doute viendra-t-elle en surprenant tout le monde. Sera-ce une réplique de celle de 2008, pour ce qui est du contexte et de la psychologie de la crise ?
La crise de septembre 2008 vint renverser les préoccupations générales, en les faisant passer des domaines extérieurs (la catastrophe irakienne, les menaces d’attaque contre l’Iran, le démarrage de la crise de l’environnement dans le système de la communication à partir de l’automne 2006, etc.) au domaine très technique, très sectoriel mais aussi directement (en principe) connecté sur la vie courante de la finance puis de l’économie. Nous avons nous-mêmes perçu cette crise comme un deuxième tournant de l’époque commencée avec 9/11, avec l’instauration d’une nouvelle narrative (sauvegarde et “renaissance” vertueuse de l’hyper-capitalisme spéculatif et postmoderniste) qui s’est avérée bien entendu complètement faussaire et a entraîné une rapine financière sans précédent et une accentuation catastrophique de la crise économique et sociale structurelle. Des aventures extérieures nouvelles, à l’occasion du “printemps arabe” (démarrant en décembre 2009), ont transformé l’équipée unilatérale des USA en équipée intégrée du monde occidental, – ce que nous avons appelé à partir de cet épisode le bloc américaniste-occidentaliste, ou “bloc BAO”, développant une “politique-Système“ plus ou moins acceptée par tous ses membres (voir les Glossaire.dde des 10 décembre 2012 bloc BAO] et [17 novembre 2012 [politique-Système] respectivement).
Bien entendu, si l’“atmosphère” a un air de famille témoignant de notre complète intégration dans l’infrastructure crisique qui caractérise l’époque, les circonstances et le contexte sont si différents ... D’abord, nous sommes toujours groggy des coups reçus lors de la crise de 2008, et aucun des problèmes mis à jour par l’événement n’a été, évidemment, résolu, et tous ces problèmes ont même été aggravés, évidemment . Le contexte est lui aussi complètement différent. La situation des relations internationales s’est aggravée d’une manière vertigineuse, non seulement dans le sens de l’aggravation objective des situations, mais plus encore, dans le sens de leur incontrôlabilité, de leur nihilisme, avec l’absence totale d’une direction quelconque. L’ivresse du domaine financier semble avoir également touché les directions politiques du Système, qui évoluent dans des bulles de narrative, en aveugle, sans rien comprendre des situations que cette action erratique ne cesse d’aggraver. Non seulement le Titanic semble aller d’iceberg en iceberg comme le boxeur groggy, mais il semble qu’il n’y ait même plus de boxeur, que la barre a depuis longtemps été abandonnée parce qu’on danse sur le pont du navire en perdition, sur un rythme “zombi”. Danse pour danse, nous ne dansons pas sur un volcan, nous dansons dans une éruption volcanique colossale et d’ores et déjà en cours, et qui fait partie de la crise d’effondrement du Système elle-même. Il nous paraît cette fois impossible qu’une nouvelle crise financière “kidnappe“ le sens de la crise comme ce fut fait en 2008, où tout fut ramené à la crise financière une fois que celle-ci eût été déclenchée, donnant ainsi le sentiment paradoxalement réconfortant qu’en résolvant la crise financière on remettrait le navire à flot. Au contraire, il y a partout des incendies grondants, où des acteurs extérieurs à la logique du Système sont déjà en pleine action, et l’on peut alors supposer qu’ils profiteront de l’éventuelle crise financière pour encore accentuer cette action ; une nouvelle crise financière ne donnera pas le sentiment de ramener tout à elle, et donc d’occulter le reste, au contraire elle constituera un nouvel élément pour alimenter le reste...
On doit observer que la psychologie dominante pour l’instant est une psychologie d’attente, et d’attente de la crise, on dirait presque d’“attente confiante” ; on croirait que, malgré les perspectives catastrophiques de la crise financière, cette psychologie attend et réclame cette crise comme on attend un paroxysme nécessaire, comme face à une tumeur maligne qui a fait assez souffrir et qu’il s’agit d’éradiquer. Bien entendu, une telle psychologie n’a rien à voir avec la psychologie d’un regroupement solidaire pour la sauvegarde de tous ; 2008 a servi de leçon à cet égard. Il s’agit d’une psychologie de l’hostilité et du mépris, de la rancœur, de la colère et de la fureur, face à ce Système qui a démontré d’une façon extraordinairement impudente son extraordinaire fatalité de nuisance et de haine de tout ce qui est structuré. Face à la prochaine crise, notre psychologie, qui est d’ores et déjà celle du “Toi, le venin” du doigt accusateur pointé sur le Système, deviendra évidemment celle du “Crève, le venin”.
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